« France, veux-tu encore de tes paysans ? »

Répondant à l'appel de leur réseau national, la FDSEA et Jeunes Agriculteurs (JA) de la Drôme se sont mobilisés devant la préfecture à Valence le 8 octobre dès six heures et demi du matin. Une action pacifique, qui leur a valu les remerciements du préfet Hugues Moutouh, auquel ils sont allés porter leurs doléances. Ils étaient venus avec une banderole sur laquelle était inscrite cette interrogation : « France, veux-tu encore de tes paysans ? »
Ras le bol
Le président de la FDSEA, Grégory Chardon, celui des JA, Jordan Magnet, ainsi que les secrétaires généraux des deux syndicats, Serge Guier et Benjamin Aubert, se sont relayés pour exprimer les inquiétudes et le ras le bol des agriculteurs. « Des exploitations sont au fond du gouffre », ont-ils alerté. Le revenu, « globalement, n'y est plus ». La loi Egalim ne donne pas satisfaction, « la distribution met toujours la pression sur la profession ». Et les difficultés économiques sont accentuées par les aléas climatiques (gel, grêle, tempête). Avec les sécheresses, le besoin de stocker de l'eau pour irriguer se fait davantage sentir. La réglementation est de plus en plus contraignante. Les agriculteurs français sont confrontés à des distorsions de concurrence au sein même de l'Europe et ont des craintes vis-à-vis d'accords commerciaux de libre échange tels que le Ceta et le Mercosur.
Détresse, incohérences, pression
Il y a aussi l'agribashing, les intrusions dans les élevages, les agressions verbales et physiques parfois violentes dont sont victimes des agriculteurs. C'est du malaise en plus. Et chez les éleveurs drômois, s'ajoutent les dégâts de loups qui créent du désespoir... Face à « ces situations de détresse, ces décisions incohérentes, cette pression sociale », la FDSEA et JA de la Drôme demandent à l'Etat de prendre des mesures adéquates, de protéger et défendre son agriculture.
Des réponses du préfet
« Je comprends que le secteur agricole est en grande difficulté », a confié le préfet avant de revenir sur certains sujets. Sur la charte des riverains (traitements phytosanitaires), il s'est voulu rassurant : « Je ne me défilerai pas, a-t-il assuré. Je serai à vos côtés pour la finaliser car nous en avons besoin ». Concernant le Ceta (en vigueur depuis deux ans), « sur 70 000 fermes au Canada, seules 36 sont agréées, c'est un symbole ». Les retenues collinaires, il est « partant » pour des projets collectifs de trois ou quatre agriculteurs. Concernant le travail post-calamités, « c'est frustrant pour vous car cela prend énormément de temps », a-t-il noté. Pour le loup, il « mesure » le désarroi des éleveurs et de leur famille : « Les tirs, mesures de protection ne suffisent pas pour arriver à un bon équilibre. Je pense qu'il faut faire un comptage objectif de la population de loups »...
Opération de sensibilisation
Après avoir offert un petit-déjeuner au préfet, les agriculteurs ont poursuivi leur mobilisation au rond-point de Chaffit, à l'entrée sud de Valence. Là, ils ont mis en place des barrages filtrants avec des tracteurs car leur objectif n'était pas de bloquer totalement la circulation. Ils étaient venus pour conduire une opération de communication auprès des citoyens, les sensibiliser en leur distribuant des tracts demandant leur soutien. Bien des automobilistes et routiers leur ont d'ailleurs adressé des messages qui font chaud au cœur. « Merci ». « On vous soutient ». « Courage ». « On est à fond avec vous »... C'est ce qu'on pu entendre les agriculteurs mobilisés autour de ce rond-point.