Accès au contenu
Temps d'échange

Grand débat au Valentin avec le ministre de l'Agriculture

Le 8 mars, le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation est revenu au lycée agricole du Valentin, à Bourg-lès-Valence. Pour deux heures de débat avec des lycéens, étudiants, stagiaires et apprentis.
Grand débat au Valentin avec le ministre de l'Agriculture

Le 8 mars, le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, Didier Guillaume, a passé la matinée au lycée agricole du Valentin à débattre avec des apprenants. « C'est un honneur », a dit le proviseur de l'établissement, Maurice Chalayer, et « une réelle opportunité » pour les 80 lycéens, étudiants, stagiaires et apprentis « volontaires » pour participer à cet échange avec le ministre animé par quatre d'entre eux. Ils lui ont posé une floppée de questions et donné leur sentiment sur plusieurs sujets. Ainsi ont-ils pu apporter leur contribution au « Grand débat national ». Assistaient à ce moment de partage le préfet Hugues Mouthou, le directeur de la Draaf, Michel Sinoir, le président de la chambre d'agriculture, Jean-Pierre Royannez, le président du conseil d'administration du lycée, Régis Aubenas, le président du centre CFPPA du Valentin, Paul Despesse, des élus...

Accueil du ministre à son arrivée au Valentin.

« Former plus, mieux et partout »

 

Le débat s'est ouvert sur le parcours de formation, les perspectives d'orientation. Plusieurs élèves se sont exprimés sur la réforme du Bac, Parcoursup, l'intérêt de l'enseignement agricole et les passerelles qu'il offre... En ce domaine, « former plus, mieux et partout » sont les objectifs du ministre. Plus, c'est 200 000 élèves dans deux ans. Mieux, c'est l'engagement prochainement d'un « grand chantier de rénovation de la formation, notamment sur la base essentielle qu'est l'agroécologie ». Le constat du ministre sur Parcoursup : par rapport au système précédent, globalement autant de jeunes ont trouvé une orientation. Au Valentin, c'est le cas de tous les élèves, selon son proviseur, qui a cependant délivré un message : « ne faire qu'un vœu est une erreur ». La réforme du Bac « a été faite pour une meilleure formation générale et, après, choisir son option », a ajouté Didier Guillaume.

Le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, Didier Guillaume, entouré du proviseur du lycée agricole du Valentin, Maurice Chalayer, et du nouveau préfet, Hugues Mouthou.

« L'agriculture doit muter »

L'échange s'est poursuivi sur différents sujets touchant l'agriculture : réforme de la Pac, foncier et installation, production, bio, produits phytosanitaires, semences paysannes, recherche, distribution des produits alimentaires, circuits courts, traçabilité, traités de libre-échange, lobbies, revenu des agriculteurs, climat et environnement, réforme de la Pac, agribashing...
« Mon objectif, a expliqué le ministre, c'est que les Français aient l'alimentation la plus sûre, saine, durable, tracée et sécurisée. » Il s'est dit être un militant de la transition agroécologique et du bio. La transition agroécologique, il en a « fait l'alpha et l'oméga de la politique du ministère de l'Agriculture ». Mais il ne montre pas du doigt les agriculteurs car, au XXe siècle, on leur a demandé de produire pour nourrir la population. Il prône de passer, à présent, « du quantitatif du XXe siècle au qualitatif du XXIe siècle », de sortir de la dépendance des produits phytosanitaires. Il considère que « l'agriculture doit muter, il faut changer de modèle. Aujourd'hui, la biodiversité est un problème crucial ». La transition agroécologique est « irréversible mais doit se faire à un rythme permettant de maintenir une agriculture compétitive pour assurer la souveraineté alimentaire ». Et plus il y aura d'élèves formés à l'agroécologie, plus elle sera pratiquée. Quant à la recherche, elle doit être boostée pour trouver des alternatives. Et là, l'Inra a son rôle à jouer.

 80 lycéens, étudiants, stagiaires et apprentis du Valentin ont participé à cet échange avec le ministre animé par quatre d'entre eux. 

La guerre des prix

Pour le ministre, l'agriculture doit en outre enclencher une transition économique, sociale et sanitaire. Economique pour que les agriculteurs puissent vivre de leur métier. « Il faut inverser la construction du prix, partir des coûts de production validés par les interprofessions. C'est la guerre que nous menons aujourd'hui, sinon la grande distribution continuera à s'enrichir et à appauvrir les paysans. Elle n'a pas à faire 30 à 40 % de marge sur les produits agricoles. Et ce n'est pas aux consommateurs de payer plus mais à ceux qui font des profits : industriels, grandes surfaces ». La transition sociale, c'est notamment le remplacement des agricultrices pour congés maternité. Les retraites agricoles en dessous du minimum vieillesse sont un autre « chantier » car « cela ne peut continuer ».

Pac, foncier, agribashing

Photo souvenir : le ministre entouré des participants à ce grand débat.


 Le ministre s'entretenant avec des élèves du Valentin à l'issue du débat.

Côté rémunération, le ministre a constaté que 35 % des agriculteurs français perçoivent davantage d'aides que de revenu. La loi Egalim vise une meilleure répartition de la valeur. Il considère cependant les aides directes de la Pac « indispensables » (9,7 milliards d'euros distribués en France) tant que les agriculteurs n'ont pas assez de revenu. Mais « il faut mieux les répartir et faire entrer l'agroécologie dans la réforme de la Pac ».
Quant au foncier, son prix, l'agrandissement d'exploitations, l'artificialisation des sols freinent les installations agricoles. « Il est essentiel d'avancer, a noté Didier Guillaume. La loi foncière sur laquelle nous allons travailler à partir de ce printemps, c'est exactement cela ». Enfin, à une étudiante s'insurgeant contre l'agression d'un agriculteur traitant un champ, il a répondu : « C'est insupportable. Je dis stop. Je veux être le bouclier de l'agribashing ».
A la sortie de ce débat, jugé intéressant côté apprenants du Valentin, Didier Guillaume s'est déclaré « enthousiaste ». D'ailleurs, avant de prendre la route pour se rendre au congrès de la FDSEA à Buis-lès-Baronnies (lire l'article sur ce congrès), il a confié à des élèves : « Cela fait plaisir d'entendre des jeunes qui font des propositions, se rebellent. Je m'enrichis de ce que vous dites ».

Annie Laurie

 

Des jeunes qui donnent de leur temps

Un élève a remis au ministre un plant de fleur produit in vitro dans le cadre d'une action humanitaire.
Lors du débat avec le ministre de l'Agriculture, des jeunes du lycée du Valentin ont témoigné de leur engagement citoyen au sein de l'établissement ou en dehors. Et ce, à travers la vie associative sportive, culturelle, des actions de solidarité (handisport, Secours populaire, Banque alimentaire), en faveur du développement durable, de la biodiversité, des opérations de nettoyage de la nature... Par exemple, des élèves sont investis dans un projet de plantation d'arbres au Burkina Faso pour contrer l'avancée du désert. Ils ont produit in vitro des plants de fleurs, vendus cinq euros le 9 mars à la journée portes ouvertes du lycée, prix correspondant à la plantation d'un arbre au Burkina Faso. Ils en ont d'ailleurs remis un au ministre, qu'il a voulu payer.
« On peut être optimistes pour notre pays quand on voit la pêche qu'ont les jeunes de ce lycée ou ailleurs, s'est réjoui Didier Guillaume. Cela me fait chaud au cœur. L'engagement associatif est indispensable. Chaque jeune a une éducation gratuite. Je pense que donner un peu de son temps à la société devrait être obligatoire. »
A. L.