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Environnement

L’agriculture, gardienne  de la biodiversité 

Alors que le monde agricole s’engage petit à petit dans la transition écologique, quantité de structures cherchent à conseiller les agriculteurs sur la manière de favoriser la biodiversité sur leurs exploitations.

L’agriculture, gardienne  de la biodiversité 
En partenariat avec la FDO de la Drôme, le syndicat de la Clairette de Die et des vins du Diois a étudié l’impact du pâturage dans les vignes par les brebis, en tenant compte des effets des traitements phytosanitaires sur la santé animale.

Tissu vivant de la planète, la biodiversité est au cœur des enjeux internationaux ces dernières années. Elle a d’ailleurs fait l’objet d’un sommet international le 11 janvier dernier.
Dans la Drôme, il s’agit d’un sujet de longue date. « C’est une thématique forte sur laquelle nous travaillons depuis 2011 de manière transversale à la plateforme des techniques alternatives et biologiques (Tab), souligne Florian Boulisset, chargé de projet. A travers différentes expérimentations, nous avons mis en place des aménagements favorables à la biodiversité, avec la création de haies, de mares, de nichoirs pour les rapaces ou mésanges, de gîtes pour les chauves-souris mais aussi des bandes enherbées, etc. L’idée est d’essayer de favoriser au maximum la biodiversité pour observer les bénéfices sur les cultures et notamment pour améliorer la gestion des bioagresseurs. » A travers ces essais réalisés à Etoile-sur-Rhône, se posent aussi des questions technico-économiques : « Pour les plantations de haies par exemple, il est intéressant d’avoir des références, en termes d’efficacité des essences d’arbres, de coût des modes de paillage ou des nichoirs, etc ». Des analyses textuelles et des éléments chiffrés qui sont ensuite mis à disposition des agriculteurs.
Pilote de la plateforme Tab, la chambre d’agriculture de la Drôme propose aussi plusieurs formations : découverte des aménagements favorables à la biodiversité, réflexion autour de plantation de haies (choix des essences, type de paillage, mise en place, etc.), construction de nichoirs. « Beaucoup d’agriculteurs se posent des questions vis-à-vis de la biodiversité, en particulier sur l’implantation de haies », note Aline Buffat, conseillère biodiversité et agroforesterie à la chambre d’agriculture. « Les haies présentent de nombreux atouts. Elles favorisent les auxiliaires, apportent un effet brise-vent aux cultures. Elles facilitent aussi les ententes avec les riverains, en limitant la dérive des produits phytosanitaires. En revanche, il est possible qu’elles soient également favorables à certains ravageurs. C’est pourquoi il faut orienter la biodiversité vers des espèces bénéfiques aux cultures », ajoute le chargé de projet de la plateforme Tab.

Des accompagnements spécifiques

« Nous proposons un accompagnement individuel, durant lequel est réalisé un diagnostic de l’exploitation agricole », poursuit la conseillère. Par ailleurs, la chambre d’agriculture est sollicitée pour participer à des projets comme celui lancé par le parc naturel régional (PNR) du Vercors en mars 2020. Multipartenarial, le projet « Clairette de Die et biodiversité » s’étend sur 40 hectares, soit 25 % du vignoble. 800 nichoirs à oiseaux et chauves-souris ont été installés sur huit exploitations situées à Monclar-sur-Gervanne, Suze et Beaufort-sur-Gervanne. Grâce à un système de géolocalisation, la dynamique d’occupation des populations d’oiseaux sera suivie jusqu’à l’automne 2022.
« Nous avons aussi planté 400 mètres linéaire de haies et 40 arbres isolés (mûriers, amandiers…) dans le but de recréer des espaces bénéfiques à la biodiversité, déclare Fabien Lombard, ancien président du syndicat de la Clairette de Die et des vins du Diois. Des suivis de populations des cicadelles de la vigne sont réalisés pour évaluer l’impact des auxiliaires de culture dans la lutte contre les maladies. » Par ailleurs, le syndicat s’est inscrit dans un plan agroenvironnemental et climatique (PAEC) visant à « diminuer l’utilisation des produits phytosanitaires et à adopter des pratiques plus respectueuses de l’environnement », souligne Franck Monge, le nouveau président. Une vingtaine de viticulteurs s’est engagée dans cette démarche, sur près de 300 hectares. « Une dynamique commune s’est créée avec l’envie de travailler sur des matières plus propres et sur la préservation de la biodiversité », ajoute-t-il. Auparavant, le syndicat s’était déjà concentré sur le sujet, en collaboration avec la fédération départementale ovine (FDO) de la Drôme et la communauté de communes du Val de Drôme. Les essais, réalisés en 2017-2018, visaient à étudier l’impact du pâturage dans les vignes par les brebis. « L’enjeu était de démontrer les effets des traitements phytosanitaires, et notamment celui du cuivre utilisé dans notre vignoble, sur la santé animale », explique Fabien Lombard. Avec l’appui technique du FiBL (institut de recherche de l’agriculture biologique fondé en Suisse), les analyses ont montré qu’en cas de pâturage raisonné, le taux de cuivre présent dans les cultures ne présentait aucun risque pour les troupeaux. Les pratiques se développent donc peu à peu dans le vignoble de la Clairette.

