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Arboriculture

Fruits d'été : du mieux après un début chaotique

Un manque de pêches, nectarines et surtout d'abricots. Des problèmes de qualité pour ces derniers. Ainsi a débuté la saison mais la situation s'est améliorée. Et les quantités devraient remonter fin juillet.
Fruits d'été : du mieux après un début chaotique

Gel dans les Baronnies et la vallée du Rhône, pollinisation compliquée, grêle en avril et surtout le 12 juin à Etoile, Tain-l'Hermitage, Mercurol... (600 hectares touchés), un mois de mai excessivement pluvieux, les conditions météorologiques n'ont pas été très favorables aux fruits d'été. Comparée à 2017, la récolte a commencé à peu près à la même époque en abricot et environ cinq jours plus tard en pêche dans la vallée du Rhône.

Un commencement décevant

Globalement, la récolte d'abricots est faible, confie Régis Aubenas, président de la section fruits de la FDSEA. Les volumes commercialisés en début de saison le sont encore plus, en raison d'importants écarts de tri en station (fruits boisés, éclatés, de mauvaise conservation). » Il qualifie le début de saison de « chaotique et décevant malgré une faible charge sur les abricotiers » : qualité gustative laissant à désirer (du fait des pluies), faible pourcentage de fruits en catégorie I, retours d'expédition. Et, « cette année encore, la situation est très hétérogène en fonction des variétés, des situations géographiques et de la protection physique des vergers (ceux couverts avec des filets s'en sortent mieux) », reprend-il. Il fait le même constat pour les pêches. Côté calendrier, au 14 juillet, 80 % du tonnage d'abricots devraient être récoltés.

La distribution joue le jeu

Sur le plan sanitaire, vu la météo, « la situation aurait pu être pire ». Et, à présent, elle s'est améliorée. Quelques dégâts de drosophila suzukii ont été constatés sur des abricots situés à proximité de cerises non cueillies. Mais ce sont surtout les forficules qui en ont causé cette année sur abricotiers et pêchers. La consommation, elle, « est là mais pas euphorique, observe Régis Aubenas. Si le volume était normal, ce serait compliqué. » Sur le marché national, la distribution joue bien le jeu de l'origine « France ». Sur le marché européen, les concurrents étrangers - Espagne, Italie et Turquie - sont très présents, avec des prix plus bas.
Depuis fin juin, les variétés arrivant à maturité sont un peu plus chargées en fruits. Et si des problèmes d'épiderme subsistent encore, la qualité gustative est revenue. Les clients retrouvent confiance. Le marché s'est considérablement amélioré : il est plus équilibré, les cours sont en légère hausse. Néanmoins, avec une demi-récolte d'abricots et des prix d'une année normale, le chiffre d'affaires des exploitations va en pâtir.

Pêches : l'offre inférieure à la demande

« Les pêchers, note Régis Aubenas, ne sont pas à leur charge optimale » cette année (mauvaise nouaison). Néanmoins, leurs fruits ont mieux résisté que les abricots aux conditions climatiques, « même si le gel a laissé des traces », fait remarquer Bruno Darnaud, président de l'AOP* pêches et abricots de France. Les nectarines aussi mais dans une moindre mesure car elles sont plus sensibles au boisage que les pêches, d'où davantage d'écarts de tri. Le début de saison a été marqué par des teneurs en sucre un peu justes et quelques problèmes de conservation. A présent, la situation est satisfaisante. « Et la distribution a bien fait la bascule sur la production française lorsqu'elle a commencé à être en vente, commente Régis Aubenas. Mais nous manquons de volume, au point de ne ne pas être capables de fournir le marché intérieur. » Et Bruno Darnaud appuie : « Nous n'avons pas de stock ; c'est du jamais vu, pour moi ». En plus, la chaleur booste la consommation des pêches et nectarines. Du coup, des distributeurs sont obligés d'aller s'approvisionner en Espagne. « Nous espérons des quantités plus normales à partir du 20 juillet, alors nous leur disons de ne pas nous oublier à ce moment-là », indique le président de l'AOP. « A présent, le marché est fluide et les cours sont corrects, précise encore Régis Aubenas. Cependant, vu les faibles volumes, ils pourraient être 15 centimes d'euro (du kilo) au-dessus des prix actuellement pratiqués. »

