Dans les Baronnies, les deux tiers de la récolte d’abricots sont perdus
Pour la sixième année consécutive, le gel a durement frappé la production arboricole des Baronnies. Une mission d’enquête destinée à activer le processus de reconnaissance de calamité agricole a constaté l’ampleur des dégâts.

Sur les 12 000 tonnes d’abricots prévues cette année, il ne devrait en rester plus que 4 000 tonnes sur les vergers des Baronnies. Les quatre jours de gel de début avril et auparavant de mars ont eu raison des deux tiers de la récolte. Un constat vérifié par la mission d’enquête menée le 10 mai par Elisabeth Manzon, Manon Courias et Clotilde Henrieux de la direction départementale des territoires (DDT), accompagnée par Yvan Jarnias (éleveur non concerné par le sinistre), Bruno Darnaud (représentant la chambre d’agriculture de la Drôme) et Benoît Chauvin Buthaud (conseiller chambre d’agriculture).
Le président du syndicat de l’abricot des Baronnies, Franck Bec, reste toutefois optimiste avec l’arrivée de l’IGP. © JMP
Un gel paralysant toute tentative de lutte
« On était prêt avec ce qu’il fallait mais lutter a été impossible », ont expliqué les arboriculteurs. C’est ce constat de grande frustration qui domine après ce cruel épisode de gel. La faute à la présence d’un vent soutenu soufflant à plus de 70 km/h, gênant considérablement l’allumage des chaufferettes et dispersant la maigre chaleur produite. La floraison retardée par les derniers froids a laissé des bourgeons floraux et leurs calices à la merci du gel. Les températures sont descendues à moins 2 °C, avec des ressentis dûs au vent de -4 à -5 °C. Et pour couronner le tout, la venue de la neige habituellement protectrice a fait le reste avec des gels d’évaporation dévastateurs.
Face à une situation qui se répète depuis cinq ans maintenant, le président du syndicat des producteurs d’abricots des Baronnies, Franck Bec, demande des aides financières pour aider les producteurs à continuer à produire l’abricot, mais aussi pour favoriser la diversification.
« De rapides remontées de froid »
Pour sa première visite, la mission d’enquête s’est rendue à Beauvoisin, au Gaec des Brunots. Bruno Blain et son fils Baptiste y cultivent 45 ha d’abricotiers. « Nos vergers situés plutôt en altitude à l’abri des gels de fond de vallée ont été touchés par de rapides remontées de froid, ont-ils expliqué. Le mistral nous a empêchés d’utiliser les moyens de lutte contre le gel. » Sur les 400 tonnes d’abricots récoltés habituellement, ils s’attendent à n’en ramasser que 80 à 100 tonnes cette année. à Buis-les-Baronnies, chez Serge Bonfils, l’exploitation la Grange au Bois est idéalement située à 600 m d’altitude, au pied d’une épaisse barre de falaises protectrices. « Depuis 42 ans, je n’avais pas vu de telles conditions climatiques réunies en même temps : vent, neige, températures basses et humidité ! Je n’ai pas pu utiliser l’aspersion à cause du vent violent », a confié l’arboriculteur qui annonce 90 % de perte sur son verger d’abricotiers s’étirant sur 14 ha. A Saint-Sauveur-Gouvernet, la commission d’enquête s’est arrêtée chez Samuel Corréard (EARL Rossignole). Située entre 600 et 750 mètres d’altitude, l’exploitation a depuis soixante ans rarement été victime du gel. Pourtant, dans la nuit du 1er au 2 avril, le vent fort en altitude et une ligne de gel remontée jusqu’à 650 m ont eu raison des 20 ha d’abricotiers. Là encore, il n’a pas été possible d’allumer les chaufferettes. Les pertes sont estimées à 95 %.
Le système d’aspersion était inopérant en raison de la violence du vent. © JMP
Arrêter alors que l’IGP est proche ?
C’est la sixième fois en six ans que la récolte d’abricots est partiellement perdue. De quoi décourager les arboriculteurs les plus courageux. Certains se posent la question sans tabou : « Faut-il arrêter l’abricot alors que cela reste la culture la plus adaptée au terroir ? » a déclaré Raphaël Corréard, producteur d’abricots à Plaisians. Nombreux sont les producteurs à le penser. Sur certaines parcelles, il est très difficile d’entamer une autre culture. Les poires et les prunes ont aussi gelé. Et la lavande est en difficulté avec des prix qui s’effondrent en raison de la trop forte production. Ce questionnement intervient alors que le dossier IGP de l’abricot des Baronnies a terminé son parcours national, la dernière étape étant celle de Bruxelles. Dans deux ans, l’abricot des Baronnies aura son indication géographique protégée, un label attendu par la profession et que le public de plus en plus attentif à la provenance et à la qualité devrait apprécier.