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Pêche et abricot

Echanges de visions autour des marchés et stratégies

Aux Rendez-vous de l'arbo en Rhône-Alpes, dernièrement à Valence, une table ronde était dédiée aux marchés et stratégies.
Echanges de visions autour des marchés et stratégies

L'idée de la table ronde des Rendez-vous de l'arbo en Rhône-Alpes, le 15 décembre à Valence, était de confronter des visions, dans un esprit constructif, avec des représentants des différentes familles de la filière. En ouverture, Bernard Vossier, président du GIE Les vergers de l'Hermitage a mis l'accent sur le fort potentiel de variétés d'abricot. L'émergence de nouvelles donnes (en termes de coloris, qualité, réduction des intrants) impose de réfléchir aux stratégies de demain. « Faut-il segmenter les abricots par couleur (blancs, rouges, bicolores, orangés) ? Faut-il y ajouter des liens de qualité, liés à des marques, labels ? Tout est à construire », a-t-il noté.

Bâtir des stratégies

Pour Jérôme Jury, arboriculteur isérois, la différence de valorisation aujourd'hui observée entre variétés d'abricot est un point positif. Elle exprime la prise de conscience par l'aval des potentiels gustatifs « très hétérogènes en abricots ». Cet arboriculteur prône un accompagnement de l'afflux de nouvelles variétés avec des stratégies régionales. S'il estime les variétés Bergeval et Anégat intéressantes pour leur goût et positionnement dans la saison, il s'interroge sur la place à donner aux abricots rouges en Rhône-Alpes. « Il s'en est planté et il n'y a aucun accompagnement de leur mise en marché. Il faut y réfléchir tous ensemble. » Quant aux efforts de réduction des intrants, il regrette qu'ils ne soient pas valorisés auprès des consommateurs.

Rendre l'offre simple et claire

Pour le président du marché de gros de Corbas et de l'UNCGFL(1), Christian Berthe, « l'innovation, c'est bien mais le matériel variétal est, aujourd'hui, suffisant. Il faut faire le tri pour rendre l'offre simple et claire. » Il a appelé «à faire du ménage » en abricots rouges entre autres « car des marques chapeaux servent parfois de passeport pour des produits moins gustatifs ». Et de confier encore à propos du logo « Fruits et légumes de France » initié par Interfel(2) : « C'est un signe d'identification. Le consommateur le veut, ce produit français ».

L'origine France

Le logo « Fruits et légumes de France », un signe d'identification.

Le logo « Fruits et légumes de France » est « porteur de sens », pour Matthieu Lovery, directeur offre sourcing fruits et légumes chez Carrefour. Son enseigne joue le jeu du 100 % « origine France » en période de production « à condition qu'elle corresponde aux besoins des clients ». En pêches et nectarines, Carrefour fait deux exceptions. En pêches plates, l'offre française ne suffit pas. L'autre exception, ce sont des produits d'entrée de gamme, « auxquels des clients sont très accrochés », provenant d'Espagne.

Le train de l'agro-écologie

En abricots rouges, parmi les variétés testées dans des magasins Carrefour, « certaines se sont révélées décevantes, d'autres plus intéressantes », a constaté Matthieu Lovery. Et de remarquer aussi : « On ne pourra jamais expliquer au client la prolifération de variétés. C'est impossible à suivre, pour lui. Nous n'arrivons pas non plus à lui faire comprendre leur variabilité d'aspect et de goût au cours de la saison ». Quant au bio, chez Carrefour, « il se développe et nous parvenons à vendre des pêches et nectarines deux fois plus cher ». Et « le train de l'agro-écologie, on le voit bien lancé, a confié le représentant de cette enseigne. On le prend mais on essaie d'avancer avec prudence ».

Diffuser des variétés goûteuses

Acheteur chez Métro(3) Cash & Carry France, Eric Bassaget a dit : « Notre groupe est prêt à mettre en rayon des produits nouveaux sous réserve qu'ils aient été testés gustativement. C'est un appel aux sélectionneurs à ne pas diffuser dans la nature des variétés au potentiel gustatif insuffisant. » Quant à la réduction des intrants, il l'estime intéressante pour l'image de son groupe mais « elle ne sera pas forcément exigée aux fournisseurs. C'est le producteur qui est à même de faire ce choix ».

Vergers dédiés à la transformation

Alain Boiron, président de la SAS Boiron frères(4), lui, s'est dit convaincu de l'opportunité stratégique, pour les producteurs, de vergers dédiés à la transformation. A l'image du partenariat autour de la variété de pêche Bellerime lancé en 2015 entre sa société et des arboriculteurs (en Drôme, Ardèche et Gard). « Cela sécurise l'approvisionnement de l'industriel et donne de la visibilité au producteur sur la durée de sa plantation. Notre entreprise a envie d'aller plus loin dans cette démarche, a-t-il assuré, notamment avec des fruits de la région comme la pêche ».

