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Rencontre

FDSEA : les problèmes agricoles exposés à la députée Célia de Lavergne

La FDSEA a invité la députée Célia de Lavergne sur une exploitation dioise pour discuter des diverses problématiques agricoles.
FDSEA : les problèmes agricoles exposés à la députée Célia de Lavergne

La FDSEA a souhaité rencontrer les quatre nouvelles députées de la Drôme pour leur expliquer les problématiques de l'agriculture du département. C'est ce qu'a indiqué son président, Grégory Chardon, lors du premier rendez-vous avec l'une d'elles, Célia de Lavergne, députée de la troisième circonscription de la Drôme. C'était le 15 septembre sur l'exploitation de Marie-Armelle et Jean-Louis Mancip à Montlaur-en-Diois. Etaient présents adhérents et présidents des régions syndicales FDSEA de la circonscription.
Ce moment d'échanges, la députée l'a considéré comme essentiel car, « pour ma circonscription et la Drôme, l'agriculture est centrale » mais aussi « parce que c'est un sujet national ». Elle et Olivier Allain ont été nommés par le ministre de l'Agriculture coordinateurs des Etats généraux de l'alimentation (EGA). Alors, a-t-elle ajouté : « Il est important, pour moi, que vous me parliez de vos problématiques, des forces de la Drôme, de votre vision de l'agriculture de demain qui vous permette de vivre ». Et d'espérer que cette première rencontre soit le début d'échanges réguliers.

Grégory Chardon, président de la FDSEA, a animé la discussion avec Célia de Lavergne, la députée.

Loup : « on veut du zéro attaque »

Depuis vingt ans, Marie-Armelle et Jean-Louis Mancip sont confrontés à la prédation du loup en estive à Font-d'Urle malgré la mise en œuvre de tous les moyens de protection : « On en est aujourd'hui réduit à dormir avec le troupeau. » Ils subissent aussi des attaques à la ferme depuis neuf ans. Ils se demandent s'il est pertinent de continuer cette activité. D'ailleurs, ils ont réduit leur cheptel, cette année. Eleveur à Saint-Nazaire-le-Désert, Didier Beynet est également désemparé : « On se fait attaquer dans les enclos et même de jour. On a perdu 70 brebis (sur 700) à la montagne cette année alors qu'on les surveille, en se relayant. On n'a pas passé un jour ensemble avec ma femme et mes enfants cet été. Qui est capable d'accepter ça ? Ma femme me dit que c'était la dernière année qu'elle monte à la montagne ».. Il a invité l'élue à venir passer un jour avec eux. Frédéric Gontard, éleveur à La Laupie, a appuyé : « Il y a de la souffrance chez les éleveurs. S'il n'y a plus d'élevage, la biodiversité y perdra, le milieu se refermera. » Les éleveurs se sentent démunis et non écoutés. Le plan loup 2018-2013 en préparation, ils le jugent pire que le précédent : « Les propositions de la profession n'ont pas du tout été reprises. Ce projet, c'est la porte ouverte de la bergerie. Nous, on veut du zéro attaque. » La députée a dit entendre leur détresse : « Je n'ai pas de solution à vous proposer aujourd'hui. Mais je suis en mode "écoute" et preneuse d'idées ».

Retenir l'eau

Autre sujet, l'irrigation. Marie-Armelle et Jean-Louis Mancip arrosent une partie de leur noyeraie avec l'eau de la Drôme. Avec le changement climatique, d'autres cultures de l'exploitation ont soif. Mais les restrictions en eau sont de plus en plus fortes. « Sans retenue collinaire, je ne vois pas comment s'en sortir », a fait remarquer l'agricultrice. « On ne pourra faire venir l'eau du Rhône jusqu'à la montagne, a noté Philippe Breynat, président de l'Adarii(1). L'eau passe, il faut la retenir. Mais, pour faire une retenue collinaire, l'étude est la même que pour un barrage de grande envergure. La loi sur l'eau de 2006 doit être assouplie. » La députée lui a répondu : « Cela me paraît difficile car c'est l'application d'une directive cadre européenne. Mais j'entends que la ressource en eau, avec la sécheresse, est insuffisante pour vous. Il faut trouver des solutions alternatives ». Sandrine Roussin, vice-présidente de la FDSEA et élue chambre d'agriculture, a évoqué, elle, le projet d'aménagement hydraulique Sud Drôme-Nord Vaucluse (irrigation avec l'eau du Rhône). Un projet territorial porté par les chambres d'agriculture des deux départements.

Redonner de l'air aux agriculteurs

Célia de Lavergne, la députée, a espéré que cette première rencontre soit le début d'échanges réguliers.

