De nouvelles pédagogies pour valoriser toutes les compétences

«Nous devons adapter nos méthodes pédagogiques à nos élèves », confie Jean-Yves Charvin, proviseur de l'établissement d'enseignement agricole des Sardières à Bourg-en-Bresse (Ain). « Nos apprenants ont changé. Ce sont des jeunes qui possèdent des compétences, mais ils zappent constamment, ils ont une attitude de consommateurs et sont dans l'immédiateté. Il faut donc les confronter à de nouvelles démarches qui suscitent leur curiosité. »
Procéder par projets interdisciplinaires
Depuis deux ans, l'établissement met en place l'évaluation par compétences. Elle est actuellement appliquée dans une classe de Bac pro et concernera prochainement des BTS. Il s'agit de résoudre une problématique en faisant jouer l'interdisciplinarité. « Pour la classe de Bac pro laboratoire contrôle qualité, nous avons monté, sur deux ans, le projet Essentia. On travaille avec le centre de documentation et tous les enseignants qui se sentent concernés ainsi que l'exploitation agricole du lycée », explique Laurie Watterlot, professeur de microbiologie. « Les élèves doivent résoudre la problématique suivante : trouver des huiles essentielles qui peuvent, en remplacement des antibiotiques, traiter la mammite chez la vache. Pour cela, il faut identifier les plantes, procéder à l'extraction des essences, les tester, créer l'entreprise fictive chargée de les commercialiser ». Dans ce contexte, l'enseignant est là pour donner une trajectoire, pour encadrer. Les professeurs reconnaissent que, grâce à ces méthodes, les élèves manifestent une véritable adhésion. « Ils se sentent acteurs avec un but concret qui a du sens, ils sont responsables et motivés. On raisonne de plus en plus par projet et beaucoup moins par classe.
Il y a un vrai décloisonnement », explique Julien Plaisse, professeur de biologie et d'écologie. « Avec une classe de bac technologique STAV (sciences et technologies de l'agronomie et du vivant), nous travaillons avec l'enseignant de philosophie sur de grands sujets sociétaux que l'on traite par le biais de la philosophie comme celui de la biologie, de l'agronomie... Les élèves travaillent en groupe, découvrent des auteurs philosophiques, des textes scientifiques, ce qui leur permet d'élaborer leur propre argumentation. »
Classe puzzle,classe inversée
Bien d'autres méthodes sont appliquées pour permettre à l'élève de prendre conscience de ses compétences. Dans la classe puzzle, les élèves travaillent en groupe. À l'intérieur des unités, chaque élève doit étudier et comprendre une partie du cours. Ensuite, on regroupe les élèves, selon les parties du cours qu'ils ont eu à aborder. Ensemble, ils approfondissent leur travail. Puis, ils réintègrent leur groupe de départ, pour expliquer aux autres ce qu'ils ont appris. En s'exprimant devant leurs camarades, ils prennent alors conscience, si oui ou non ils ont assimilé la leçon. « Bien sûr, tous les cours ne s'y prêtent pas, mais c'est possible pour la statistique par exemple », explique Valérie Rouger, professeur de mathématiques.
« Je constate plus d'implication de la part des élèves, dans ces cours-là, je les entends parler mathématiques. »
Les professeurs s'accordent à dire qu'il faut varier les outils, les méthodes, pour que les élèves soient sans cesse interpellés, qu'ils s'intéressent plus. C'est aussi un moyen de cultiver leurs capacités d'adaptation en les surprenant, en les dérangeant dans leur « routine ». « Pour ma part, je teste souvent la classe inversée », explique Julien Plaisse.
Il s'agit de demander à un élève de préparer, à la maison, le travail qui doit être fait en classe le lendemain. Sous la forme de séances adaptées, on va lui faire découvrir les approches théoriques et on va ensuite profiter du temps de classe pour cibler ce qu'il a compris ou non, voir où il en est. Ce sont des pédagogies actives misent en place par l'inspection. »
Magdeleine Barralon
Caroline Ribotti, proviseure : « apprendre à apprendre »
« Au collège, à questions simples, on attend des réponses simples. Au lycée, les questions sont plus difficiles et demandent des réponses élaborées », explique Carine Ribotti, proviseure adjointe. « Pour permettre de bien négocier ce passage, on fait appel à une intervenante extérieure qui dispense aux classes de seconde générale et technologique deux heures d’accompagnement personnalisé. Par petit groupe, elle leur indique des techniques pour apprendre. Ensuite, avec l’aide de l’enseignant, celles-ci sont appliquées à un cours ou à un devoir particulier. »