Plus d'optimisme pour la suite

En abricots, comme le résume Bruno Darnaud, la situation sera plus compliquée qu'en pêches pour les producteurs, à cause du manque de tonnage et des aléas climatiques qui ont perturbé le marché en juin. Au sujet de Bergeron et des autres variétés d'abricot à venir, « nous avons eu une réunion de l'AOP le 4 juillet, indique-t-il. Tous les participants se sont montrés plutôt optimistes, même s'il sera dur de rattraper les pertes de juin ». Et Régis Aubenas ajoute : « Il faut laisser venir Bergeron**, qui n'est pas chargé et a de gros fruits. Les Pyrénées-Orientales ont eu du gel sur toutes les espèces fruitières. L'Italie et l'Espagne ne sont pas au maximum de leur production, elles non plus. Et cette dernière a fini de cueillir ses abricots. La dernière partie de la campagne est ouverte à la France. » Pour les pêches et nectarines - qui n'ont pas connu de problèmes de tenue des fruits - la difficulté actuelle, c'est la quantité. Pour elles aussi, davantage de volume est attendu après le 20 juillet. « Si la météo reste favorable, conclut Bruno Darnaud, la suite de la saison devrait bien se passer »...

Annie Laurie

* AOP : association d'organisation de producteurs.

** En Rhône-Alpes, premier bassin français d'abricots, Bergeron fournit toujours le gros du tonnage.

 

Sud-Drôme / Une fois de plus, les aléas climatiques ont frappé la production d'abricots des Baronnies et durement.
L'abricot des Baronnies amputé à 80 %
Dans les Baronnies, le manque d'abricots devrait avoisiner les 15 000 tonnes.
Gel, grêle, « les Baronnies ont tout eu », déplore Benoît Chauvin-Buthaud, conseiller spécialisé en arboriculture à la chambre d'agriculture de la Drôme, avant de préciser : « Sur ce secteur, la perte de production d'abricots dépasse les 80 % ». Et Franck Bec, le président du syndicat de valorisation de l'abricot des Baronnies, complète : « Soit 15 000 tonnes en moins. Et c'est la deuxième année consécutive de gel. En 2017, la perte était de 30 % globalement, avec des exploitations touchées à 100 %. Cette année, tous les producteurs sont concernés d'Arpavon à Saint-Auban-sur-l'Ouvèze en passant par Rosans, c'est-à-dire sur une zone correspondant à peu près à l'aire délimitée pour notre demande de reconnaissance en IGP* et au périmètre du PNR** des Baronnies provençales. »
La saison a commencé avec une semaine à dix jours d'avance sur une année normale car les arbres étaient peu chargés. Le gel a fortement réduit la production des variétés précoces (première quinzaine de juin). Sur les 20 % d'abricots restants, peu de premier choix. Les écarts de tri sont importants, notamment à cause de la grêle. En plus, les pluies ont abîmé l'épiderme des fruits. « A présent, nous avons du calibre et une qualité gustative excellente », signale Franck Bec. Cette semaine, débute la récolte des variétés Bergeron et Orangé de Provence (20 % du volume par rapport au potentiel de production).
Un plateau qui plaît (ou qui emballe)
Sur le plan commercial, « le marché a mis longtemps à démarrer ». Les pluies et le froid de juin n'ont pas favorisé la consommation. Conséquences : une offre supérieure à la demande, donc des cours bas. De meilleurs prix sont maintenant espérés avec la fin des récoltes plus au sud (dont le Gard), la chaleur et l'arrivée des touristes. Dans les Baronnies, la récolte se termine habituellement mi-août en altitude si les arbres sont chargés. Cette année, elle sera quasiment finie fin juillet.
Franck Bec met encore l'accent sur la démarche de reconnaissance en IGP et un plateau spécifiquement conçu pour l'abricot des Baronnies : « Nous avons des répercussions positives pour les fruits conditionnés dans cet emballage. Le problème, aujourd'hui, c'est que nous ne pouvons honorer les commandes, faute de produit ».
A. L.
* IGP : indication géographique protégée.
** PNR : parc naturel régional.

 

La France manque d'abricots et de pêches

Au plan national, en avril, l'AOP pêches et abricots de France annonçait un manque de production de 10 % pour les premières et de 20 % pour les seconds. « Au final, en abricots, le déficit de volume devrait être bien supérieur aux prévisions d'avril : - 30 à - 40 % en France et près de - 50 en Rhône-Alpes, estime son président, Bruno Darnaud. Et, en pêches-nectarines, il devrait être plus proche des 30 % que des 10. »