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Trufficulture

Dans la Drôme, une expérimentation pour lutter contre les leiodes, ravageurs de truffes

La fédération Auvergne-Rhône-Alpes des trufficulteurs, la société Wetruf et ses partenaires mènent depuis 2024 une expérimentation de lutte naturelle contre les ravageurs leiodes. 


 

Dans la Drôme, une expérimentation pour lutter contre les leiodes, ravageurs de truffes
©Wetruf
Ces essais sont menés par la société Wetruf en partenariat avec la fédération Auvergne-Rhône-Alpes des trufficulteurs (Farat), la chambre d'agriculture de la Drôme et financés par la Région Auvergne-Rhône-Alpes et la fédération française de truffes.

Ils peuvent décimer des hectares de truffiers et les professionnels peinent à s’en débarrasser. Les leiodes, insecte ravageur de truffes, restent une espèce peu connue. En effet, malgré leur effet dévastateur, peu de recherches ont été menées sur cet insecte friand des truffes. Ainsi, dans le cadre du plan filière 2023-2027 lancé par la Région Auvergne-Rhône-Alpes, une expérimentation pour lutter naturellement contre ce ravageur a vu le jour. Direction la Drôme, et plus précisément Die sur l’exploitation de Georges Liotard. 

Jusqu’à 90 % de truffes touchées

Ces essais sont menés par la société Wetruf en partenariat avec la fédération Auvergne-Rhône-Alpes des trufficulteurs (Farat), la chambre d'agriculture de la Drôme et financés par la Région Auvergne-Rhône-Alpes et la fédération française de truffes. Le leiodes s’apparente à un petit insecte qui se nourrit et pond dans les truffes. « C’est un fléau dans certaines régions de France. La région Auvergne-Rhône-Alpes, et en particulier les départements de la Drôme et de l’Ardèche sont très touchés. Son cycle de vie est basé sur celui de la truffe », précise Flora Todesco, gérante et cofondatrice de la société Wetruf. Jusqu’à présent, les trufficulteurs utilisent des pièges chimiques contre les leiodes. « Le problème, c’est que ces pièges ne sont pas sélectifs, ils peuvent piéger massivement la biodiversité auxiliaire. C’est aussi une solution qui coûte assez cher », résume la professionnelle. Il faudrait environ 60 à 70 à pièges par hectare pour lutter contre le ravageur. Le coût ? Environ 20 € le piège et à changer tous les ans.


Ces pièges n’ont pas permis à Georges Liotard de venir à bout des ravageurs sur sa truffière. Certaines années, il peut perdre jusqu’à 90 % de sa production. Le leiodes apparaît généralement deux trois ans après la plantation. L’insecte a fait l’objet de si peu de recherches que Flora Todesco et ses associés ont peiné à trouver de la bibliographie sur l’espèce. « On peut supposer qu’elle est plus présente dans les sols argileux et humides que les sols sableux », indique la présidente de Wetruf sans certitude. Le leiodes peut faire pourrir les truffes lorsqu’elles pondent ou les percer de trous. Ainsi, le produit peut être déclassé à la vente car visuellement peu qualitatif ou carrément broyé. D’ailleurs, Wetruf s’interroge sur le facteur génétique, notamment lors du réensemencement.

Expérimenter sur plusieurs années

La lutte naturelle a l’avantage d’être moins coûteuse, de mieux cibler les insectes et d’être plus durable car non pas chimique. Des nématodes ont été utilisés pour mener les essais sur conseil de l’entreprise Koppert, spécialisée en biocontrôle. La société a déjà réalisé des essais en Espagne et souhaitait faire de même en France. Ils ont souhaité en faire en France. Le nématode conseillé s’attaque davantage aux larves des ravageurs. Il est ajouté dans de l’eau et appliqué lors de l’arrosage. En mars 2025, les partenaires de l’essai ont fait un premier bilan. « Nous avons décompté moins de leiodes en installant des pièges pour avoir une idée de leur nombre. Une trentaine de ravageurs ont été piégés contre deux à trois fois en 2023 », déclare Flora Todesco.

Jusqu’à présent, les trufficulteurs utilisent des pièges chimiques contre les leiodes. ©Wetruf

Toutefois, la production de truffes en 2024 n’a pas été très bonne chez le producteur donc les résultats des essais peuvent être faussés. « Ça reste de l’ordre de l’expérimentation, rappelle la professionnelle. Les premiers résultats sont encourageants mais préliminaires. Nous ne connaissons pas encore les potentiels revers. Les nématodes risquent-ils d’impacter une autre microfaune essentielle pour le développement de la truffe ? Il nous faut deux ou trois années de recul avant de tirer des conclusions ». La prochaine application de nématodes aura lieu ce printemps et une deuxième sera réalisée cet automne. L’expérimentation devrait ainsi se poursuivre jusqu’en 2027.

Wetruf, au service des trufficulteurs

La société Wetruf a été fondée fin 2019 par Flora Todesco et Claude Murat, ingénieure et chercheur à l’Inrae de Nancy. Elle valorise les recherches réalisées ces vingt dernières années sur la truffe et propose des innovations et des accompagnements techniques aux trufficulteurs. La société a par ailleurs travaillé sur des sondes adaptées pour la gestion de l’eau des truffières.

Le plan filière 2023-2027

Le plan filière régional permet entre autres l’aide à la plantation de chênes truffiers pour les agriculteurs. Cette aide est accessible sur le site de la région. Certaines conditions doivent être remplies : avoir des terrains propices, une analyse de sol est indispensable pour la plantation de truffiers et adhérer à un syndicat de trufficulteurs. Il est possible de bénéficier d’une aide 6 euros par plan pour une enveloppe de minimum de 100 plants et maximum de 700 plants. « Il y a une vraie demande sur le sud du département de la Drôme, probablement liée à l’arrachage des vignes. Le secteur de la Drôme des collines est favorable à la plantation notamment pour la qualité de ses sols », rapporte Didier Roche, président de la fédération Auvergne Rhône Alpes des trufficulteurs. À noter qu’un deuxième projet d’expérimentation sur les techniques cultures et le réensemencement est en cours dans la région.