L’essor des circuits courts passé au crible par Okadran
«Circuits courts », un terme qui revient aujourd'hui dans toutes les bouches lorsqu'il s'agit de proposer des solutions à divers enjeux économiques et environnementaux... D'après la définition officielle qu'en donne le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation, les circuits courts représentent « un mode de commercialisation des produits agricoles qui s'exerce soit par la vente directe du producteur au consommateur, soit par la vente indirecte à condition qu'il n'y ait qu'un seul intermédiaire ». Signe de l'évolution des mentalités, 53 % des agriculteurs déclarent aujourd'hui vouloir se tourner vers les circuits courts. Il faut dire qu'en plus de bénéficier d'une vraie indépendance à l'égard des grands acheteurs, les agriculteurs engagés dans cette démarche voient aussi leur rémunération croître en moyenne de 34 à 50 % selon la filière. Du côté des consommateurs, force est de constater que les circuits courts suscitent aussi un intérêt croissant. En plus d'une prise de conscience éthique, on peut y voir l'effet durable des scandales sanitaires à répétition dans la grande distribution qui ont rendu les Français plus soucieux de la traçabilité des produits, d'après Okadran. C'est par exemple le cas pour la viande, qui représentait 26 % du panier global des consommateurs en 1967 mais plus que 20 % en 2014.
Le bio a la cote
Parmi les nombreux enseignements que l'on peut retirer de l'étude proposée par Okadran, la place croissante qu'occupe l'agriculture biologique dans l'agriculture française. On y apprend que 89 % des répondants déclarent pratiquer la vente en circuit court, et que 48 % de ceux qui ne s'y sont pas encore convertis envisagent une mutation de leur activité vers ce mode de production, dont 22 % dès les trois prochaines années. De la même manière, les appellations et labels, sanitaires, environnementaux ou mettant en avant les bienfaits du commerce équitable représentent une référence importante pour les producteurs et éleveurs. Près de 34 % des agriculteurs interrogés déclarent d'ailleurs posséder eux-mêmes un label. Pour un agriculteur, ce choix se justifie par la volonté d'obtenir la reconnaissance de sa production à sa juste valeur et de répondre aux attentes croissantes des consommateurs. Parmi les agriculteurs qui n'ont pas encore passé le pas, 37 % d'entre eux expriment leur volonté de mettre en place un label dans les années à venir.
Un mode de production à accompagner davantage
Si la conversion aux circuits courts est en marche, nombre d'agriculteurs renoncent encore face à l'inconnue que peut parfois représenter ce pari sur l'avenir. En cause notamment, un manque d'informations à tous les étages pointé par les principaux concernés. Pour 62 % des sondés, les syndicats agricoles ne mettent pas assez en avant les démarches de circuits courts. Un chiffre qui grimpe même à 70 % lorsqu'il s'agit d'évaluer l'action des chambres d'agriculture en la matière. De la même manière, l'accompagnement fourni par les banques dans les projets de circuits courts est jugé insuffisant par 72 % des répondants. Des tendances qui peuvent expliquer ce sentiment d'incertitude chez ceux qui ne se sont pas encore convertis aux circuits courts. Ils sont aujourd'hui 80 % à déclarer ignorer s'ils finiront par adopter un jour ce modèle de distribution. Si l'essor est réel pour les circuits courts, les défis restent donc nombreux pour lever les derniers doutes quant à un mode de production qui représente l'avenir à court, moyen et long terme de l'agriculture française.
Pierre Garcia