Coopenoix prône la qualité et la réactivité

35 millions d'euros : le chiffre d'affaires consolidé réalisé par la coopérative Coopenoix à Vinay n'avait jamais atteint un tel niveau. Les bonnes conditions de la récolte 2017, sa précocité favorisant une rapide mise en marché, la qualité, tant en termes de couleur que de déchets, les calibres, situés dans la bonne moyenne, et la hausse du prix de vente ont permis de dresser un bilan de campagne des plus satisfaisants. La coopérative a collecté 7 500 tonnes de noix, soit 300 tonnes de moins qu'en 2016, un écart largement compensé par la performance. « La qualité est un élément clé pour résister à la concurrence internationale », insiste Marc Giraud, le directeur de la coopérative.
Le prix moyen payé au producteur en 2017 s'élève à 3,10 euros, toutes primes comprises, en calibre 28-30, soit 25 à 30 centimes de plus qu'en 2016. Le conseil d'administration de Coopenoix a en effet fait le choix de rémunérer les producteurs en rognant un peu sur la marge brute.
Faire front commun
Si le marché a été peu perturbé en 2017, le premier trimestre 2018 semble plus exposé. « L'environnement a évolué ces six derniers mois », expliquent les dirigeants. Les clients ont recherché des noix en 28 mm, moins chères que les calibres 30 mm, observent-ils.
Par ailleurs, les Américains et les Chiliens font preuve d'agressivité sur les prix, tout en proposant des produits avec de bons standards de qualité. « La croissance de la récolte américaine est de 15 000 tonnes par an. Il en est de même pour la noix chilienne. Ces 30 000 tonnes annuelles supplémentaires correspondent à la production française », expose Yves Renn, le président. Or, à ce jour, les américains disposent encore de stocks, n'ayant livré, pour des raisons géopolitiques, ni en Asie, ni en Turquie ou dans les autres pays du Moyen-Orient. « En revanche, ils ne sont pas en retard dans leurs expéditions en Europe », observe Marc Giraud. En 6 ans, les exportations américaines vers le vieux continent sont passées de 23 000 à 46 000 tonnes. Autant d'éléments que le plus gros collecteur français scrute. « Nous devons faire front commun », indique Yves Renn, adressant son message aux négociants.
Investissements
Face à ces repositionnements, la noix française peut se défendre par sa précocité, sa qualité et sa réactivité. « C'est le nerf de Coopenoix, sa capacité de mise en marché rapide », insiste Yves Renn. D'où les investissements conséquents opérés sur l'outil de production de Vinay, après l'agrandissement de 2016 : achat d'une deuxième trieuse optique, mise en température dirigée de la nouvelle zone de stockage, remplacement de la peseuse-conditionneuse, achat de 1 800 pallox etc., pour un montant de 700 000 euros. Cette année l'entreprise remplacera la ligne de conditionnement cerneaux et noix en coque. La qualité demeure un axe stratégique majeur. La coopérative a pour objectif d'atteindre 2 500 tonnes de noix certifiées Globalgap d'ici trois ans, pour 1 700 tonnes actuellement. Elle encourage les producteurs par des aides à l'hectare. Sur la noix bio, la demande de la clientèle est également très forte. Coopénoix en a commercialisé 650 tonnes en 2017 et recherche 100 tonnes supplémentaires. L'an dernier, les producteurs du Diois, qui assurent une grande partie de la récolte de noix bio, avaient été victimes du gel et perdu 70% des fruits.
Différenciation
La coopérative incite aussi les producteurs à veiller au renouvellement du verger et plus particulièrement en cœur de zone. « La franquette est toujours en tête des plantations, talonnée par la fernor et la lara reste à la marge », détaille Yves Renn. Il rappelle le travail effectué par le CING pour l'introduction de la fernor dans l'AOP. « Il faut continuer à y croire, cela prendra du temps. Ce sera pour nos enfants », lance le président. Il souligne combien cette AOP est un outil de différenciation « même s'il est logique pour une exploitation de se diversifier variétalement. » Yves Renn a également évoqué la production de cerneau. Pour se positionner sur le marché de niche auprès des consommateurs, Coopenoix s'est donné la capacité de traiter jusqu'à 300 tonnes. Elle en produit actuellement 171 tonnes.
Quant à la campagne 2018, elle devrait être plus modeste en volumes qu'en 2017 « avec une forte hétérogénéité suivant les zones », constate Yves Renn. En revanche, les calibres devraient être plus homogènes.
Président de la chambre d'agriculture et nuciculteur, Jean-Claude Darlet, a souligné quelques points d'alerte. Parasites, maladies, mais aussi dépérissement de certains arbres : l'état sanitaire du verger est à surveiller de près et cela ne se fera qu'en apportant une aide, comme le fait Coopenoix, à la Senura. Il a encouragé les projets d'irrigation et posé la question du traitement des eaux de lavages en suggérant le raccordement des exploitations aux stations d'épuration. Enfin, pour répondre à la pression sociétale, il a invité les producteurs à communiquer sur leurs bonnes pratiques.
Isabelle Doucet
Filière noix
Coup de soleil
Coopenoix dispose également d'un pôle technique qui mène des travaux de conseil et d'observation auprès des producteurs. Depuis deux ans, en collaboration avec la Senura, elle a installé chez ses adhérents un réseau de piégeage de la mouche du brou et le carpocapse pour établir des bases de données et communiquer hebdomadairement avec les producteurs. Le modèle mathématique de la station a permis cette année de prévoir dès juin le pic d'émergence des 23 et 24 juillet. Cet outil de précision s'est avéré d'une grande aide pour intervenir dans les vergers.Par ailleurs, le changement climatique semble produire des effets « coup de soleil » sur les fruits. De sorte que Coopenoix invite ses adhérents à faire évoluer leurs pratiques en protégeant leurs arbres et leurs fruits en pulvérisant de l'argile ou du talc. Cette pratique, respctueuse de l'environnement est cependant un peu agressive... pour les atomiseurs.