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Expérimentation

Des couverts végétaux et matériels de semis testés

Activer les atouts agronomiques des couverts végétaux, quelles possibilités en Drôme ? C'est le thème d'un essai conduit par la chambre d'agriculture dans le cadre d'un partenariat avec la CNR.
Des couverts végétaux et matériels de semis testés

Dans le cadre d'un partenariat avec la Compagnie nationale du Rhône (CNR), la chambre d'agriculture de la Drôme a accompagné des agriculteurs dans leur réflexion sur les couverts végétaux. Plusieurs de ses conseillers ont été associés à la démarche, dont Anne Court, spécialisée en grandes cultures, et Marie-Pascale Couronne, en agronomie-environnement.
« La CNR s'est associée aux chambres d'agriculture pour soutenir une agriculture durable conjuguant la performance économique et le respect de l'environnement, explique Anne Court. Elle a souhaité la mise en place de dispositifs d'innovation et de démonstration sur du foncier agricole proches de son domaine concédé (au bord du Rhône) et confié le pilotage à la chambre d'agriculture de la Drôme. »
Une première réunion sur cette thématique a rassemblé un groupe de huit agriculteurs, qui ont défini leurs objectifs : tester des matériels de semis en vue de trouver le meilleur compromis d'efficacité et de coûts en termes d'implantation dans la Drôme. Pour conduire cette expérimentation, une plateforme « atouts agronomiques des couverts » a été mise en place l'été 2018 à Etoile-sur-Rhône dans une parcelle cultivée par Olivier Courtial, qui exploite des surfaces du domaine concédé de la CNR. Le sol est de type limons argileux profonds et le précédent un blé dur.

Conseillères à la chambre d'agriculture de la Drôme, Anne Court est spécialisée en grandes cultures et Marie-Pascale Couronne en agronomie-environnement.

Deux types de couverts

Sur cette plateforme, deux types de couverts végétaux ont été semés. L'un est un mélange d'avoine de ferme (30 kg/ha) et de vesce commune (10 kg). L'autre est le Chlorofiltre mix, du semencier Jouffray-Drillaud, composé d'avoine rude (18 kg), de vesce de printemps (3 kg), de trèfle d'Alexandrie (2 kg), de radis asiatique (1 kg) et de phacélie (1 kg). Dans l'essai, ce mélange a été renforcé avec 5 kg de phacélie de ferme. « Les couverts végétaux contenant cinq ou six espèces sécurisent la production d'un minimum de biomasse, fait observer Anne Court. Car elles s'expriment différemment selon la météo de l'année, au cours d'une même année avec la succession d'espèces, en fonction du type de sol ou de la quantité d'azote disponible. Et nous avons aussi testé des semences de ferme car, lorsque les agriculteurs en ont la possibilité, c'est un moyen de réduire le coût du couvert. Elles sont intéressantes pour certaines graines chères comme la vesce et la phacélie. »

Quatre matériels de semis

Semis à la volée avec un épandeur à engrais.
 Semoir sur déchaumeur avec rouleau à l'arrière.

Et quatre matériels de semis ont été testés. Le premier est un épandeur à engrais détourné en semoir à grains (qui a nécessité trois passages : pour le déchaumage, le semis et le roulage). Le deuxième un semoir monté sur déchaumeur avec rouleau (un seul passage). Les deux autres sont des matériels de semis direct (un seul passage, donc) : un semoir à disques (Bertini) prêté par la Cuma de Chomérac, l'autre à dents (Amazon Primera). « Avec les deux derniers, nous voulions voir comment sont positionnées les graines en conditions sèches », indique Anne Court. L'efficacité (vitesse de chantier) et la qualité de semis (positionnement de la graine dans le sol) de ces quatre matériels ont été vérifiées.

Semis direct avec un semoir à dents. Semis direct avec un semoir à disques.

Résultats

Les couverts ont été semés fin août dans le sec et n'ont reçu aucune goutte d'eau jusqu'au 6 octobre. La levée a attendu la pluie. Par conséquent, elle a été très tardive. Les couverts ont donc donné peu de biomasse et leur capacité de fixation de l'azote du sol a été réduite. En moyenne à l'hectare, seulement une tonne de matière sèche a été obtenue et 12 kilos d'azote ont été fixés. Autre constat : cette campagne, le couvert ayant produit le plus de biomasse est celui semé avec le semoir à engrais. Il aurait été intéressant de laisser pousser ces couverts jusqu'au printemps pour récupérer de la biomasse. Mais, en sol argileux, le labour est à réaliser tôt. « Nous nous sommes interrogés sur l'intérêt de les irriguer, signale Anne Court. Cependant, comme la maîtrise des coûts était un objectif, nous ne les avons pas arrosés. »

