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Phytosanitaire

Glyphosate : « Il n'y aura pas de rupture brutale » selon Alice Thourot

A l'occasion d'une rencontre avec les syndicats drômois sur l'exploitation de Dorian Mathieu à Fauconnières, la députée de la deuxième circonscription de la Drôme, Alice Thourot, a porté la parole du gouvernement en annonçant un sursis de cinq ans pour l'interdiction du recours à l'herbicide.
Glyphosate : « Il n'y aura pas de rupture brutale » selon Alice Thourot

«Nous autres agriculteurs, nous ne sommes pas des râleurs mais nous tirons la sonnette d'alarme. Les élus doivent nous entendre, nous comprendre et nous aider à avancer. » C'est en ces termes que Céline Ferlay, secrétaire générale de la FDSEA, s'est adressée à la députée Alice Thourot lors d'une rencontre autour du glyphosate organisée sur l'exploitation de Dorian Mathieu, le vendredi 20 octobre. Message compris. La parlementaire a dit vouloir « travailler avec les agriculteurs ».

La fin du labour

Dorian Mathieu a repris l'entreprise familiale en 2002. Depuis 2004, il emploie du glyphosate, herbicide devenu incontournable sur son exploitation d'agriculture de conservation de 120 hectares. « J'y ai cru à fond ! », a-t-il confié puisque l'agronome Dominique Soltner jugeait cet herbicide inoffensif et préconisait son usage. Aujourd'hui, comme tant d'autres, il souhaiterait se passer du glyphosate mais se dit abandonné des pouvoirs publics : « Nous sommes livrés à nous-mêmes, sans aides, dans une région avec beaucoup de sécheresse et une quasi-absence de gel. Sans le recours à cet herbicide performant, la facture en gazole s'envolera... La Drôme est le département le plus infecté par l'ambroisie. Cette prolifération pose un problème de santé publique qui nous empêche aussi d'abandonner l'herbicide. La fin du glyphosate est donc prématurée. »

Pas d'interdiction dans l'immédiat

« Vous ne pouvez pas vous en passer », a compris la députée. C'est pourquoi « le gouvernement ne procédera pas à une rupture brutale. L'arrêt du glyphosate ne sera pas envisagé avant cinq ans », a-t-elle annoncé, laissant ainsi le temps aux chercheurs de proposer un produit de substitution tout aussi efficace. Mais à quel coût ? Et qui paie les expérimentations ? Alice Thourot a évoqué une étude de terrain, pilotée par Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire : « Elle devrait permettre de trouver des solutions. Le glyphosate est présent dans 50 % des produits de consommation, il faut changer les choses ». Ce à quoi Sébastien Richaud, président de Jeunes Agriculteurs de la Drôme , a répondu qu'il y a différentes façons de s'en servir : « Les agriculteurs limitent le plus possible le recours au glyphosate, ainsi qu'aux fongicides. L'agriculture a évolué, il faut en tenir compte ». Dorian Mathieu a volontiers confirmé qu'il n'utilise le glyphosate qu'avant le semis.

« Nous n'avons pas les mêmes armes »

Les agriculteurs réunis se sont interrogés également sur les produits venus de pays tiers où les législations diffèrent. L'accord commercial du Ceta ne favorise-t-il pas une distorsion de la concurrence au détriment des entreprises agricoles françaises ? La grande distribution ne va-t-elle pas préférer des produits importés, moins chers, dopés au glyphosate ? « Soit le produit est dangereux pour tout le monde, estime la parlementaire, soit il doit être autorisé pour tous ». Et de s'inquiéter, à titre personnel, de la santé des producteurs : « Vous êtes en première ligne, au début de la chaîne ».
Depuis cette rencontre, les débats autour du glyphosate se sont poursuivis. Et le 23 octobre, le parlement européen a adopté une résolution demandant une interdiction progressive du glyphosate en cinq ans. Ce texte n'a cependant pas de valeur contraignante. De son côté, la Commission européenne a proposé le même jour de prolonger la licence du glyphosate jusqu'à sept ans. Les Etats membres devaient eux se prononcer le 25 octobre. 
Angelo Tedesco / C. L.