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Essais

De l'innovation en lavande et lavandin

Pour lutter contre le dépérissement de la lavande et du lavandin, des techniques alternatives sont testées par la Chambre d'agriculture de la Drôme en parcelles de plein champ et avec la participation de producteurs.
De l'innovation en lavande et lavandin

Le 30 mars, la Chambre d'agriculture de la Drôme a organisé une journée « Bout de champ » sur le thème des techniques alternatives de lutte contre le dépérissement de la lavande et du lavandin. Placée sous le label « Innov'Action », cette rencontre a réuni dix producteurs et dix techniciens qui ont pu visiter des parcelles et assister à des démonstrations de matériels.

Essai « densité du couvert végétal »

La matinée a été consacrée à la visite de l'essai mis en place chez Ludovic Estran, producteur de lavande et lavandin sur près de 100 hectares (ha) en bio. L'essai, financé par FranceAgriMer, est en place sur une parcelle de lavande C15/50 plantée en décembre 2013 et dans laquelle un couvert végétal a été semé début septembre 2014 (40 % de ray-grass anglais gazonnant et 60 % de fétuque rouge gazonnante) à la dose de 30 kg/ha. Trois modalités sont comparées : témoin sol nu (inter-rangs intégralement binés) ; demi-enherbée (seul un côté des rangs de lavande est enherbé comme pratiqué en vigne) ; enherbée (les deux côtés des rangs de lavande sont enherbés).
L'objectif consiste à limiter les symptômes de dépérissement tout en minimisant la concurrence du couvert végétal pour la lavande. Plusieurs enseignements peuvent être tirés des résultats 2015. Le couvert végétal s'est très bien développé et il est très propre (très peu d'adventices). Son entretien est désormais aisé grâce à un broyeur auto-construit (voir encadré). Et, surtout , il y a moins de symptômes de dépérissement grâce au couvert végétal. Le pourcentage de plants morts ou symptomatiques est de 38,3 % dans le témoin, 28 % dans la modalité « demi-enherbée » et 24 % dans la modalité « enherbée ». A noter encore, le sol sèche moins vite quand il y a un couvert végétal comparé au témoin sol nu (résultats des sondes tensiométriques). Et il n'y a pas eu de concurrence pour la lavande dans la modalité « demi-enherbée » (- 1 % de rendement en huile essentielle comparé au témoin) alors qu'elle a été marquée dans la modalité « enherbée » (- 30 %). Ces résultats sont à nuancer par la sécheresse et la canicule du printemps 2015. Il est espéré que la concurrence s'atténue année après année du fait de l'évolution du couvert végétal (disparition du ray-grass au profit de la fétuque rouge, moins concurrentielle) et de l'enracinement de la lavande qui devrait devenir de plus en plus profond. L'essai sera suivi à nouveau tout au long de cette année.

Avec ce nouveau modèle, deux inter-rangs peuvent être broyés tout en travaillant trois rangs de lavande à l'aide d'une bineuse équipée de lames Bathelier. (Crédit photo : CA 26)

Double broyeur inter-rangs

Après un premier broyeur auto-construit, qui avait des problèmes de bourrage, Florian, le salarié de Ludovic Estran, a présenté un nouveau modèle, également auto-construit. Installé sur le pont avant du tracteur, il permet de broyer deux inter-rangs tout en travaillant trois rangs de lavande à l'aide d'une bineuse équipée de lames Bathelier. « Il aura coûté près de 3 700 euros HT (3 200 pour le broyeur plus 500 pour l'hydraulique) sans compter la ferraille ni le temps de travail, a-t-il été expliqué. Il fonctionne très bien désormais ». Florian l'utilise également dans d'autres parcelles, et s'en sert même pour broyer de l'enherbement inter-rangs spontané.

