David Rivière : “ La filière allaitante est dans une bonne dynamique ”
Élu à la chambre d’agriculture de l’Isère et responsable de la filière élevage, David Rivière est à la tête d’un troupeau de charolais d’une centaine d’animaux, qu’il élève à Val de Virieu (Isère). Le point avec lui sur la conjoncture pour la filière.

Depuis vingt-six ans, David Rivière prend part au concours régional des éleveurs de charolais de la foire de Beaucroissant. Cette année, il va présenter six bêtes. « Participer à un concours, c’est avant tout présenter aux professionnels notre élevage et nos meilleurs reproducteurs. C’est une façon de se constituer une belle carte de visite, surtout si on arrive à décrocher un ou plusieurs prix. Mais c’est aussi une très belle manière de faire connaître au grand public notre métier, nos méthodes d’élevage, notre comportement avec nos bêtes. Ce concours-là, c’est la vitrine de l’élevage charolais de l’Isère, la première race allaitante du département », explique l’éleveur. Au cœur des préoccupations, le sujet qui devrait animer les discussions dans les allées de la foire est bien évidemment la sècheresse du printemps et de l’été. « Sur l’Isère, les agriculteurs ont produit un tiers de volume de foin en moins par rapport aux récoltes d’une année habituelle », détaille David Rivière. « Comme l’herbe ne pousse plus depuis de nombreuses semaines, les éleveurs ont déjà commencé à donner du fourrage à leurs bêtes. On a quelques inquiétudes pour la sortie de l’hiver 2023. À cette période, les stocks risquent d’être très faibles. »
Les alpagistes très affectés
La sécheresse qui sévit actuellement est aussi très inquiétante, de nombreuses sources étant taries, ce qui oblige les éleveurs à ramener le troupeau sur des parcelles où ils peuvent abreuver les bêtes grâce au réseau. « Notre inquiétude concerne particulièrement les alpages, qui manquent d’eau parce que les ruisseaux sont à sec », explique David Rivière. « Compte tenu de leur situation en altitude, les éleveurs ne peuvent pas monter les tonnes à eau pour les approvisionner. Les alpagistes vont être obligés de redescendre les animaux plus tôt que prévu, mais il n’y a pas eu de repousse donc les troupeaux ne trouveront pas d’herbe dans la plaine. » Conséquence de ces conditions climatiques extrêmes et du manque d’herbage, un certain nombre d’éleveurs vont décider de réduire la taille des troupeaux. « Compte tenu de la hausse des prix de l’alimentation pour le bétail, les éleveurs ne vont pas acheter des aliments pour engraisser les broutards, ils vont les vendre, plus légers et plus tôt que d’habitude », poursuit l’éleveur. « Heureusement, les cours se maintiennent à des niveaux que l’on peut encore qualifier de corrects. On s’en sort plutôt mieux qu’en 2019 où l’on cumulait des cours très bas et les conséquences, cette année-là aussi, de la sécheresse. »
Dix-mille animaux en moins
L’Isère n’est pas une exception dans le paysage français. Comme d’autres, le département doit faire face à un véritable problème de renouvellement des générations avec 50 % d’agriculteurs âgés de 50 ans ou plus. « Dans le département, sur les cinq dernières années, nous avons recensé dix-mille bovins en moins », explique David Rivière. « En étudiant les chiffres dans le détail, nous avons perdu onze-mille vaches laitières mais dans le même temps, nous en avons gagné mille allaitantes. Ces chiffres visent à démontrer que l’élevage laitier est en perte de vitesse, pour des raisons aussi diverses que des rythmes de travail très astreignants ou des exploitations souvent difficiles à transmettre en raison de leur coût élevé. En parallèle, l’élevage allaitant profite d’une dynamique positive. On observe la création de nombreux ateliers, souvent à partir d’anciens élevages laitiers où l’on a arrêté la production de lait pour s’orienter vers des vaches allaitantes. Il existe aussi des créations, à la faveur de reconversions professionnelles, avec des petits troupeaux destinés à la vente directe ou une production en complément par exemple. »
Magdeleine Barralon