Concernant la répartition des marges, Sandrine Roussin a déploré : « L'agriculture est la seule filière à avoir le droit de vendre à perte car elle n'est pas reconnue par le code du commerce ». Frédéric Gontard a signalé qu'il vendait ses agneaux au même prix que ses parents 50 ans en arrière. Grégory Chardon a souligné que le retour de la valeur était la revendication première de la FNSEA.
« Il n'est pas normal que vous n'arriviez pas à gagner votre vie, a reconnu la députée. Etre ultraprotectionnistes, fermer les frontières, je n'y crois pas. Les EGA sont un moyen de redonner de l'air aux agriculteurs. Ce peut être au niveau financier (avec notamment la baisse du coût du travail), des normes et contraintes, de l'accompagnement, de la diversification... Cela se travaille en ce moment. Je suis intéressée par des propositions ». Grégory Chardon a plaidé pour le maintien de l'exonération des cotisations sociales pour les TODE(2). Mais aussi le maintien du CICE(3), qui entre directement en net dans l'exploitation. Les retards de versements des aides Pac et la surtransposition des directives européennes dans le droit français sont aussi revenus sur le tapis.

Retravailler l'assurance récolte

Cette année, les vendanges seraient en baisse de 60 % dans le Diois (gel), selon Olivier Rey, président de la Cave de Die Jaillance. Et dans le Sud-Drôme, de 50 % (gel et grêle). L'abricot des Baronnies, lui, a subi gel, grêle et crise économique. Aussi, les aléas et l'assurance récolte, « c'est un sujet fondamental pour l'avenir des cultures », a estimé Grégory Chardon. Le 10 octobre, le CAF(4) organise un groupe de travail pour rediscuter l'assurance récolte, notamment des franchises, subventions. « C'est intenable que les agriculteurs doivent avancer deux années de subventions. » La FDSEA a interpellé les députés pour que ce problème soit débloqué. « Nous demandons à l'État de payer ce qu'il doit (assurance récolte 2016), a expliqué son président. Mais aussi de pousser à fond cet outil et mettre le paquet pour que son coût ne soit pas trop élevé. » Célia de Lavergne a dit avoir entendu la demande faite au gouvernement de retravailler l'assurance récolte avec les assureurs et la profession agricole. Enfin, le président de la FDSEA a conclu cette rencontre en lui disant : « On compte sur vous pour faire remonter les problématiques du terrain à Paris, où on nous voit d'en haut ».

Annie Laurie

(1) Adarii : association départementale des irrigants individuels.
(2) TODE : travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi.
(3) CICE : crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi.
(4) CAF : conseil de l'agriculture française

 

L'EARL de la Bâtie

Marie-Armelle et Jean-Louis Mancip ont accueilli la rencontre sur leur exploitation.
2 associés : Jean-Louis Mancip, installé en 1992 (reprise de l'exploitation familiale), et Marie-Armelle, en 1999.
Elevage ovin viande de 100 brebis au départ, passé à 350 en 1997 grâce à la possibilité de transhumer sur le Vercors puis ramené à 250 animaux en 2017.
Un salarié mis à disposition par le groupement d'employeurs Agritravail.
L'exploitation est certifiée en agriculture biologique depuis 2003 (conversion commencée en 1996).
Noix, céréales et agneaux sont commercialisés via des coopératives et l'huile de noix auprès de revendeurs locaux. De l'agneau est aussi vendu en direct.
Installation d'une chaudière à bois déchiqueté en 2008 pour le séchage des noix, le chauffage des salles de travail et de l'habitation. Mise en place d'un réseau d'irrigation en 2008 pour sécuriser la production de noix. Installation de panneaux photovoltaïques sur le toit d'un hangar en 2011 (électricité vendue à EDF) et d'un moulin à huile de noix en 2016.

 

Internet et téléphonie mobile /
La campagne pénalisée
Lors de la rencontre entre la FDSEA et Célia de Lavergne, a aussi été évoqué le problème d'internet et de la téléphonie mobile. Dans la campagne, des zones sont mal desservies. Or, « nos entreprises ont besoin d'avoir du réseau pour fonctionner, a fait remarquer Céline Ferlay, secrétaire générale de la FDSEA (Le Grand-Serre). On est très pénalisé dans nos campagnes car on communique beaucoup avec. Bien des dossiers se font sur internet. » Alain Aubanel (Chamaloc), lui, a signalé avoir été trois semaines sans téléphone mobile cet été : « En plus, je paie cher d'abonnement. C'est inadmissible ».
La députée Célia de Lavergne a indiqué qu'actuellement la pression était mise sur les opérateurs pour accélérer l'installation d'antennes. Pour internet, elle fait partie des députés qui disent « la fibre partout ». Son idée c'est : « consolider une cartographie des zones réellement blanches avec les informations que les uns et les autres me communiquent ». Pour la téléphonie mobile, elle a signalé un site où peuvent être déclarées les zones blanches. Il s'agit de France mobile, une plateforme de l'État pour collecter et traiter les problèmes de couverture. « Je m'empare de ce sujet qui me concerne aussi », a assuré l'élue, qui réside à La Chapelle-en-Vercors et pratique le télétravail.