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Crise de l'élevage

Coup de chaud devant la DDT à Grenoble

L'administration était la cible de la colère des agriculteurs isérois qui ont manifesté devant la DDT ce mercredi 5 août. Récit de cette journée très chaude.
Coup de chaud devant la DDT à Grenoble

Une très grosse manifestation paysanne a réuni aujourd'hui mercredi 5 août à Grenoble une centaine d'agriculteurs isérois et une cinquantaine de tracteurs. Ils ont mené une opération escargot entre le péage de Voreppe sur l'A48 et les grands boulevards grenoblois pour se rendre devant le bâtiment de la DDT (direction départementale des territoires). A l'appel de la FDSEA et des JA de l'Isère, cette manifestation avait pour objectif de dénoncer les lourdeurs adminsitratives sous lesquelles la profession s'estime asphyxiée. « Non seulement, nous n'avons pas les prix que nos produits méritent et qui nosu permettraient de vivre, mais en plus, on nous impose de plus en plus de contraintes », expliquent les agriculteurs. Ils se demandent aussi comment s'en sortir « si nous sommes obligés tous les ans d'investir pour suivre les normes qui changent ? ». Il est également reproché à l'administration « de nombreux retards de procédure (...) et ce sont les agriculteurs qui trinquent ».

 

"Un mur entre l'administration et le terrain"

Les agriculteurs iséoris ont reçu le soutien exceptionnel de Xavier Beulin, président de la FNSEA et Dominique Barrau, secrétaire général, en déplacement dans le département. « Il est inacceptable, quand la situation est déjà difficile, d'ajouter des normes supplémentaires », a lancé le président du syndicat. « Nous ne voulons pas être différents de ce qu'acceptent nos voisins européens en matière de réglementation, a-t-il poursuivi. Qu'est-ce qu'on attend dans ce pays pour simplifier les choses? » La FNSEA porte plusieurs demandes, notamment une dérogation à l'obligation de procéder à des cultures intermédiaires ; ce qui n'a pas de sens alors que les sols sont secs, qu'il n'y a pas d'eau et que c'est coûteux. « Nous avons également obtenu que pour la première année de mise en œuvre de la Pac, les contrôles ne soient pas suivis de sanction. » Enfin, le président de la FNSEA a rappelé les engagement pris par Ségolène Royal en matière de lutte contre le loup. Avant de lancer le cortège de tracteurs, Pascal Denolly, président de la FDSEA 38, a insisté : « L'essentiel se joue sur le terrain. Si les enteprises et les grande distribution ne jouent pas le jeu et puisque l'Etat n'est pas capable de faire appliquer les engagements pris (ndlr : prix du lait à 340 euros la tonne), va falloir y aller ! »

Arrivés vers 11 heures du matin à Grenoble, les agriculteurs se sont installés devant la DDT, attendant la visite de Marie-Claire Bozonnet, la directrice. Ils ont commencé par construire un mur portant l'inscription « Vous voulez du béton, en voilà », allusion « aux investissements non productifs » sans cesse demandés aux agriculteurs pour se mettre aux normes, mais aussi, « parce qu'il il y a un mur entre l'administration et le terrain », a déclaré Françoise Soullier, présidente de JA38.

La question des contrôles

Vers 14 heures, la directrice de la DDT, accompagnée du secrétaire général de la Préfecture de l'Isère, est allée à la rencontre des agriculteurs. En matière de contrôle, elle a plutôt parlé de « coordination » et « d'explication en amont », précisant que, la Pac représentant 9 millions d'euros, « nous avons tous des comptes à rendre par rapport aux fonds publics ». La veille, Xavier Beulin avait prévenu les agriculteurs isérois qu'aucun fonctionnaire ne pourrait reconnaître publiquement qu'il lèvera le pied sur les contrôles. La directrice de la DDT a admis que les dossiers de demande d'installation (27 en tout) avaient pris du retard en début d'année, mais que les 12 restant seraient traités avant fin août. Elle a aussi annoncé un assouplissement des prêts bonifiés. En matière de lutte contre le loup, la directrice de la DDT a fait savoir que Ségolène Royal avait demandé son déclassement en tant qu'espèce protégée. Enfin, une conférence sur le lait se déroulera le 28 août. Ces éléments n'ont pas été de nature à calmer les agriculteurs, et notamment les JA qui ont vivement interpelé Madame Bozonnet, criant leur détresse : « Pas de salaire, pas de vacances ! », « on n'arrive plus à vivre », « on nous prend pour des voyous quand la gendarmerie se déplace pour les contrôles avec des gilets pare-balles ? ».

Dominique Barrau estime que  « la bataille des prix va prendre du temps. Mais nous avons besoin du gouvernement pour préparer un schéma où les producteurs s'inscrivent dans une relation contractuelle plus forte et ne restent pas la variable d'ajustement ».

Après les discours, qui n'ont pas du tout rassuré les agriculteurs, ils ont déversé de la paille et dispersés les papiers trouvés dans les bennes de recyclage devant la DDT. Ces matériaux se sont rapidement enflammés mais le feu a été circonscrit à l'aide d'un tank à eau. Le parvis de la DDT a été fortement marqué par le passage des agriculteurs.

Isabelle Doucet