FDO : renégocier le plan loup et dépénaliser les éleveurs

Avec 166 attaques reconnues et 544 animaux tués en Drôme, le bilan des attaques de loups en 2018 est un nouveau coup dur pour les éleveurs. « Cela fait vingt ans que l'on nous dit qu'il n'y a pas assez de loups en France. La société a son point de vue mais nous, les éleveurs et le pastoralisme, sommes en perdition, s'est emporté Frédéric Gontard, co-président de la FDO, en assemblée générale le 5 février à Crest. Dans cinq à dix ans, combien d'éleveurs restera-t-il ? » Depuis plus de vingt ans, le loup poursuit son expansion. A tel point que le seuil de viabilité de l'espèce - fixé à 500 individus en France - serait largement atteint à la fin de l'hiver selon les organisations d'éleveurs. Celles-ci réclament la renégociation du plan loup 2018-2023. Ce point a été débattu lors d'une réunion syndicale organisée le 4 février à Valence, avec des représentants des 32 départements concernés par la prédation. « Nous avons fait des propositions en vue du prochain groupe loup national prévu le 15 février », a expliqué François Monge, co-président de la FDO de la Drôme. Sont demandées, entre autres, l'augmentation du quota de prélèvement de loups, la simplification des procédures (en matière de tir de défense et de zonage), une meilleure réactivité pour les tirs de prélèvement ainsi que l'automatisation du tir de défense dès que la présence du loup est avérée. Mais aussi la renégociation des indemnités, le versement d'un acompte sur les aides au berger (afin d'éviter les avances de trésorerie), la présence d'une « brigade loup » en Drôme ainsi que la prise en compte des frais et équipements des louvetiers...
« La Drôme est gangrénée par le loup »
L'obligation de moyens de protection des troupeaux apporte aussi son lot de difficultés et de stress. Des conflits opposant éleveurs et randonneurs, notamment, se terminent devant les tribunaux. « Nous ne pouvons être tenus responsables des problèmes causés par les chiens qui nous sont imposés. Il faut obtenir la dépénalisation pour les éleveurs », a plaidé Yves Feydy, ancien président de la FDO. En attendant, les mairies sont incitées à prendre des arrêtés pour interdire (ou fortement déconseiller) la présence de chiens de compagnie (mêmes tenus en laisse) sur les zones pastorales. Et la FDO a lancé une action symbolique incitant ses adhérents à désigner la « DDT* » comme propriétaire des chiens de protection sur les cartes d'identification des animaux.
« Il faut tenir la paix sociale dans les campagnes et l'on espère bien que le quota de prélèvement sera augmenté dans le prochain plan loup », a déclaré Rémi Gandy, président de la fédération des chasseurs de la Drôme. « La Drôme est gangrénée par le loup », a considéré André Gilles, vice-président du conseil départemental chargé de l'agriculture, avant de critiquer très sévèrement l'action de l'association pour la protection des animaux sauvages (l'Aspas dont le siège est à Crest), qui achète des terrains en vue d'en faire des réserves de vie sauvage. Un « ensauvagement » qu'ont aussi dénoncé Patrice Marie, représentant des bergers salariés, et Yann Sourriau, maire de Chichilianne.
« La protection, ça marche » selon le sous-préfet
« Depuis 2010, les modes de prédation évoluent avec, désormais, des attaques de loups tout au long de l'année, davantage diurnes et moins dans les zones protégées », a constaté Patrick Bouzillard, sous-préfet de Die. Il a pointé le trop grand nombre d'élevages non protégés. « Oui, c'est contraignant de se protéger, oui ça a un coût sachant que 80 % est pris en charge, mais c'est indispensable et ça marche », a-t-il souligné. Par ailleurs, il s'est défendu d'un manque de réactivité de l'Etat. « Nous sommes capables de prendre un tir de défense en 48 heures, a-t-il dit. Et chaque fois que l'on a pu intervenir, on l'a fait avec des louvetiers. » Il compte d'ailleurs davantage sur eux que sur la brigade loup « car ils connaissent mieux le terrain », a-t-il estimé, avant d'annoncer six nouveaux louvetiers cette année. Quant aux chiens de protection, « il y a un véritable travail à faire sur leur éducation ainsi que sur les lignées », a-t-il ajouté. Il a également fait savoir que le préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup avait sensibilisé les juges sur les difficultés liées à la prédation et la nécessité des chiens entre autres moyens de protection.
Christophe Ledoux
* DDT : direction départementale des territoires.
