Accès au contenu
Actes criminels

L'incendie de bâtiments d'élevage suscite colère et consternation

Après les incendies dans quatre élevages (dont trois situés en Drôme), les forces de l'ordre poursuivent leurs investigations. Dans le monde agricole, et plus particulièrement chez les éleveurs, c'est la consternation et la colère. Tant que le (ou les) incendiaire(s) ne seront pas arrêtés, le sentiment d'insécurité restera extrêmement fort dans les campagnes.
L'incendie de bâtiments d'élevage suscite colère et consternation

Lâcheté, stupeur, consternation, colère, tristesse, dégoût... Depuis les incendies de trois bâtiments d'élevage en Drôme et d'un autre en Isère, ces mots traduisent l'indignation d'un monde agricole déjà durement atteint par les sinistres climatiques cette année. Dans la campagne, la tension est à son comble. Qui a pu commettre de tels actes ? Un ou plusieurs pyromanes ? Des militants d'associations anti-élevage comme dans l'Orne en septembre dernier (trois poulaillers incendiés) ou dans l'Ain en septembre 2018 (incendie de l'abattoir Gesler) ? Sur ce dernier cas, un an après, la justice vient d'interpeller six suspects (voir ci-dessous).

A Parnans (EARL des Boffard), vers minuit, un bâtiment d'une superficie totale de 3 000 m² a été aux trois quarts détruit par le feu. A l'intérieur, se trouvaient de la paille et 90 bovins. 23 génisses sont mortes dans l'incendieA Parnans (EARL des Boffard), vers minuit, un bâtiment d'une superficie totale de 3 000 m² a été aux trois quarts détruit par le feu. A l'intérieur, se trouvaient de la paille et 90 bovins. 23 génisses sont mortes dans l'incendie

En Drôme, les incendies ont démarré à Geyssans (Gaec Juven). Vendredi vers 22 heures, 1 000 m² d'un hangar abritant 200 tonnes de paille a brûlé. Puis, à Parnans (EARL des Boffard), vers minuit, un bâtiment d'une superficie totale de 3 000 m² a été aux trois quarts détruit par le feu. A l'intérieur, se trouvaient de la paille et 90 bovins. 23 génisses sont mortes dans l'incendie. Vendredi, une autre exploitation était incendiée à Saint-Antoine-l'Abbaye (38), ce qui ne laisse guère de doute sur l'origine criminelle de tous ces faits. D'autant qu'à Montoison, samedi soir, un quatrième incendie frappait un bâtiment de 200 m² abritant 300 bottes de paille et des porcs. Les animaux ont pu être sauvés de justesse.
Les dommages matériels sont très lourds et la colère immense. Le désarroi aussi. A la session de la chambre d'agriculture de la Drôme, le 25 novembre, Jean-Pierre Royannez, président, a témoigné. « Je me suis rendu chez Régis Mourrat dimanche. Ce que j'ai vu est horrible, des animaux brûlés avec la panse ouverte, des bêtes encore au cornadis... C'est insoutenable. Cette exploitation a tout perdu, ses noyers avec la grêle puis la neige. Ses animaux avec l'incendie. »

« Faire confiance aux enquêteurs »

Les dommages matériels sont très lourds et la colère immense. Le désarroi aussi. Les dommages matériels sont très lourds et la colère immense. Le désarroi aussi.

Dans les campagnes, et plus particulièrement dans les élevages, le sentiment d'insécurité est extrêmement fort. « Les agriculteurs doivent être très vigilants mais ne doivent surtout pas se faire justice eux-mêmes, a déclaré Jean-Pierre Royannez. Il faut faire confiance aux forces de l'ordre qui mène l'enquête avec d'importants moyens. » Le secrétaire général de la préfecture de la Drôme, Patrick Vieillescazes, l'a dit lui aussi : « Il faut faire front et faire confiance aux enquêteurs ». Il incite tous les agriculteurs à adhérer massivement à Vigi Agri 26, un dispositif qui permet le renforcement de la vigilance par des alertes SMS ainsi que d'effectuer des pré-plaintes en ligne. Tous ces points ressortent dans la motion adoptée par les élus de la chambre d'agriculture. Dans celle-ci, ils saluent aussi la mobilisation et l'engagement des forces de l'ordre pour lutter contre toute forme de violence envers le monde agricole. Ils saluent aussi les pompiers ainsi que la solidarité sans faille de l'ensemble des agriculteurs envers les familles touchées de plein fouet. Les élus de la chambre d'agriculture demandent que les auteurs de ces faits soient le plus rapidement retrouvés et condamnés. Enfin, ils demandent aux agriculteurs de faire acte de citoyenneté en communiquant aux forces de l'ordre tout fait suspect ou acte de malveillance.

