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Viticulture

Des Rencontres rhodaniennes pour apprendre, comprendre et déguster

Trois ateliers sur le changement climatique, le dépérissement du vignoble et la réduction des intrants ; des démonstrations de matériels viticoles et œnologiques… C’est le programme que proposait les 18e Rencontres rhodaniennes, le 5 avril dernier à Orange.
Des Rencontres rhodaniennes  pour apprendre, comprendre et déguster

Belle réussite pour les organisateurs - l'Institut rhodanien et le lycée viticole d'Orange, en partenariat avec l'Inra, les chambres d'agriculture, le syndicat des vignerons des Côtes-du-Rhône et l'Institut français de la vigne et du vin -, puisque la 18e édition des Rencontres rhodaniennes a accueilli plus de 200 vignerons à Orange. Le colloque scientifique a permis de faire le point sur trois thématiques d'actualité : le changement climatique, le dépérissement du vignoble et la réduction des intrants. En préambule, les participants ont été accueillis par Pascal Buron, directeur du lycée d'Orange, et Philippe Pellaton, président du syndicat des Côtes-du-Rhône. « Nous avons aujourd'hui une journée chargée de sens car les enjeux évoqués sont nombreux et vitaux, a souligné ce dernier. Il y a dix ans, nous n'avions qu'à nous concentrer sur l'économie de nos entreprises, mises à mal par les crises de 2002 et 2003. On s'est donné les moyens de dépasser ces difficultés avec un plan stratégique, une modification de nos cahiers des charges en lien avec l'Inao, mais aussi avec de nouvelles règles de contrôle, un travail sur notre image... Bref, on a su créer de la valeur et on a réussi. Aujourd'hui, nous devons être acteurs sur plusieurs fronts en même temps », soulignait-il.

« Nous avons aujourd’hui une journée chargée de sens car les enjeux évoqués sont nombreux et vitaux », expliquait Philippe Pellaton, président du syndicat des Côtes-du-Rhône, en ouvrant la conférence plénière.

De nouveaux fronts

A commencer par le climat, avec une récurrence des aléas qui reviennent en moyenne tous les quatre ans. « Souvenons-nous de 2008, 2013 et, bien sûr, de 2017, avec des impacts majeurs et massifs sur nos résultats de production », a rappelé Philippe Pellaton.
Les problèmes techniques ensuite, avec l'évolution des pratiques culturales, l'utilisation réduite des produits phytosanitaires et la montée en puissance des outils de biocontrôle. « Ces choix s'entendent avec notre capacité à évoluer au niveau réglementaire. La seule bonne réponse pour certain est le bio, ce qui pose d'autres questions. Mais demain, nous pourrions avoir 50 % d'exploitations certifiées si le cadre réglementaire évoluait et nous permettait de passer une partie de nos surfaces en bio, et pas l'intégralité comme aujourd'hui. C'est possible, nos marchés étant déjà segmentés, il faut juste lever cette contrainte réglementaire pour nous permettre d'aller plus vite », notait le président.

Joël Durand, président de l’Institut rhodanien : « Si nous sommes informés, formés, avertis, nous serons forcément meilleurs face aux défis qui nous attendent ».
Enfin, les attentes sociétales sont fortes et de plus en plus prégnantes. « Nous y répondons, à l'image des démarches RSE(1) que nous mettons en place, des stratégies qui permettent de réduire nos IFT(2). »
Pour Philippe Pellaton, il faut, dans cette décennie qui s'ouvre, avoir la même attitude que celle mise en place il y a dix ans. « Sur l'économie et la reconquête de valeur, nous avons su être proactifs, soulignait-il. Nous devons nous mettre dans le même état d'esprit et ne pas nier ces attentes environnementales fortes ; nous devons être moteurs et acteurs afin de ne pas aller dans une direction non voulue. La seule différence est sans doute le pas de temps dans lequel nous devons le faire : il sera forcément plus court car la société évolue toujours plus vite. »

Climat : ça chauffe !

Iñaki Garcia de Cortazar-Atauri, chercheur à l’Inra d’Avignon. ©C.Zambujo

Iñaki Garcia de Cortazar-Atauri, de l'Inra, et Viviane Becart, du syndicat des Côtes-du-Rhône, ont ensuite abordé la délicate question du changement climatique. Le chercheur de l'Inra a présenté les résultats du projet Laccave (2012-2016), dans lequel sont proposées plusieurs voies d'adaptation techniques, avant d'annoncer qu'un second programme Laccave venait d'être adopté. De son côté, Viviane Becart a rappelé ce qui pouvait se faire à court terme, et en pratique, pour lutter contre le réchauffement. « La vigne transpire en moyenne entre 20 et 25 litres d'eau par jour. Des apports d'eau réguliers et quotidiens, en périodes sèches, sont conseillés, dans les plages autorisées. L'objectif est d'éviter que la vigne ne soit trop stressée entre la nouaison et la fermeture, pour ne pas impacter la phase de grossissement des baies. Pour les AOP de notre région, cela revient à apporter de un à deux millimètres d'eau par jour et on peut désormais le faire dès le 1er mai, au lieu du 15 juin, la réglementation venant de changer, rappelait la spécialiste du syndicat en présentant des résultats d'essais menés par les chambres d'agriculture. L'irrigation est un moyen de sauver une vigne et d'assurer sa pérennité. Mais nous savons qu'il n'y a pas de proportionnalité entre le rendement et la dose apportée. Cependant, l'irrigation a presque toujours un effet sur le rendement, avec un gain de maturité car les témoins non irrigués sont souvent en blocage de maturation en année sèche. »
L'autre voie est aussi de choisir des cépages tolérants à la sécheresse, en n'oubliant pas que ces derniers ont un comportement particulier, comme la syrah qui perd ses feuilles en conditions stressantes.

Le dépérissement est multifactoriel

Dans le second atelier, Marion Claverie, de l'IFV3, et Olivier Jacquet, de la chambre d'agriculture de Vaucluse, se sont penchés sur le dépérissement de la vigne, faisant écho des nouvelles recherches en cours. « Le dépérissement est complexe et multifactoriel, rappelait Marion Claverie. Il faut donc l'aborder sous plusieurs angles d'attaques car le dépérissement, c'est de la mortalité de ceps et des bas rendements, ce qui signifie moins de structures de production et des baisses de rendement. Les solutions doivent donc porter sur la gestion des manquants, la charge en bourgeons, la gestion du court-noué et des maladies du bois, les stress et autres carences... 72 facteurs ont été inventoriés dans le cadre du plan dépérissement », rappelait la spécialiste de l'IFV. 
Céline Zambujo
(1) RSE : responsabilité sociétale des entreprises.
(2) IFT : indice de fréquence des traitements.
(3) IFV : Institut français de la vigne et du vin.