Fertilisation minérale ou organique : quelles différences ?

Fertilisation minérale ou organique : quelles différences pour les arbres ? C'était l'un des thèmes de la journée sur les techniques alternatives et bio en arboriculture organisée par la Sefra (station d'expérimentation fruits Rhône-Alpes) le 22 septembre à Etoile-sur-Rhône. Un sujet traité par Alain Kleiber, référent plantes pérennes - nutrition végétale au sein d'Auréa Agrosciences(1), en s'appuyant sur l'étude d'analyses foliaires de pommiers et pêchers.
Potassium et bore
Le potassium et le bore sont les deux éléments dont l'assimilation est la plus liée à la régularité du flux hydrique dans le végétal. Cela explique plus de 85 % de leur présence dans les organes (si leur disponibilité initiale est suffisante). Ils sont davantage des traceurs de la qualité d'irrigation et du potentiel hydrique du sol que de la fertilisation. On peut penser que le potentiel hydrique du sol, à terme, est supérieur avec des apports organiques.
Cuivre
La teneur plus élevée en cuivre (dans le tableau) ne serait pas liée à la pratique organique (à vérifier cependant) mais au mode de production. Le cuivre est indispensable à tout végétal supérieur (composant de la chlorophylle, catalyseur des auxines...). Mais on part du principe qu'il n'y a pas besoin d'en fournir aux plantes pérennes, du fait des apports phytosanitaires (qui en contiennent). Le problème est plutôt l'excès, qui a des effets négatifs sur la vie organo-biologique du sol avec des conséquences directes et indirectes. Cet élément intervient aussi dans les antagonismes nutritionnels. Au niveau du sol, en excès, il contribue aux phénomènes chlorotiques. Antagonismes aussi en interne dans le végétal : par insolubilisation du fer et manganèse, il accentue les phénomènes chlorotiques. Cela peut participer aux moindres teneurs en fer et manganèse observées.
Zinc
Les teneurs en zinc sont très liées à la climatologie de l'année (atténuées en fertilisation organique ?). Dans les feuilles, elles sont des traceurs de l'état végétatif de l'arbre. Par sa contribution à la synthèse des auxines et au métabolisme des glucides, le zinc intervient indirectement sur le groupe fonctionnel(2) « photosynthèse ».
Phosphore et magnésium
Que signifie une plus forte assimilation du phosphore et du magnésium en fertilisation organique ? Le magnésium et, surtout, le phosphore sont les deux éléments dont l'assimilation est la plus liée au fonctionnement organo-biologique du sol. La fertilisation organique a certainement un effet positif sur la « biodisponibilité » du phosphore et du magnésium. Quant au magnésium, comme le calcium, il s'assimile au fur et à mesure du vieillissement foliaire. De plus, il est présent dans quantité d'engrais organiques.
Synergies, antagonismes, interactions
La nutrition ne se raisonne pas élément par élément mais en tenant compte des synergies, antagonismes, interactions... La notion de groupe fonctionnel ne s'applique pas aux cas de carences ou toxicités. Manganèse, fer, magnésium, soufre : en cas de manque de l'un de ces éléments, l'azote ne peut être totalement fonctionnel (et inversement). Attention toutefois, à l'intérieur de ce groupe, à l'antagonisme très marqué entre le magnésium et le manganèse (et, à un moindre niveau, le fer).
Des différences explicables
Les différences observées entre les deux types de fertilisation sont explicables, conclut Alain Kleiber, avec toutes les limites statistiques de ce type d'approche. La nature physique de la feuille et son potentiel photosynthétique est certainement à prendre en compte (bio, non bio). La fertilisation organique se caractérise par une forte variabilité des données. Cette variabilité est en partie liée à la difficulté de gestion de l'azote organique. Mais aussi à des objectifs techniques, qualitatifs et quantitatifs très différents. Le groupe « minéral », lui, apparaît plus homogène dans ses objectifs. Les références sont certainement plus à moduler en fonction de ces objectifs que des modes de production. Le matériel végétal est également à prendre en compte.
(1) Auréa Agrosciences résulte de la fusion récente de trois laboratoires (Agro-systèmes/Agro-prélèvement, LCA et SAS laboratoire). Ce groupe est le leader français des analyses agro-environnementales.
(2) Groupe fonctionnel : éléments intervenant sur la même fonction.