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Réseau Agrifaune

Dix ans de partenariat entre agriculteurs et chasseurs

Une réunion interrégionale des acteurs du réseau Agrifaune a dernièrement été organisée à Saint-Marcel-en-Dombes dans l’Ain. Il s’agissait de marquer les dix ans d’existence du réseau qui porte des actions en faveur de la biodiversité tout en conciliant économie et agronomie.
Dix ans de partenariat  entre agriculteurs et chasseurs

Depuis dix ans, les chambres d'agriculture, les fédérations de chasseurs, les fédérations de syndicats d'exploitants agricoles et l'office national de la chasse et de la faune sauvage collaborent activement dans le cadre du programme national Agrifaune pour favoriser la biodiversité agricole tout en préservant les performances techniques et économiques des exploitations. Des actions sont conduites dans 73 départements, 200 ingénieurs et techniciens sont mobilisés sur des programmes représentant deux millions d'euros d'investissements pour les partenaires.

Renouvellement pour cinq ans

Les acteurs du réseau Agrifaune lors de la rencontre régionale

A l'occasion du renouvellement pour cinq ans du partenariat Agrifaune, acté le 26 mai dernier, le comité de pilotage a décidé d'organiser des rencontres entre élus du réseau Agrifaune. Pour les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne-Franche-Comté, cette rencontre s'est déroulée le 18 octobre à Saint-Marcel-en-Dombes dans l'Ain. Pour l'occasion, de nombreux acteurs agricoles et cynégétiques étaient présents en territoire dombiste, et notamment Eric Thirouin, responsable de la commission environnement de la FNSEA. Ils ont été tous accueillis par le local de l'étape, membre du comité national, le président de la chambre d'agriculture, Gilbert Limandas. Il a relevé l'importance accordée au réseau : « Cela traduit la volonté des agriculteurs, propriétaires, chasseurs et environnementalistes d'agir ensemble en proximité pour le bien commun. » Eric Thirouin a mentionné que « la difficulté d'aujourd'hui, c'est que l'on ne touche à plus rien, ici on essaye de gérer la nature en partenariat, c'est un bel exemple à suivre. » Pour Jacky Desbrosse, chasseur Marnais et secrétaire général de la fédération nationale des chasseurs, « nous sommes à la croisée des chemins. Agrifaune est une belle caisse à outils, bien remplie mais, face aux difficultés rencontrées, on est encore un peu timide. Il faut appuyer sur le champignon et développer plus intensément nos travaux ». Le représentant de Jeunes agriculteurs a affiché sa satisfaction : « le renouvellement pour cinq ans de la convention est un signal positif pour ce dispositif qui a atteint son âge de raison. » Et Joanny Griffon, président de la fédération des chasseurs de l'Ain se félicitait du travail réalisé dans le département : « Nous sommes toujours prêts à l'améliorer et, toujours partie prenante, nos remerciements aux agriculteurs ».

Des expériences multiples et variées

La matinée a été consacrée au retour d'expériences multiples et variées initiés dans différents départements. Dans le beaujolais, depuis 2004, les réductions de densité dans le vignoble ont amené les viticulteurs à réfléchir à la façon de concilier le maintien de l'érosion des sols et l'intérêt faunistique. Un site pilote installé sur la commune de Brouilly a permis de conduire une expérimentation visant des actions alternatives à l'utilisation des insecticides, d'élaborer des mélanges adaptés au contexte viticole. « L'objectif recherché est de faire évoluer les pratiques, le dispositif a permis de recueillir des références », a souligné Andrée Pages, technicienne de la chambre d'agriculture. Dans le Doubs, Régis Renard, de la fédération des chasseurs a rappelé que, dans son département, les prairies d'altitude étaient totalement ravagées par les dégâts de campagnols, d'où une perte de la biodiversité. L'expérimentation conduite a consisté à installer des parcelles de céréales pour enrayer le processus. Ces îlots de quiétude, sans produits phytosanitaires, ont eu des effets bénéfiques pour la faune sauvage et ont contribué à contenir le cycle de développement du campagnol. Autre exemple venant de Saône-et-Loire, présenté par Thierry Berton, technicien de la FDC : « Pour nous, il s'agissait d'éviter l'érosion du bocage et de lutter contre l'arrachage des haies préjudiciables à la faune sauvage. » Au travers de la démarche, l'intérêt partagé pour les agriculteurs et chasseurs a été démontré. Cela s'est traduit par la mise en place d'une filière de valorisation du bois transformé en plaquette déchiquetée, en lien avec la coopérative Bourgogne du Sud et les collectivités locales. À ce stade, 900 mètres cubes de plaquettes ont été valorisés, l'objectif est de tripler les volumes d'ici à deux ans.

Tétras-lyre et couverts végétaux

Pour Pascal Roche, de la société des alpagistes de Haute-Savoie, il s'agissait de concilier la préservation du tétras-lyre, espèce protégée et l'activité pastorale. À l'origine, dans les alpages, des zones de défense ont été mises en œuvre, pas toujours favorables, voire contraignantes pour la pratique pastorale. Au travers de l'expérimentation, en lien avec les différents acteurs, une sensibilisation a été réalisée pour prendre en compte les habitats. Cinquante-sept mille hectares ont été diagnostiqués sur 173 unités pastorales, 200 hectares ont pu être ré-ouverts au passage des troupeaux selon un protocole établi intégrant des pratiques nouvelles.
Cette présentation s'est achevée par l'expérimentation conduite dans l'Ain autour des couverts végétaux en intercultures. Laurence Garnier, chargée de mission à la chambre d'agriculture, a rappelé que leur mise en place a permis « d'aller au-delà de la contrainte réglementaire et d'apporter des éléments techniques et économiques aux agriculteurs dans différents contextes pédologiques. » Laurent Gigout, directeur de la fédération des chasseurs de l'Ain, a souligné que « depuis 1996, date des premiers couverts, Agrifaune nous a permis d'aller plus loin, nous avons fait du chemin. Le futur contrat de territoire en Dombes nous permettra aussi d'avancer. » En 2016, 151 sociétés de chasse sont engagées sur 1 600 hectares de couverts Agrifaune implantés chez 412 agriculteurs. Une action conduite en lien avec la coopérative des Trois régions et les Établissements Bernard qui a permis de proposer plusieurs mélanges. Aujourd'hui, les acteurs affichent une volonté d'aller plus loin, de vulgariser cette pratique de couverts végétaux en argumentant sur l'amélioration de la structure des sols qui n'est plus toujours assurée avec l'abandon des élevages et de la fumure animale. La journée s'est poursuivie avec une visite de la plateforme de couverts végétaux d'intercultures.
Proximité de terrain, pragmatisme, prise en compte des enjeux de la production agricole et de l'économie des exploitations, richesse des échanges entre le monde cynégétique et le monde agricole, rassemblement de la ruralité... sont autant d'éléments qui expliquent le succès du programme Agrifaune. n
G. M.