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SANITAIRE

Homéopathie : des éleveurs, des vaches et des granules !

Il existe aujourd'hui près de 2 000 remèdes homéopathiques dont environ 600 sont régulièrement prescrits. Avant de se lancer, il est important de connaître les bases et de savoir manipuler les outils de l'homéopathe : le répertoire et la matière médicale. Hubert Hiron, vétérinaire au sein du GIE Zone Verte1 et éleveur caprin, initie les agriculteurs bio à l'homéopathie. Ses conseils.
Homéopathie : des éleveurs, des vaches et des granules !

L'homéopathie est un outil pour soigner ses animaux mais il est important de travailler en amont sur l'environnement global du cheptel (lieu, bâtiments, gestion globale du troupeau, alimentation, minéralisation, écosystèmes microbiens). L'homéopathie doit être là juste pour redresser les déséquilibres du troupeau ou des individus mais ne doit pas être utilisée n'importe comment. Elle s'adresse aussi bien aux problèmes aigus que chroniques. L'homéopathie est informationnelle, il n'y a pas de résidus dans le lait ou la viande, et donc pas de délai d'attente. Elle a également un coût très faible. Les remèdes homéopathiques sont créés à partir de différentes matières : végétales comme la belladone, staphisaigre (l'herbe aux poux), douce-amère ; minérales comme le sel, le phosphate de calcium ou encore l'arsenic ; animales comme des venins, des scarabées, les laits ; ou issues de maladies comme des excrétions bio-pathologiques. Des remèdes sont aussi créés à partir de rayons x, d'ultrasons ou de chocolat !

L'observation : la base de l'homéopathie

Lors de l'observation, il faut faire attention aux comportements inhabituels ou caractéristiques : « pourquoi cette vache est couchée en plein courant d'air alors que d'habitude elle les fuit ? » ou « celle-ci reste à l'écart du troupeau alors qu'elle arrive toujours la première en salle de traite en temps normal ». Il faut aussi faire attention aux comportements étonnants : « cet animal a une forte fièvre et pourtant mange énormément » ou « tel animal passe la journée la tête au-dessus de l'abreuvoir mais le niveau d'eau ne bouge pas ». Tous ces signes sont dits « symptômes rares, bizarres et curieux ». Ils sont très importants en homéopathie. Ils permettent d'individualiser le malade : ce qui fait qu'il est « unique » en son genre et de trouver le remède correspondant à sa singularité. Après la phase d'observation, il faut organiser les symptômes afin de les répertorier pour déterminer le remède correspondant. Les symptômes sont classés en cinq catégories :
- l'étiologie : la cause, l'origine du dérèglement. La suite d'un coup de froid, d'une peur... ;
- le mental : le comportement, les habitudes, les désirs de compagnie, de solitude ;
- les symptômes généraux : fièvre, faim, soif, sensibilités particulières ;
- les modalités : le malade est amélioré/aggravé par le froid, le chaud, l'humidité ;
- le physique localisé : l'écrasement de la tétine, le gonflement du quartier, le nez froid.
Une bonne observation associée à une bonne méthode permet d'aller rechercher dans le répertoire les remèdes possibles couvrant le tableau clinique observé, puis de choisir celui qui semble correspondre le mieux.

Lise Fabries, animatrice du groupement Bio15 avec Hubert Hiron, vétérinaire au sein du collectif Zone Verte1.

1 Zone Verte est un groupement fondé par des vétérinaires ruraux en 2002. Il regroupe désormais des vétérinaires et autres spécialistes pour une approche globale de l'élevage et de ses problématiques.

 

L’homéopathie est née  il y a deux siècles 
Samuel Hahnemann (1755-1843), un médecin allemand, est le fondateur de l’homéopathie. Il a étudié à l’Académie de médecine de Vienne. Au cours de sa carrière, il a construit par l’expérience quotidienne et conceptualisé l’homéopathie. Il a rédigé « L’organon ou l’art de guérir », son testament thérapeutique. Il a également formé de nombreux médecins qui ont poursuivi son travail expérimental et créé de nouveaux remèdes homéopathiques. Il a travaillé sur l’étude de la plus petite dose qui soigne la maladie et a inventé les dilutions dynamisations « Hahnemanniennes ». Parmi ses successeurs, JT Kent a créé le répertoire dont on utilise encore aujourd’hui le modèle, outil commun à tous les homéopathes. 

 

Témoignage / Franck Jaulhac, associé au Gaec d’Incavanac à Vitrac (Cantal), élève 60 vaches laitières en bio sur une SAU de 75 ha de prairies, méteils et maïs avec un pâturage tournant dynamique. Lors de sa conversion bio en 2016, il a souhaité réduire les traitements allopathiques sur ses animaux. Il témoigne.

“ J’ai essayé, j’ai testé et ça a marché ”

«Mon troupeau n’avait pas de problème particulier mais la conversion bio a été l’occasion de me former, d’essayer de nouvelles choses pour être cohérent avec mon nouveau projet ! Au départ, je n’étais pas convaincu par l’homéopathie. Je suis plutôt, ‘‘je crois ce que je vois’’.  Je n’avais jamais voulu essayer tout seul. J’ai donc fait une formation d’initiation de deux journées. Cela m’a permis de comprendre le principe, le fonctionnement de l’homéopathie. J’ai pu ainsi démarrer avec de bonnes bases. En arrivant chez moi, j’ai essayé, j’ai testé et ça a marché … Mais, je me suis trompé aussi !  Voici le cas de Jeannette, qui fait partie de mes premiers succès ! Elle a fait son premier vêlage à 24 mois, un peu frêle mais c’est une bonne laitière. Elle reste dans le troupeau, toujours dans le milieu, lors des déplacements, au moment de la traite ou dans le bâtiment. Un matin, je la trouve à l’écart, couchée dans sa logette. Elle n’a pas de fièvre, elle a les oreilles basses, elle n’a pas l’air très bien. Elle passe à la traite la dernière ! Je reviens la voir à midi, elle est toujours pareille. Le soir, elle est couchée et a beaucoup de mal à se lever. Elle a des crampes, elle tremble, elle a 40° de fièvre et fait une diarrhée très claire. Elle est prise au niveau des bronches et boit de toutes petites gorgées. Je pense qu’elle me fait une bonne grippe ! Je l’observe de nouveau et je me rends compte qu’elle envoie des coups de pied quand j’essaye de lui toucher le pis. Elle est craintive, elle a peur d’avoir mal. Suite à toutes ces observations, je décide de lui donner Dulcamara. Le lendemain matin, elle est au milieu des autres et tout va bien. Le fait d’appliquer ce que j’ai vu en formation m’a convaincu car j’ai eu des résultats. Dès le départ, je suis parti sur de bonnes bases. Je ne voulais pas attaquer avant car j’avais peur de prendre de mauvaises habitudes. Maintenant, lors d’un échec, je ne me dis plus ‘‘ça ne marche pas ‘‘  mais je me dis ‘‘ je me suis trompé’’  et je continue à chercher. Il m’arrive régulièrement de ne pas trouver le remède, du coup je soigne en allopathie. Mais je souhaite persévérer dans cette méthode. »