« Stupeur, incompréhension, colère »

Des dizaines de sapeurs-pompiers de la Drôme ont été mobilisés pour circonscrire les incendies.Des dizaines de sapeurs-pompiers de la Drôme ont été mobilisés pour circonscrire les incendies.

« C'en est trop », a communiqué la FDSEA de la Drôme, lundi, rappelant qu'avant ces incendies un premier acte de vandalisme a frappé un élevage avicole à Chatillon-Saint-Jean (lire ci-.......). Nous condamnons fermement ces agissements et soutenons les agriculteurs qui subissent ces actes odieux. » La fédération invite, elle aussi, les agriculteurs à adhérer à Vigi Agri 26, rappelant que ce dispositif émane d'une convention signée en octobre par la gendarmerie, la direction départementale de la sécurité publique, le procureur de la République, la chambre d'agriculture, la FDSEA, les JA et la fédération départementale de la chasse.

« Tolérance zéro »

« J'adresse tout mon soutien aux deux agriculteurs victimes de ces actes inacceptables, a communiqué le préfet dès samedi matin. Je tiens à dire ma colère et affiche la plus totale détermination à donner à cette affaire une suite judiciaire qu'elle mérite. J'ai également demandé aux forces de l'ordre de renforcer leurs patrouilles dans le secteur. L'État témoigne toute sa solidarité aux agriculteurs en ces moments très difficiles. » Depuis la Côte d'Ivoire où il effectuait un déplacement, le ministre de l'Agriculture, Didier Guillaume, a jugé « inadmissible ces actes criminels », avant d'ajouter : « Tolérance zéro pour les agressions à l'encontre des agriculteurs ».

Christophe Ledoux

D'autres réactions

« Grande tristesse et profond dégoût », c'est par ces mots qu'Adice a qualifié, lundi, les incendies. Ardèche Drôme Isère conseil élevage rappelle la situation dejà difficile des éleveurs. « Si, en plus, nous nous faisons attaquer chez nous, en réduisant en cendre le travail d'une vie, qu'allons-nous devenir ? Nous ne pouvons plus réussir seul, nous avons besoin du soutien de la population française qui doit décider si elle veut encore des agriculteurs demain en France, une alimentation made in France, et des territoires entretenus... » Adice condamne fortement ces actes et apporte son soutien total aux « collègues » attaqués.
Célia de Lavergne, députée de la Drôme a exprimé « sa stupeur, son incompréhension et sa colère » ainsi que son « plein soutien » aux agriculteurs. « A l'heure où nos éleveurs se transforment et doivent s'adapter aux attentes légitimes de consommateurs de plus en plus exigeants et à des normes sociales et environnementales très élevées requises par la France et l'Europe, il est insupportable de voir leur outil de travail dévasté ainsi. »
« Je veux exprimer ma stupéfaction de voir des individus, dont on ne connaît pas à ce stade la motivation, se livrer à ce type d'actes que je considère comme de véritables attaques terroristes, a déclaré, lundi, Nicolas Dragon, président de Valence Romans Agglo. Je souhaite que les lâches qui ont commis ces actes soient rapidement identifiés et punis. »
« Je condamne fermement ces actes ignobles et tiens à réaffirmer mon soutien total à nos agriculteurs, encore une fois touchés. Il faut que cesse cet acharnement contre nos agriculteurs et que les auteurs soient rapidement identifiés et lourdement condamnés, a déclaré, mardi, la députée Emmanuelle Anthoine. Les agriculteurs ne doivent plus travailler et vivre la peur au ventre. » Dimanche, elle s'était rendue sur place. Elle demande au gouvernement de réagir « pour que ce genre d'événements ne se reproduisent plus » et aux autorités compétentes de « rapidement indemniser ces exploitants pour qu'ils puissent reprendre au plus vite une activité normale ».

