L’apprentissage aux mains des professionnels

Ne fournir que ce dont l'élève a besoin. Le mantra de la nouvelle réforme « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », votée en août 2018, pourrait bien être celui-là.
L'apprentissage deviendra un service à la carte, plus souple, et plus individualisé. « On va évaluer le niveau de compétences de l'apprenti et on va pouvoir évaluer ce qui manque à chacun, explique Fanny Poirier, directrice du CFPPA de la Côte-Saint-André. Cela devrait rallonger certains parcours et en raccourcir d'autres pour permettre de passer l'examen dans de bonnes conditions. » Actuellement, les conseils régionaux financent et régulent l'apprentissage au travers des formations proposées. Dans la nouvelle loi, ce seront les opérateurs de compétences (OPCO), anciennes OPCA, qui seront en charge de collecter ces financements. Ceux-ci ne fonctionneront plus en fonction de la carte de formations mais en fonction du nombre de contrats. « Cela pourrait créer une concurrence entre établissements pour obtenir le plus grand nombre de contrats. Mais, en réalité, le but est d'apprendre à travailler entre professionnels et monde enseignant », explique Fanny Poirier.
Définitive en 2021
Il y a aussi du changement du côté des aides. L'aide à l'entreprise ne financera les apprentis que jusqu'au niveau bac. L'aide au niveau BTS est supprimée et sera remplacée par un dispositif qui sera défini ultérieurement. Il devrait être décidé par entente entre les filières. Pour Fanny Poirier, l'entente n'est pas un problème. « On avait déjà des espaces de dialogue entre professionnels, à l'échelon départemental. Le monde agricole a à cœur de garder l'apprentissage. Les échanges existaient déjà avant, sans injonction de la loi, cela devrait perdurer après ». Le changement est plutôt sur l'offre de formation puisque celle-ci devrait être divisée en modules de compétences que chaque apprenti pourra valider au fur et à mesure. Pour la directrice du CFPPA, plus qu'une réforme de l'apprentissage, cela appellera une réforme des diplômes. « Aujourd'hui, on ne peut pas valider chaque bloc de compétences séparément pour valider un diplôme. Les apprentis passent tous le même examen à la même date ».
À terme, la scolarité devrait donc évoluer vers plusieurs sessions d'examen que les apprentis pourront passer quand ils auront acquis les compétences.
La seconde nouveauté pour les apprentis concerne le permis de conduire. La nouvelle loi propose une aide pour financer le permis des apprentis. Reste à préciser les critères d'éligibilité. Quelques décrets de la loi s'appliqueront dès la rentrée 2019 mais l'intégralité ne sera appliquée qu'en 2021. En attendant, la période d'incertitude concernant la création de nouveaux organismes, le vote des budgets et le partage des futures compétences inquiètent apprentis, maîtres d'apprentissage et organismes de formation.
V. M.