Le projet « Clairette de Die et biodiversité » a permis d’installer 800 nichoirs à oiseaux et chauves-souris sur trois communes de la vallée de la Gervanne. 

Agriculture et faune sauvage, duo gagnant

Dans les Baronnies aussi, le sujet de la biodiversité est abordé. En février 2020, agriculteurs et retraités ont participé à un atelier de construction de nichoirs, organisé par le PNR des Baronnies provençales. Depuis, 350 nichoirs ont été répartis dans des exploitations oléicoles, avec comme objectif de recréer des agrosystèmes complexes dans lesquels les oiseaux et chauves-souris sont favorisés.

Amandine Priolet

Création d’un observatoire de la biodiversité

Les collectivités territoriales s’emparent également du sujet de la biodiversité. Au sein de Valence Romans Agglo (VRA), les projets en faveur de la biodiversité affluent. La communauté d’agglomération s’est rapprochée du PNR du Vercors et de la LPO pour créer respectivement un atlas et un observatoire de la biodiversité. L’idée est d’améliorer les connaissances sur la faune et la flore et d’impliquer les citoyens dans la préservation du patrimoine naturel. Par ailleurs, VRA s’est engagée sur un plan de restauration des fonctionnalités de la zone humide de La Véore à Beaumont-lès-Valence et Montéléger. Si l’agriculture est aujourd’hui dominante, les difficultés d’exploitation sur certaines parcelles très humides sont réelles. Un travail va être engagé avec les agriculteurs locaux pour évaluer les besoins en herbe et convertir certaines parcelles en prairies humides. Sur le même thème, elle a lancé un appel pour 2021. Celui-ci vise à réunir 100 projets agricoles pouvant bénéficier des paiements pour services environnementaux (inscription jusqu’au 25 février). Sur un territoire à fort enjeu pour l’eau et la biodiversité, VRA encourage les agriculteurs à mettre en place des pratiques favorables à l’environnement : biodiversité, préservation de la ressource en eau, diversification des rotations ou limitation des intrants. En ce sens, les projets peuvent être nombreux : création ou maintien de haies, bosquets, ripisylves ou mares, utilisation de techniques alternatives au désherbage chimique... 
Amandine Priolet
Contact : Valence Romans Agglo. Tél : 07 62 98 92 47 ou 07 62 55 13 57.

Des bénévoles à l’œuvre près de Montélimar 

Des bénévoles à l’œuvre près de Montélimar 
L’association L’Hirondelle aux champs (La Bégude-de-Mazenc) accompagne les agriculteurs pour mener à bien des projets en faveur de la biodiversité : pose de perchoirs, de nichoirs ou de gîtes à chauves-souris, plantation de haies… © L’Hirondelle aux champs


Près de Montélimar, une association s’est également emparée du sujet : L’Hirondelle aux champs. Soutenue par deux agriculteurs, Emmanuel Exter et Sabine Couvent, elle a vu le jour en 2013 à La Bégude-de-Mazenc, avec la volonté première de promouvoir la préservation et la restauration de la biodiversité en milieux agricoles. « Je combine mes deux compétences, agricole et connaissance de la faune sauvage, pour proposer des diagnostics biodiversité aux agriculteurs des secteurs de Montélimar, Marsanne, Dieulefit et Bourdeaux », note Sabine Couvent, agricultrice et ancienne naturaliste à la LPO. Un diagnostic gratuit qui vise avant tout à caractériser les éléments structurants des fermes, présents ou absents, afin de proposer un accompagnement spécifique en fonction des problématiques de l’agriculteur et de ses cultures. Avec l’investissement humain d’une vingtaine de bénévoles, l’association réalise ainsi divers travaux (plantation d’arbres, création de mares, pose de caméras pièges, etc.) sur les exploitations du secteur, grâce au soutien financier de plusieurs mécènes. « Nous sommes des créateurs de vie. Mais l’important est de toujours s’adapter aux enjeux agricoles », souffle la jeune femme.