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Expérimentation

L'agroforesterie testée sur la plateforme Tab

L'impact de l'agroforesterie sur les bioagresseurs (maladies, ravageurs, adventices) est étudié sur la plateforme des techniques alternatives et biologiques (Tab), à Etoile-sur-Rhône, avec une association grandes cultures-pêchers.
L'agroforesterie testée sur la plateforme Tab

 

Dans la plateforme Tab (20 hectares dont 15 en agriculture biologique et le reste en faibles intrants), un système inspiré de l'agroforesterie est en place depuis 2013 sur trois hectares en agriculture biologique. Il est ainsi construit : quatre planches composées chacune de trois rangs de pêchers et, entre, des cultures de soja, maïs semence, féverole, colza, blé tendre.

Une approche système

Le système agroforestier vu du ciel (juin 2015).

 

 

« C'est une approche système, avec une association de cultures, une rotation (sur cinq ans), des aménagements pour la biodiversité, des techniques et des pratiques combinées pour mettre toutes les chances de réussite de notre côté », a souligné Laurie Castel, chef de projet expérimentations plateforme Tab à la chambre d'agriculture, le 7 juin en ouverture d'une visite consacrée à ce système et à la biodiversité. Les grandes cultures sont suivies par Arvalis-Institut du végétal et Terres Inovia(1), les pêchers par la Sefra(2) et le CTIFL(3), la biodiversité par la LPO(4) Drôme. Le tout est coordonné par la chambre d'agriculture.
Une telle association de cultures peut-elle limiter la prolifération des bioagresseurs (maladies ravageurs, adventices), favoriser l'activité des auxiliaires et améliorer la productivité du système ? « Cette expérimentation consiste à étudier les interactions entre cultures », a indiqué Laurie Castel.

Des pêchers...

Le système agroforesterie de la plateforme Tab associe pêchers, soja, maïs semence, féverole, colza, blé tendre, haies, bandes enherbées et gîtes pour oiseaux.

Plutôt que des abricotiers, ont été choisis des pêchers « car ils ont besoin de davantage de traitements, a expliqué Yannick Montrognon, technicien chargé du programme pêches et nectarines à la Sefra. Nous cherchons à savoir si, en "diluant" les pêchers dans l'espace et favorisant les auxiliaires, une moins forte pression des ravageurs et maladies peut être espérée ». Le choix s'est porté sur une variété peu sensible aux maladies de conservation, plutôt qu'à la cloque. Or, et ce n'était pas connu au moment de la prise de décision, elle se révèle très sensible à la cloque. Pas de chance, donc. Les pêchers étant traités (au cuivre et soufre car en bio), il n'était pas pertinent d'implanter de cultures au-dessous. Aussi, le sol est enherbé. L'une des contraintes est le volume à produire car ces pêches sont vendues en circuit long (prix moins élevé qu'en circuit court). En 2015, première année de production, le volume de pêches a été satisfaisant. Par contre, en raison du gel puis de la grêle, toute la récolte 2016 a été perdue. « En pêche, la cloque et les maladies de conservation sont deux problématiques importantes, a constaté Yannick Montrognon. Arriver à produire en bio est très difficile. Dans ce système, par rapport à notre témoin, nous n'avons pas pu réduire suffisamment l'utilisation du cuivre et du soufre. »

... et des grandes cultures

Pendant la visite du système inspiré de l'agroforesterie (de droite à gauche) : Laurie Castel, chef de projet expérimentations plateforme Tab à la chambre d'agriculture, Yannick Montrognon, technicien chargé du programme pêches et nectarines à la Sefra, et  Thibaut Ray, ingénieur régional Arvalis-Institut du végétal.

Côté grandes cultures, « nous avons construit une rotation pertinente sur le plan agronomique (alternance de familles, introduction de légumineuses) mais aussi économique (productions plutôt rentables), a noté Laurie Castel. Nous avons également vérifié l'absence de maladies et ravageurs communs avec les pêchers ». Thibaut Ray, ingénieur régional Arvalis, a complété : « L'idée, c'est d'avoir un système productif nécessitant un minimum d'interventions. Nous avons choisi des cultures assez classiques, que nous maîtrisons bien, et les variétés les plus tolérantes aux maladies. La fertilisation (farine de plumes seule ou mélangée avec des fientes de volailles) et l'irrigation (pilotée avec des sondes tensiométriques et bilans hydriques) sont gérées à l'optimum. Tout est désherbé mécaniquement (à la herse étrille ou la bineuse). Au sein des parcelles, sur des zones de prélèvement, nous mesurons les composantes de rendement. Les récoltes sont correctes. Aujourd'hui, nous cherchons à évaluer l'influence sur les rendements des effets nord-sud, entre les haies coupe-vent, et latéraux, entre les pêchers et les grandes cultures. Les mesurer prendra plusieurs années. Pour le moment, nous observons des effets très annuels, liés aux choix variétaux, aux maladies... Mais nous n'avons pas encore réussi à caractériser les interactions, si elles existent ». Et Laurie Castel d'ajouter : « Il faut du temps, on est au démarrage de l'expérimentation. »

Annie Laurie

(1) Terres Inovia : institut technique des producteurs d'oléagineux, de protéagineux, de chanvre et de leurs filières (ex-Cetiom).
(2) Sefra : station d'expérimentation fruits Rhône-Alpes.
(3) CTIFL : centre technique interprofessionnel des fruits et légumes.
(4) LPO : Ligue pour la protection des oiseaux.

 

D'autres prototypes agroforestiers imaginés /

Pour la plateforme Tab, d'autres prototypes de systèmes d'agroforesterie ont été imaginés mais n'ont pas été mis en place. S'ils l'étaient, ils pourraient encore évoluer. L'un d'eux est composé uniquement de cultures pérennes, avec une ligne de chacune des espèces suivantes : abricotiers, plantes aromatiques (romarin, thym), poiriers, vigne et arbres de haut jet. Cet espace serait mécanisable mais non traité, pour favoriser l'activité des auxiliaires. L'irrigation serait plus compliquée (en raison de la diversité des espèces). Les productions seraient destinées à des circuits courts (plus rémunérateurs). Un deuxième prototype est basé sur des grandes cultures avec une diversification bois d'œuvre et bois énergie. Un troisième serait constitué de grandes cultures et de fruits nouveaux sur le secteur comme les figues, châtaignes, olives, baies de goji.