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Elevage

Eleveur sans terre

Installé à Pontcharra, Sébastien Achard élève des brebis, des chèvres et des vaches. Mais il manque cruellement de foncier.
Eleveur sans terre

Sébastien Achard élève des animaux depuis son plus jeune âge. A l'âge de 12 ou 13 ans, il possédait déjà une trentaine de chèvres et une cinquantaine de brebis. Cette passion acquise dès l'enfance ne l'a jamais quitté et l'a conduit à rapidement s'installer. D'abord à Villard-Bonnot avec une surface de 2,5 hectares. Bien insuffisante pour parvenir à vivre de son métier. Puis sur les hauteurs de Pontcharra. Aujourd'hui, à 41 ans, Sébastien Achard élève 1 100 moutons, 200 chèvres, 50 vaches de races salers et abondance, des ânes et des porcs. Mais il ne dispose toujours pas de suffisamment de surface pour tout garder près de de son siège d'exploitation. Il n'a – en location et en propriété – que 50 hectares. Au quotidien, il est donc contraint de chercher des terres pour faire pâturer ses animaux.

Accord oral

L'organisation de Sébastien Achard est atypique. Si les vaches, les ânes et les cochons restent à Pontcharra, les moutons sont emmenés tout au long de l'année aux quatre coins de la région. Pendant dix ans, il les a conduits passer l'hiver sur les bords du Rhône dans l'Ain. Aujourd'hui, il ne laisse à Belley que ses agnelles. Le troupeau va dans la Drôme à Valence, sur les bords du Rhône du 20 octobre à début janvier puis, jusqu'à fin mars, il va pâturer les couverts verts (mélange d'herbe, de ray gras, d'orge, de blé, de vesce..., implantés par les céréaliers pour ne pas laisser les terres nues durant l'hiver). « Les moutons mangent 1,5 hectare par jour. C'est un arrangement qui profite autant aux agriculteurs qu'à moi. Cela leur évite de broyer et moi, cela nourrit mes bêtes. Nous ne faisons pas de contrat. C'est un accord oral entre nous », explique l'éleveur. Cette année, après la Drôme, elles ont fait une halte de deux mois et demi en Isère à Vinay, où elles mangent l'herbe qui pousse sous les noyers. Après, comme tous les ans, elles prendront le chemin de la montagne, où elles passeront l'été à Bessans, dans un alpage savoyard.

Tout coordonner

La plupart du temps, les brebis sont sous la surveillance d'un berger. Cela représente une charge conséquente pour l'éleveur qui indique cependant « ne pas avoir le choix. Soit, je fonctionne ainsi. Soit, je dois me séparer d'une partie de mes animaux. Je ne peux pas le faire. J'espère pouvoir agrandir mon parcellaire. Je gagnerai en tranquillité si j'en avais plus. En attendant, je cours partout ». Mais l'éleveur s'interroge :
« Je ne comprends pas pourquoi, lorsque des terres se libèrent, on ne cherche pas à conforter l'existant qui en a besoin ». Le manque de surface auquel il est confronté lui impose aussi un coût important en alimentation puisqu'il doit acheter du fourrage et du maïs.
Toutes ces contraintes s'ajoutent à celles que subissent les éleveurs, et notamment la prédation. Que ce soit à Pontcharra ou à Bessans, l'agriculteur a déjà dû essuyer des pertes dans son troupeau de brebis. Le quotidien de Sébastien Achard s'avère donc compliqué. « Ce n'est pas évident de tout coordonner, mais pour l'instant j'y arrive ». Pour autant, il reconnaît que son métier est difficile et qu'il faut être passionné pour l'exercer. La rémunération n'est pas à la hauteur du travail accompli. La reconnaissance de la société civile non plus. « Les gens viennent s'installer à la campagne pour être au plus près de la nature mais, deux ans après leur arrivée, ils nous mettraient bien dehors. Le tracteur fait du bruit. Les animaux sentent mauvais... ». Mais l'agriculteur n'est pas prêt à renoncer. « J'ai toujours eu des bêtes. Je vis de ça. J'en aurais toujours », affirme-t-il. 
Isabelle Brenguier