En bio, le bon fertilisant au bon moment

La coopérative Dauphinoise - désormais Oxyane - a mené une série d'essais sur blé tendre sur une plateforme de la Bièvre, à l'EARL les Gallines, à Beaurepaire (Isère). Le dernier tour de plaine s'est plus particulièrement intéressé aux essais de fertilisation organique en cours, ainsi qu'aux essais de conduite et densité sur blé tendre. La plateforme teste également le criblage variétal en céréales à pailles. L'EARL les Gallines, exploitée par Jean-François Charpentier et Jean-François Legut, compte une SAU de 300 hectares dont une centaine en agriculture biologique, où sont pilotés les essais avec Oxyane. L'installation d'un poulailler bio de 15 000 poules pondeuses alimente une partie de l'expérimentation sur la fertilisation.
Litière de porc au printemps
La parcelle de blé tendre concernée, de variété armstrong, avait un précédent de maïs. Les essais ont bénéficié d'un tour de 30 mm d'irrigation au mois d'avril. L'apport de la litière de porc, dans le cadre d'un échange contre de la paille, présente l'avantage d'un produit complet, facile à épandre, sec, qui ne dégage pas d'odeur et qui est autorisé en bio. La première bande de test a reçu un épandage unique, le 6 décembre 2019, avant le semis, de 200 unités d'azote à l'hectare (ce qui est beaucoup). Les autres bandes ont reçu 0 ou 100 unités d'azote. Ici, le rapport C/N, carbone sur azote, est de 11. Jean-François Perret, technicien cultures bio chez Oxyane, conseille d'apporter ce type de fertilisation plutôt sur des cultures de printemps et de faire attention aux doses en zone vulnérable.
Engrais organique « coup de fouet »
Le deuxième type d'apport est un engrais organique, nouveau sur le marché, azopril, un fertilisant azoté organique perlé d'origine végétale (fabrication française à partir de résidus de canne à sucre). 100 unités, soit 700 kg/ha, ont été apportées en sortie d'hiver. « Ça a l'air d'être un très bon produit, à confirmer, indique Jean-François Perret. Le fabricant annonce 50 % d'azote soluble. » Il en coûte entre 460 et 480 euros l'hectare, soit 3,80 euros l'unité d'azote environ. « Ce fertilisant peut donner un coup de fouet en complément, car son coût est élevé », ajoute le technicien. De manière générale, en fertilisation organique, il convient d'épandre au plus près du besoin. C'est dans la bande d'essai où il y a eu 200 unités d'apport d'engrais organique que les cultures sont les plus belles de toute la plateforme.
Les fientes de poules, un produit complet
Le troisième type d'engrais sont les fientes de poules. Les 200 unités ont été épandues pures, sans litière. Pour le spécialiste des cultures bio, cet engrais « est un bon produit, complet, qui apporte azote, phosphore, potasse, magnésium et soufre. Mais il est difficile à trouver, pour les exploitants qui n'ont pas de poulailler ». Petite mise en garde supplémentaire, à partir de 2021, les poulaillers en caillebotis intégral ne pourront plus proposer leurs apports en agriculture biologique. « Nous conseillons donc d'anticiper les commandes, déclare Jean-François Perret. L'épandage de fientes réclame une logistique, mais c'est un apport des moins onéreux. » Sur la deuxième bande d'essais, où l'apport de 100 unités de fientes a eu lieu à la fin de l'hiver, les blés sont plus clairs que dans le premier essai à 200 unités et il y a moins de tallage.
Composé mixte pour les protéines
Un quatrième fertilisant est un composé mixte ou tradicompost incluant fientes, marc de raisin et matières végétales. Il présente un C/N supérieur à des fientes pures (C/N 5 ou 6), de l'ordre de 11 à 12. « Il donne moins un effet coup de fouet, mais son intérêt réside dans l'apport de protéines à l'automne. Il est moins cher mais délivre moins d'azote », détaille le technicien. Enfin, sur la bande témoin, où il n'y a eu aucun apport de fertilisant, les cultures se portent plutôt bien. Sur cette plateforme d'essais, on observe de façon générale un écart de rendement entre les apports de 100 ou 200 unités d'azote à l'hectare.
En agriculture biologique, la fertilisation est optimale quand les sols sont humides et que leur température est de 12 °C, afin de favoriser la minéralisation. Les interventions se déroulent dès les semis ou en sortie d'hiver, si les sols sont assez portants. Les conditions de printemps sont déterminantes. Cette année, en raison de la sècheresse, la fertilisation a été délicate.
Isabelle Doucet