Enseignements

Premiers enseignements ressortant de cet essai : « La question des semis avant le 15 août se pose, avec le risque qu'ils lèvent puis meurent, relève Anne Court. C'est à mettre dans la balance du compromis. En 2018, semer mi-août aurait été un bon choix. Et irriguer en période sèche permet au couvert de mieux exprimer son potentiel ». Sur les différents matériels testés, la conseillère ajoute : « Le couvert n'ayant pas poussé, il est difficile de tirer des conclusions. Ils ont, chacun, des avantages et des inconvénients. Détourner un épandeur à engrais permet d'utiliser du matériel déjà présent sur l'exploitation et de faire des chantiers de semis rapides. Les trois outils en un passage, c'est un investissement dans du matériel spécifique mais tout est fait en une seule fois. Les matériels de semis direct permettent des débits de chantier élevés sans travail du sol. C'est aux agriculteurs de choisir ».
Anne Court souligne encore : « Un couvert est un investissement à long terme, avec des bénéfices sur la culture suivante mais aussi dans la durée ». Ses effets positifs : de l'azote fixé puis restitué, une vie du sol améliorée, du carbone remis dans le sol, une reprise facilitée par le travail des racines du couvert...

Annie Laurie
Site d'essai / Une rencontre de terrain a eu lieu fin janvier sur la plateforme CNR « atouts agronomiques des couverts végétaux », à Etoile-sur-Rhône.
Visite de la plateforme et tests « bêche »
Le test « bêche » est une méthode d’évaluation rapide de la structure et de la qualité d’un sol.
Le 25 janvier, la chambre d'agriculture de la Drôme a organisé une visite de la plateforme CNR « atouts agronomique des couverts » à Etoile-sur-Rhône. En ouverture, Guenaëlle Corbin, chef de projet à la CNR (au sein du département pilotage stratégique et missions d'intérêt général), a affirmé la volonté de la CNR de s'impliquer pour « donner un coup de pouce » aux agriculteurs en s'appuyant sur les compétences techniques de la chambre d'agriculture. Et elle a espéré une poursuite de ce partenariat, sur les couverts ou d'autres sujets. Anne Court, conseillère à la chambre d'agriculture, a présenté le dispositif. Et sa collègue Marie-Pascale Couronne a pratiqué un test « bêche » sur deux placettes (de 20 cm de long, de large et de profond). Une dans la modalité « un seul passage avec travail du sol ». L'autre dans la modalité « semis direct avec un semoir à disques Bertini ». Le test « bêche » est une méthode d'évaluation rapide de la structure et de la qualité d'un sol.
Commentaires
Marie-Pascale Couronne a ainsi commenté la première placette : un bon développement racinaire, une colonisation du sol par les racines de phacélie bien visible, la présence de vers de terre, peu de zones compactées, une structure favorable. Dans la seconde placette, elle a constaté une racine coudée sur un radis chinois, signe de la présence d'un obstacle, peut-être d'un tassement du sol. A vérifier. Ont aussi été observées des mottes plus compactes et une très forte activité des vers de terre anéciques et endogés. Il en a été compté quatre dans la première placette et onze dans la deuxième.
Marie-Pascale Couronne a, en outre, décrit les atouts des espèces composant ces couverts et signalé que la chambre d'agriculture de la Drôme avait rédigé un guide sur les couverts végétaux.
A. L.

 

Guide /
La mise en place des couverts végétaux
La chambre d'agriculture de la Drôme a rédigé un guide intitulé « Activer les atouts agronomiques des couverts végétaux » (avec le soutien de la CNR à travers ses missions d'intérêt général). Ce document récapitule les grands principes de la mise en place des couverts végétaux. Voici un résumé des étapes :
- Définir ses objectifs : protéger le sol, récupérer de l'azote, lutter contre les adventices...
- Evaluer ses contraintes : durée de l'interculture, labour d'hiver ou non, culture suivante, exigences réglementaires avec dates...
- Soigner l'implantation du couvert : préparer le terrain, semer ni trop tôt ni trop tard, dans une parcelle propre, apporter une attention particulière au semis (entre autres, ne pas trop réduire les doses).
- Soigner la conduite : pour bien exprimer son potentiel, un couvert doit être mené comme une culture.
- Anticiper la destruction : date, technique (broyage, roulage, déchaumage, labour, action du gel).
A la fin du guide, un tableau donne les informations suivantes pour 32 espèces végétales utilisées en couverts végétaux : périodes de semis, dose, exigences de semis, efficacité en termes de piégeage des nitrates, structuration du sol, restitution d'azote à la culture suivante, concurrence vis-à-vis des adventices à l'installation, sensibilité au gel, facilité de destruction, coût des semences.
Ce guide est consultable sur le site internet de la chambre d'agriculture (www.drome.chambre-agriculture.fr) dans la rubrique « Cultures » puis la sous-rubrique « Couverts végétaux ».