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Sanitaire

Contenir le parasitisme en développant l’immunité des troupeaux

Laura Cauquil, vétérinaire du GDS Isère, décrit le processus d’infestation et rappelle quelques bonnes pratiques pour limiter la contamination des parasites internes.
Contenir le parasitisme en développant l’immunité des troupeaux

On vient de vivre un hiver doux et humide, quelles sont les conséquences sur le parasitisme interne ?
Laura Cauquil : « Ces conditions météorologiques ont en effet des conséquences sur les larves des strongles digestifs qui passent l'hiver dans le sol. Un hiver rigoureux avec de longues périodes de gel détruit les larves et diminue la charge parasitaire. Il est clair que la météo joue sur le volume de parasites. Un printemps doux et humide va aussi favoriser l'infestation. Cela ne concerne pas les paramphistomes et les douves car leur forme adulte perdure à l'intérieur de l'organisme des animaux. »

Quelles sont les zones d'infestation ?
L. Q. : « Les strongles prolifèrent au pied de l'herbe sur toute la surface des prairies pâturées. La grande douve et les paramphistomes sont positionnés au pied de l'herbe dans les zones humides et inondables, en bordures des rigoles et des ruisseaux. Ils ont un hôte intermédiaire, une limnée, un petit mollusque gastéropode d'eau douce. La petite douve est également propagée par une limnée puis une fourmi. »

Peut-on adopter une approche préventive ?
L. Q. : « Il est tout d'abord intéressant de connaître l'état sanitaire de son troupeau par le biais de la coproscopie. Cette analyse des bouses permet d'une part de déterminer le degré de contamination du troupeau et d'autre part d'identifier le type de parasites présent. L'éleveur va ainsi pouvoir adapter au plus juste l'intervention et les traitements. Une démarche qu'il serait même bon d'adopter lors de la rentrée des troupeaux, ce qui permet de connaître les parcelles les plus parasitées. On pourra ainsi adopter une approche préventive quant à la mise à l'herbe à venir. Car il peut être intéressant d'intervenir dans les parcelles en fonction du type d'infestation, assainir les zones humides pour lutter contre les douves et le paramphistome, aménager des abreuvoirs propres et sains. Réserver aux jeunes spécimens une parcelle peu ou pas infestée. Il faut toutefois rappeler une évidence, la meilleure prévention reste la bonne santé du troupeau qui sera ainsi en capacité de résister au parasitisme. D'autre part, il ne faut pas d'emblée se ruer sur les vermifuges même si l'on sait qu'il y a des parasites dangereux, lorsqu'il y a une succession de contaminations, avec des conséquences importantes en termes de production. »

Quels sont les animaux les plus concernés ?
L. Q. : « Pour ce qui concerne les strongles, les bovins qui ont passé l'hiver à l'intérieur ne sont plus contaminés, ils peuvent être porteurs mais, comme ils ont déjà été exposés, ils ont développé un système de défense immunitaire qui peut les protéger. Il faut savoir qu'en matière de parasitisme, de strongle en particulier, ce sont les jeunes qui vont être les plus sensibles. En parasitologie, il n'y a pas d'idéal, c'est avant tout une histoire de compromis. Il s'agit de trouver un équilibre. Donc, toute la difficulté consiste à faire en sorte que les jeunes bovins développent des défenses immunitaires sans qu'ils soient malades. »

Quelle conduite faut-il suivre ?
L. Q. : « On peut aider les animaux à se faire leur immunité. Lors de la mise à l'herbe, ils vont être exposés à une première contamination mais, comme c'est la première fois, elle ne va pas être trop impactante. Si les animaux restent dans la même parcelle, au bout de trois semaines, ils seront exposés à une deuxième contamination. On peut donc décider de ne traiter qu'au bout de six semaines à deux mois. On évite ainsi la troisième contamination qui s'avère souvent la plus dangereuse. Ainsi, le troupeau a été exposé au parasite sans pour autant développer la pathologie. La rotation des parcelles, quand elle est possible, reste toutefois l'une des meilleures pistes pour limiter la pression parasitaire. Elle retarde la contamination, limite le recours à la médication, réduisant ainsi le poste des soins vétérinaires. »

Quels traitements faut-il appliquer ?
L. Q. : « Lorsqu'il y a tout de même un niveau d'infestation, il faut recourir aux traitements. Il est bien évidemment impossible de donner une recette car chaque élevage est un cas particulier. Cela relève d'un travail de concertation entre l'éleveur et son vétérinaire traitant afin de mettre en place une stratégie adaptée à la conduite du troupeau, au type d'infestation. L'éleveur doit arbitrer entre le niveau de parasitisme toléré et la perte de production acceptable par rapport aux prix des traitements. » 

Propos recueillis par Magdeleine Barralon