Export : des marchés à conquérir

A l'export, « le produit français et sa qualité gustative sont attendus », a souligné Raymond Diener, expert développement international (Vegetable). L'essentiel de nos exportations se concentre sur des pays proches. La France pourrait trouver de nouveaux débouchés ou élargir ceux existants, notamment en Europe centrale et du Nord. Sur le marché russe, sa production est placée sous embargo. Mais d'autres pays de l'Europe orientale pourraient être envisagés à très court terme. Pour Raymond Diener, il faudrait aussi « se pencher sérieusement » sur des zones comme l'Arabie Saoudite et les Emirats arabes.

Annie Laurie

(1) UNCGFL : union nationale du commerce de gros en fruits et légumes.
(2) Interfel : interprofession des fruits et légumes frais.
(3) Métro : grossiste en alimentation et équipement pour professionnels de la restauration commerciale.
(4) SAS Boiron frères : fruits surgelés entiers, en purées et coulis destinés aux professionnels.

 

La Turquie

Un pays émergent à surveiller 

Aux Rendez-vous de l'arbo, Raymond Diener, expert développement international, a attiré l'attention sur la Turquie. En 2013, ce pays a produit 20 % du tonnage mondial d'abricots (la France 5%). Ses exportations de fruits ont plus que doublé entre 2004 et 2014. La Russie, son premier débouché en fruits à noyau, a mis sous embargo certains de ses produits (dont les abricots, pêches et d'autres fruits) depuis 1er janvier 2016. La Turquie est donc un pays émergent à surveiller. De plus, fin 2015, l'Union européenne a signé avec elle un protocole d'accord permettant de reconsidérer une libre circulation, notamment des fruits et légumes vers ses états membres.
Aussi, Raymond Diener a délivré un message aux acteurs de la filière : « Il faut être conscient que la Turquie concurrencera la France dès 2016. Il n'y a pas de droits à l'entrée de l'Union européenne pour les fruits turcs, même s'il y a application d'un prix minimum. Votre clientèle internationale vous attend avec des fruits de qualité, alors ne la décevez pas ».
A.L.

 

Nouvelles tendances

Les attentes des consommateurs

Nathalie Damery, présidente de l’Observatoire société et consommation.  

Lors des Rendez-vous de l'arbo, Nathalie Damery, présidente de l'ObSoCo (Observatoire société et consommation), a traité de l'évolution de la consommation et des nouvelles tendances. Elle a entre autres mis en avant une appétence à consommer autrement : goût, santé, qualité, origine des produits...
Selon une enquête de 2015, le premier souci des Français voulant mieux consommer est d'acheter des produits de qualité. « Pour la première fois dans nos enquêtes, le goût devance la sécurité alimentaire et l'impact environnemental », a indiqué l'intervenante. Les produits français et régionaux sont privilégiés par les « enquêtés » prêtant attention à l'origine géographique des produits alimentaires (65 %). Le taux de pénétration du bio a progressé de 3 % entre 2013 et 2015. Ceci, avec la santé et l'environnement en tête des motivations d'achat mais le prix comme principal frein. L'achat direct au producteur via internet, lui, a augmenté de 12 % depuis 2013.
« Des consommateurs sont prêts à acheter plus cher des produits de qualité correspondant à leurs attentes, a résumé Nathalie Damery. Pour répondre à cette demande, production et distribution doivent collaborer. C'est un moyen d'accroître la valeur, le potentiel de sortie de la seule problématique prix. »
A.L.

 

Cerise

Califruit, un partenariat territorialisé

Jean-Marc Coignat, président de Califruit.
Califruit est un bel exemple de collectif interprofessionnel installé dans la durée. Il s'agit d'une association créée en 1993 dans le Rhône (zone de Bessenay) entre producteurs de cerises et metteurs en marché (Cerifrais et Chambe Agri Fruits). Elle rassemble 150 producteurs pour 400 hectares de cerisiers sur une vingtaine de communes et 3 000 tonnes de fruits. Promouvoir ce fruit et le territoire, améliorer les méthodes de production et la commercialisation, tel est son but. Elle fonctionne avec une présidence tournante, une parité entre les deux familles professionnelles et une cotisation de 10 euros la tonne pour les producteurs comme les expéditeurs. Un appui technique est assuré par la chambre d'agriculture du Rhône.
« Nous avons une ambition commune : donner une dynamique à notre territoire, à la cerise et rendre nos entreprises aussi prospères que possible », a expliqué son président, Jean-Marc Coignat (gérant de Cerifrais) lors des Rendez-vous de l'arbo.
A.L.