« Le lab des plantes à parfum »

L'après-midi, la journée s'est poursuivie chez Landry Faucon, producteur et pépiniériste de plants sains, installé depuis deux ans à Réauville. Une de ses parcelles de lavande est engagée dans le programme « Le lab des plantes à parfum », financé par FranceAgriMer. L'objectif est de promouvoir le tryptique plants sains certifiés + traitements à l'argile kaolinite + couvert végétal. En les combinant, ces techniques permettent de limiter les symptômes de dépérissement. L'essai est conduit sur deux parcelles vitrines (une à Réauville et une à Chamaloc) afin de montrer leur efficacité et de les diffuser auprès des lavandiculteurs.
Dans une lavanderaie plantée mi-février, Landry Faucon a réalisé une démonstration de passage de herse-étrille puis une démonstration de semis de couvert végétal (mélange 70 % de fétuque ovine, 20 % de fétuque rouge demi-traçante et 10 % de ray-grass anglais gazonnant), mélange qui s'est révélé très peu concurrentiel à l'Iteipmai(1) de Montboucher-sur-Jabron. La parcelle sera traitée à l'argile kaolinite début juin, avant le vol des cicadelles hyalesthes obsoletus.

Le semis de couvert végétal dans la lavanderaie. (Crédit photo : CA 26)

Evoquant les avantages de l'argile kaolinite, « les essais du Crieppam(2) et de la Fredon(3) Paca montrent une baisse des symptômes de dépérissement », a indiqué Patricia Blanc (AgriSynergie), avant de préciser les conditions de traitement des lavanderaies. « Il est nécessaire d'utiliser un pulvérisateur avec pompe à membrane (et pas à piston) et équipé de buses en céramique. L'utilisation d'un kit avec buses orientables permet d'améliorer l'efficacité de l'argile. Il faut bien rincer le pulvérisateur ensuite. D'autre part, l'argile ne gêne pas la photosynthèse et a même un effet protecteur en limitant l'impact nocif des UV sur la plante ». Le premier traitement est à réaliser avant le début du vol des cicadelles (de début à fin juin selon l'altitude). Puis il faut renouveler l'application selon les pluies et la pousse des plants. Les doses à appliquer sont les suivantes :
- parcelles de l'année : premier traitement à 15 kg/ha sur le rang, puis 12 kg/ha ;
- parcelle d'un an et de deux ans : premier traitement à 30 kg/ha sur le rang, puis 12 kg/ha.

Cédric Yvin

(1) Iteipmai : Institut technique interprofessionnel des plantes à parfum, aromatiques et médicinales.
(2) Crieppam : Centre régionalisé interprofessionnel d'expérimentation en plantes à parfum, aromatiques et médicinales.
(3) Fredon : Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles.

 

Projet /

Constitution de deux groupes de producteurs

La Chambre d'agriculture de la Drôme souhaite constituer et animer deux groupes de lavandiculteurs intéressés par les couverts végétaux inter-rangs : un sur le Nord-Drôme (Diois - Vallée de la Drôme) et un autre sur le Sud-Drôme (Vallée du Rhône - Tricastin). Les objectifs sont les suivants :
- favoriser le partage d'expériences sur les couverts végétaux ;
- placer les producteurs au cœur de l'innovation (démarche « Bottom'up ») ;
- évaluer les points à travailler (itinéraire cultural, matériel) et tester des solutions ;
- disposer de références locales ;
- tenir les producteurs au courant des derniers résultats obtenus.
Une réunion sera organisée en fin d'année dans chacun de ces deux secteurs. Si vous êtes intéressé pour faire partie d'un groupe, contactez de suite Cédric Yvin (tél : 06 27 61 31 55 - mail : [email protected]).

 

A noter /

Prochain rendez-vous le 27 mai

Le prochain « bout de champ » Ppam est prévu le vendredi 27 mai à la ferme expérimentale Ardema à Mévouillon. Les essais en lavande, lavandin ainsi qu'en fourrages multi-espèces adaptés à la montagne sèche seront présentés.Pour plus de renseignements, contactez vos conseillers Ppam : Cédric Yvin (tél : 06 27 61 31 55) ou Pierre-Yves Mathonnet (tél : 06 20 88 81 06). Pour les fourrages : Jean-Pierre Manteaux (tél : 06 22 42 53 88).