Loup en 2018 /
Bilan des attaques en Drôme
Vercors Ouest : 66 attaques, 144 victimes indemnisées, 38 disparues.Hauts plateaux du Vercors : 7 attaques, 12 victimes indemnisées.
Diois : 39 attaques, 163 victimes indemnisées, 137 disparues.
Saoû Roubion : 27 attaques, 60 victimes indemnisées, 7 disparues.
Durbon et Jocou : 17 attaques, 36 victimes indemnisées, 15 disparues.
Ventoux : 8 attaques, 27 victimes indemnisées, 61 disparues.
Lure : 6 attaques, 42 victimes indemnisées, 52 disparues.
Baronnies : 6 attaques, 10 victimes indemnisées, 5 disparues.
(bilan au 21 décembre 2018, source FDO).
Parmi les autres sujets /
Autorisation de tir et berger salarié« Contrairement aux éleveurs qui sont protégés par la loi de nécessité, aucun berger salarié n'est couvert par la loi s'il est armé pour faire son métier et s'il venait à abattre un loup, a fait remarquer Patrice Marie, représentant des bergers salariés. Une hypocrisie de la part de l'Etat alors que l'on conseille aux bergers de passer le permis de chasse pour faire leur travail. »Le plan ovin reconduitDémarré en 2016, le plan départemental ovin accompagne les éleveurs dans l'amélioration de la productivité de leur troupeau sur l'appui technique, l'achat d'équipements et petits matériels. D'une durée de trois ans, il a pris fin en 2018. Le Département de la Drôme a décidé de le reconduire pour trois ans. Les demandes sont désormais entièrement dématérialisées (sur le site internet du conseil départemental). A noter, les balises de géolocalisation sont rajoutées à la liste des investissements éligibles.Sécheresse 2018
En lien avec la chambre d'agriculture de la Drôme, la FDO a réalisé des bilans fourragers. Le dossier a été validé en comité d'expertise (DDT). Les éleveurs du Diois (et d'autres zones de la Drôme) peuvent ainsi mobiliser l'aide de la Région Auvergne-Rhône-Alpes (voir L'Agriculture Drômoise du 31 janvier et www.agriculture-dromoise.fr).Pac et retard de paiement
Fin décembre, la FDO a rencontré l'agence de services et de paiement (ASP) afin d'évoquer les difficultés qu'entraînent les retards de versement des aides Pac. « Trois ans de retard, c'est inadmissible », a pesté Frédéric Gontard en assemblée générale de la FDO.Dispositifs sanitaires

Benjamin Deltour, vétérinaire et directeur du GDS de la Drôme, est notamment intervenu sur les statuts sanitaires. « L'objectif est de limiter les risques sanitaires dès la création du troupeau, a-t-il expliqué. Ce protocole ne permet pas de garantir qu'un troupeau est indemne d'une maladie. Il permet cependant d'évaluer assez précisément la présence ou l'absence d'une maladie. » Lancé fin 2013-début 2014, et bien qu'il bénéficie d'une aide du Département, ce dispositif n'a pas encore rencontré le succès escompté. Seulement 36 troupeaux ont été évalués. « Il faudrait que le maximum d'élevages entre dans cette démarche », a-t-il ajouté, avant de détailler les maladies actuellement les plus présentes (chlamydiose, fièvre Q...) et qui impactent la productivité des troupeaux.
C. L.
Chiens de protection /
Collier et harnais connectés font débat
Les outils connectés peuvent-ils aider les éleveurs dans la gestion des chiens de protection ? Cette question fait débat au sein de la FDO à propos du projet - imaginé avec la chambre d'agriculture et l'Adem - d'équiper des chiens de colliers GPS. Il s'agirait d'étudier le déplacement des brebis dans les pâtures ainsi que le comportement des chiens. Par ailleurs, une start'up (CaniTech basé à Rovaltain) propose, elle, d'équiper les chiens d'un harnais connecté (GPS) mesurant leur rythme cardiaque, ce qui permet ainsi de détecter les attaques de loups sur les troupeauxAu sein de la FDO, certains craignent une perte de maîtrise dans la transmission des données. « Ce sont les loups qui doivent être surveillés, pas les chiens de protection », argumentent les opposants à ces projets. « Cela peut nous aider dans la sélection des chiens de protection mais aussi à mieux comprendre comment les brebis utilisent l'espace pastoral », rétorque François Monge. « Pour faire face aux meutes de loups, nous devons développer des meutes de chiens, a ajouté Nicolas Peccoz, administrateur de la FDO. Ces projets pourraient nous aider dans la sélection des chiens. Les outils connectés sont une piste à explorer. »
C. L.
La foire aux béliers de Crest /
