En ail, « nous avons vécu une saison très compliquée »

A l'assemblée générale de l'Apad, le 1er mars à Eurre, quel bilan avez-vous dressé de la campagne écoulée ?
Stéphane Boutarin : « 2017 a été une année très difficile. Bien que nous ayons eu de très beaux volumes en ail comme en 2016, les prix ont chuté sous la forte pression des Espagnols. Grosso modo, avec un prix moyen producteur à 1,80 euro (contre 2,80 en 2016), nous avons perdu en moyenne un euro au kilo. Aussi, nous avons dû nous battre haut et fort pour maintenir des cours élevés. On peut dire que nous avons vécu une saison très compliquée. »
En dehors du prix, la pression de l'Espagne a-t-elle eu d'autres effets ?
S. B. : « L'agressivité espagnole sur le marché a retardé les ventes d'ail français. De ce fait, les stockages ont été plus longs, ce qui a pu entraîner des problèmes de conservation et donc des pertes de marchandises de 20 à 50 % selon les lots. Il a fallu retrier, d'où des surcoûts de main-d'œuvre. Lorsque les producteurs avaient la possibilité de ventiler, les pertes ont été moindres. »
Qu'avez-vous fait pour tenter de contrecarrer la pression de l'ail espagnol ?
S. B. : « Nous avons demandé à être reçus par l'ambassade d'Espagne, mais sans succès puisque nous n'avons même pas eu de réponse ! Par ailleurs, des producteurs ont fait des relevés de prix dans des enseignes de la grande distribution. Nous avons constaté que les deux origines d'ail - française et espagnole - étaient bien présentes dans les rayons. Et avec des prix à la consommation similaires à ceux de 2016. Autrement dit, la grande distribution a joué le jeu de l'ail français, ce qui est positif. Mais ce n'est pas le cas sur le marché de gros où l'ail français a des difficultés à se positionner. Par ailleurs, nous sommes allés à la direction générale de l'agriculture à Bruxelles afin de discuter des certificats d'importation. »
La communication reste-t-elle un de vos chevaux de bataille ?
S. B. : « Avec l'association nationale interprofessionnelle de l'ail (Aniail), nous avons participé au lancement médiatique de la campagne "mon ail français", en juillet au marché de Rungis. C'est un moyen efficace de promouvoir la filière et d'inciter les consommateurs à choisir l'ail de France, dont celui de la Drôme, entre août et septembre. Nous avons aussi organisé, toujours en juillet et avec succès, la fête de l'ail à Crest. Par ailleurs, nous intervenons sur FranceBleu Drôme-Ardèche deux fois par an pour une émission spécifique sur l'ail. Et, bien entendu, nous avons assuré, tout comme la semaine dernière, une présence au Salon international de l'agriculture, à Paris, sur les stands du Gnis(1) et de Agridemain(2). Autant d'occasions de promouvoir la filière ail française et drômoise. »
Comment percevez-vous la campagne 2018 ?
S. B. : « Avec préoccupation car les frigos espagnols sont bien remplis et l'on ne sait pas sur quel marché va s'écouler cette production. Toutefois, je suis heureux de constater que notre filière allicole française intéresse et les producteurs doivent en être fiers. C'est une chance que de pouvoir travailler unis. Cependant, la manière dont on commercialise l'ail aujourd'hui sera différente demain. Aussi, doit-on continuer à évoluer, notamment afin d'allonger la période de vente et ainsi convenir au marché. »
Propos recueillis par Christophe Ledoux
(1) Gnis : Groupement national interprofessionnel des semences et plants.
(2) Agridemain : plateforme rassemblant plusieurs organisations professionnelles agricoles dans le but de promouvoir l'agriculture auprès du grand public.
L’Apad en chiffres
L’association des producteurs d’ail de la Drôme regroupe 98 adhérents dont :- 42 sont en production de semence (parmi lesquels 5 en agriculture biologique) ;
- 56 en en production d’ail de consommation (parmi lesquels 10 en agriculture biologique). Une vingtaine d’entre eux sont en IGP dont 6 en bio.