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Maraîchage

Des légumes pour l’alimentation « baby food »

Installé sur les hauteurs de Charmes-sur-Rhône, Alain Mounier a opté pour un débouché peu connu : l’alimentation pour bébés ou « baby food ».
Des légumes pour l’alimentation « baby food »

Exclure les pesticides, bannir les nitrites... Faire des légumes pour l'alimentation infantile (baby food) restreint le champ des possibles. Cependant, avec 25 années d'expérience derrière lui, le cahier des charges de l'alimentation des nourrissons(1) n'a plus de secret pour Alain Mounier. Ce fils d'arboriculteur n'avait pourtant pas vocation à faire de l'agriculture son métier. Mais il en a finalement pris le pas en 1994, après plusieurs années dans le secteur de l'automatisme. « Au cours de mon premier métier d'automaticien, j'ai été amené à travailler sur des machines et procédés pour faire des légumes déshydratés, en pulpe ou encore en cubes, dans des entreprises qui faisaient de la baby food. Une fois installé sur l'exploitation arboricole familiale, j'ai voulu diversifier la production en me tournant vers le maraîchage à destination de ce débouché particulier. » Sur ses 70 hectares (ha) de surface, 25 sont consacrés à la production de légumes. Il a conservé 15 ha de vergers, quelques parcelles de céréales à paille ainsi que 3 ha d'oliviers tout récemment plantés.
Aujourd'hui, Alain Mounier livre courgettes, aubergines et courges butternut à un fournisseur régional de l'enseigne Blédina, numéro un de l'alimentation infantile en France. « Je travaille sous contrat, ce qui confère l'avantage de connaître les prix à l'avance. Au fil des ans, nous avons développé une vraie relation de confiance avec mon client, explique-t-il. Cette année, je dois produire 750 tonnes de légumes sous contrat. J'aimerais pouvoir en faire davantage, développer des cultures de printemps comme le chou mais je n'ai pas suffisamment de terres adaptées pour le maraîchage. »

L’EARL Mounier emploie une vingtaine de saisonniers, dont 8 à 12 spécifiquement dédiés au maraîchage. « Tous les légumes sont ramassés à la main, à l’aide d’une remorque fruitière : de chaque côté de la remorque sont positionnés trois ou quatre ramasseurs et un porteur », détaille Alain Mounier.

Un cahier des charges contraignant

Garanties « sans résidus de pesticides »(2), toutes les recettes pour bébés de Blédina sont confectionnées à base d'ingrédients cultivés selon des règles strictes : calendrier de traitement, contrôle des taux de métaux lourds et des taux de résidus de pesticides avant récolte sur chaque parcelle (plus de 400 paramètres recherchés en laboratoire)...
« Le plus contraignant, pour la courgette notamment, reste le taux de nitrates qui doit être inférieur à 600 ppm(3)/kg, estime Alain Mounier. Cela induit obligatoirement des rendements plus modestes. En aubergine, c'est la lutte contre le doryphore au printemps et contre le mildiou qui peut poser problème au moment de la récolte sans l'usage de pesticides. »
« L'alimentation des enfants de zéro à trois ans est encadrée par une réglementation européenne très stricte vis-à-vis des additifs (conservateurs, colorants, édulcorants, arômes), des résidus de pesticides ou encore de la teneur en nitrates, explique Pierre-Antoine Morel, responsable des achats pour le bio chez Blédina. Les aliments destinés à nos recettes répondent à des normes bien plus strictes que la nourriture pour adulte. Par ailleurs, nous procédons à plus de 300 contrôles et analyses par lot de produits finis. »
Un travail du sol important
Pour faire face à ces contraintes, le maraîcher réalise des assolements : « aubergine en année 1, courgette en année 2 et de nouveau courgette ou courge en année 3. L'idéal serait de pouvoir faire des rotations triennales aubergine/cucurbitacée/céréale mais je n'ai pas les surfaces maraîchères suffisantes pour cela. C'est aussi ce qui me freine pour passer en bio », explique Alain Mounier. Par ailleurs, il sème des engrais verts entre deux cultures pour structurer les sols. « Une fois la culture installée, je n'utilise aucun désherbant chimique, tout est biné au tracteur ou à la main au moyen d'une bineuse traditionnelle. Cela prend beaucoup de temps : 10 heures pour 6 ha, et sans traîner ! » Pour favoriser la vie des sols, il utilise également le fertilisant bio « Bactériosol ».

Le changement climatique interroge

Depuis quelques années, Alain Mounier ressent dans ses parcelles de légumes les effets du changement climatique. « Les printemps froids nous obligent à semer plus tard : le 22 mai en 2019 pour les courgettes contre le 23 avril il y a une dizaine d'années encore ! D'autre part, les sécheresses récurrentes accroissent les besoins d'irrigation », explique-t-il.
Plante méditerranéenne, l'aubergine supporte facilement les fortes chaleurs. C'est beaucoup moins le cas pour les cucurbitacées : « Au-delà des 35 °C, les fleurs avortent et on peut avoir des pertes importantes, indique-t-il encore. Cette année, le feuillage assez dense a permis de protéger un peu de la chaleur et nous n'avons pas eu de soucis mais cela pose question pour l'avenir. »
Mylène Coste
(1) Pour bébés entre 0 et 3 ans.
(2) Taux inférieurs à 0,000001 % conformément aux règles de l'alimentation infantile.
(3) ppm : partie par million.

 

Zoom sur / Marque du groupe Danone vieille de 110 ans, Blédina est aujourd’hui le leader de l’alimentation infantile en France devant son concurrent Nestlé.

Blédina France : la qualité comme crédo

En France, l’enseigne représente 1 400 collaborateurs et trois sites de production : Brive (19) pour les produits à base de viande, de fruits, de légumes et de poisson, Villefranche-sur-Saône (69) pour les céréales et Steenvoorde (59) pour les laits infantiles. Son siège social est situé à Limonest, dans le Rhône.Cap sur le bioPour garder son statut de leader du marché français, Blédina entend innover et diversifier ses produits, en misant toujours sur la qualité. « Nous avons lancé en 2018 la gamme “Les Récoltes Bio”, aujourd’hui troisième acteur du marché baby food bio avec 16 % de parts de marché, développe Pierre-Antoine Morel, responsable des achats pour le bio chez Blédina. Cette gamme est le premier contributeur à la croissance et ambitionne de devenir le leader sur le marché d’ici 2020, avec un approvisionnement à 80 % français. » Il poursuit : « Face à une demande croissante des parents, il est nécessaire d’accompagner les agriculteurs français dans leur conversion à la bio. Cela passe par des programmes de formation et de financement, par exemple via l’opération “1 € donné par un citoyen, 1 € donné par Blédina” sur la plateforme de financement participatif Miimosa. Près de 60 000 € ont ainsi été récoltés, permettant en 2019 à six agriculteurs d’obtenir des financements à travers Miimosa. »