Jaillance : une année noire mais des atouts pour rebondir

Une année « à marquer d'une pierre noire », ont dit de 2017 le président et le directeur général de la Cave de Die Jaillance, Oliver Rey et Jean-Louis Bergès, en assemblée générale le 19 avril à Die. La campagne viticole a été « atypique et catastrophique » en termes de rendements, a constaté le premier. Les gelées noires du 21 et 22 avril (températures frôlant - 5°C) ont anéanti la moitié de la récolte et plus sur certains secteurs. Faible en quantité, la vendange a cependant été de qualité. Heureusement, les stocks donnent la possibilité de fournir les clients.
Les coups de la concurrence
De surcroît, l'année a été compliquée sur le plan concurrentiel et financier. « La concurrence étrangère continue à assener ses coups de bâton », a constaté le directeur général. Les vins effervescents étrangers ont à nouveau progressé (+ 17 % en volume) sur le marché français tandis que les AOC de notre pays ont évolué à la baisse (- 3 %), sauf les crémants de Loire et de Bordeaux. Le directeur général a noté à propos de la clairette de Die rosé : « Nos confrères de Cerdon se trompent d'ennemi ».
Des satisfactions
Si la clairette de Die a reculé de 5 % sur le marché national (- 300 000 bouteilles), la marque Jaillance a « plutôt bien résisté » (augmentation de sa part de 1,5 %). Elle est devenue la première marque en crémant de Bordeaux sur le marché national. Autre satisfaction, la part de la production biologique a progressé de 19 %. Et la clairette de Die rosé (lancée en juin 2017) a été « un succès, avec un référencement dans toutes les enseignes françaises et des ventes conformes aux prévisions, a indiqué le directeur général. En six mois, elle a réalisé une performance remarquable ». Sauf que le 12 janvier 2018, suite à l'opposition de l'AOC Bugey Cerdon, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêté autorisant sa production. « J'espère que nous pourrons continuer ce produit », a commenté le directeur général. Autre lancement en 2017, le Muséobulles, nouveau circuit de visite de la Cave de Die Jaillance, a contribué à l'augmentation de la fréquentation et à un record de ventes au caveau.
Du positif aussi dans la filiale Brouette, à Bordeaux, avec un chiffre d'affaires en croissance de plus de 10 %. Jusque-là, le groupe Jaillance était présent sur deux marchés principaux : la clairette et le crémant de Die ; le crémant de Bordeaux, qui représentent 18 % du marché français. En outre, le groupe a pris une participation dans une société de la Loire, SVS PE en 2017. « Grâce à cette acquisition, a précisé le directeur général, nous pourrons accéder à de nouveaux marchés et conforter notre groupe comme opérateur majeur. »
Un résultat financier négatif
Sur son exercice 2017, la Cave de Die Jaillance a enregistré une perte de 229 000 euros. « Elle n'est pas habituée à présenter des résultats de ce niveau », a confié son président, avant d'en donner les raisons : baisse des ventes fin 2017, ratio volume de récolte/charges fixes, soutien aux viticulteurs victimes du gel. En effet, la coopérative a décidé d'aider ceux le plus touchés par cet aléa avec une subvention exceptionnelle pour la pérennité des exploitations, d'un montant total de 651 500 euros. Ainsi, ils ont été rémunérés à hauteur de 32 hectolitres par hectare en vins effervescents et 26 hectolitres en vins tranquilles. Olivier Rey a aussi remercié les adhérents ayant souscrit à l'assurance climatique cette année, pour la couverture d'environ 850 hectares en tout. « Un contrat attractif proposé par Groupama », a-t-il indiqué. Il a encore observé : « Seule une organisation coopérative basée sur des valeurs de solidarité et de confiance permet de supporter ce type de situation ». Et de s'inquiéter « quant aux intentions de décideurs politiques qui voudraient mettre à mal le statut de coopérative, notamment en ne reconnaissant plus la spécificité de ce modèle, qui est le prolongement des exploitations ».
Pour retrouver de la capacité d'autofinancement, Jaillance va ralentir ses investissements cette année. Mais « le groupe poursuivra son plan stratégique, a assuré le directeur général, citant notamment « un effervescent rosé qui s'appellera ou pas clairette de Die, le lancement d'une clairette vegan, d'un crémant de Bordeaux bio... Il consolidera sa diversification en lançant dès 2018 sa gamme de produits de la Loire. [...] Depuis début 2018, les ventes ont progressé de 28 % en cumulé. Tous les départements commerciaux sont en hausse, sauf le caveau. » Si cette tendance se maintient, « nous devrions renouer avec de bons résultats cette année », a-t-il ajouté.
Une solidarité saluée
A cette assemblée, la présidente de la chambre d'agriculture, Anne-Claire Vial, a salué le dynamisme de la Cave de Die Jaillance et souligné le partenariat en conseil technique liant les deux structures. Et elle a dit : « Vous avez su être résiliants et solidaires. Je vous souhaite de continuer avec sagesse et vision des intérêts du Diois ». La conseillère départementale Martine Charmet a mis l'accent sur la contribution de la Cave de Die Jaillance au rayonnement de la Drôme et sa solidarité envers les adhérents touchés par le gel. Et sur le dossier de la Clairette de Die rosé, elle a assuré : « Nous restons mobilisés à vos côtés ». Enfin, à ce sujet, le maire de Die, Gilbert Trémolet, a espéré que « la raison l'emportera », tout en mettant en avant « la saine gestion » de Jaillance. A cette assemblée encore, Nathalie Ollat, de l'Inra de Bordeaux, est intervenue sur le changement climatique et les défis qu'il représente pour la viticulture.
Annie Laurie
Repères 2017

201 adhérents.
43 salariés en CDI.
1 124 ha dont 78 % en cépage muscat et 20 % en clairette.
23 % de la surface en bio.
32 230 hl entrés (66 850 en 2016).
29 hl/ha de rendement moyen sur la totalité de la surface (rendement de référence : 60).
20,9 millions d'euros de chiffre d'affaires (- 5,6 %)
Stock de vins : 21 millions d'euros (- 16 %).
Résultat net : - 229 000 euros.Groupe Jaillance :
92 salariés.
Chiffre d'affaires : 32 millions d'euros (- 3 %).
Stocks : 30,9 millions d'euros (- 3 %).
Résultat net : - 68 000 euros.