 

A noter /
Le préfet de la Drôme, Hugues Moutouh, a demandé aux forces de l'ordre de renforcer leurs patrouilles, de jour comme de nuit. C'est dans ce cadre qu'il s'est rendu sur une opération de contrôle routier de la gendarmerie nationale, mardi à 22 h 30 au « rond point de la charrette » à Etoile-sur-Rhône. A ses côtés, étaient présents Alex Perrin, procureur de la République, et le colonel Christophe Deshayes, commandant du groupement départemental de gendarmerie.
Par ailleurs, le président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, a prévu de se rendre sur l'exploitation incendiée à Parnans, ce jeudi matin.

 

Groupes électrogènes /

Des vols de fiouls « inadmissibles »

Vingt vols de fioul de groupes électrogènes se sont produits depuis la mi-novembre dans les zones drômoises impactées la neige. Les forces de l'ordre ont été informées de l'emplacement de tous les groupes électrogènes et le préfet leur a demandé de renforcer les patrouilles à proximité. Il « condamne de la façon la plus ferme ces vols, d'autant plus qu'ils interviennent à un moment où la population fait face à une situation de crise. Ces comportements sont non seulement le fait de délinquants, mais également moralement inadmissibles. Ces actes anti-sociaux portent directement atteinte aux valeurs de solidarité qui fondent le socle républicain. »
25 000 poulets asphyxiés
Jean-Baptiste Vye, éleveur de volailles et nuciculteur à Saint-Paul-les-Romans, a été victime d'un tel vol, qui a eu de graves conséquences. Le 20 novembre vers six heures du matin, il a découvert qu'environ 200 litres de fioul avaient été siphonnés dans l'un de ses deux groupes électrogènes. De ce fait, la ventilation n'a plus fonctionné dans l'un de ses bâtiments avicoles et 25 000 poulets de quinze jours sont morts par asphyxie. La gendarmerie de Romans a ouvert une enquête.
Par ailleurs, Jean-Baptiste Vye a subi des dégâts dans ses noyers. Selon ses estimations, 90 % des arbres sont cassés ou couchés parterre et remettre les vergers en état prendra entre 5 000 et 10 000 heures de travail. « Le problème, c'est qu'on ne sait pas comment on va les financer, explique-t-il. Je pense qu'on va faire avec nos salariés. On ne peut pas faire plus. Au printemps, on aura peut-être remis un tiers ou la moitié en état. Les autres resteront comme ça jusqu'à l'année suivante ».
A.L.

 

Prévention / Les incendies qui viennent de frapper trois élevages drômois incite à redoubler de vigilance. C'est le but du dispositif Vigi Agri 26.

Vigi Agri 26 : « J'invite tous les agriculteurs à adhérer »

« Vols de matériels, de produits phytosanitaires, de récoltes..., depuis quelques années, les exploitations agricoles sont de plus en plus exposées aux actes de malveillance, constate Thierry Mommée, membre du bureau de la chambre d'agriculture de la Drôme. Ces derniers mois, avec des intrusions dans les élevages et des agriculteurs agressés verbalement et physiquement, on a atteint un degré de violence insupportable. Avec le vol de carburant sur le groupe électrogène d'un élevage avicole - qui a entraîné la mortalité de 25 000 volailles - puis les incendies criminels fin de semaine dernière - une vingtaine de bovins tués -, on est arrivé à un point critique. Et ce, dans un secteur déjà lourdement frappé par les sinistres climatiques. Les dégâts sont colossaux.
Conscients de ces attaques de plus en plus fortes, nous avons travaillé pendant plusieurs mois avec les forces de l'ordre afin de mettre en place un dispositif de protection des exploitations : Vigi Agri 26. Quels que soient les filières et les territoires, j'invite tous les agriculteurs à adhérer à Vigi Agri. En effet, plus le nombre des adhésions est grand, plus le dispositif est efficace. De plus, pour les agriculteurs, c'est un moyen aisé de signaler un délit, même mineur, ce qui peut s'avérer très utile aux forces de l'ordre pour mener des enquêtes et les faire aboutir. »
Vigi Agri 26
Un réseau d'alerte
Mis en œuvre en octobre dernier, Vigi Agri 26 a pour but de prémunir des actes malveillants envers le monde agricole en luttant contre les vols, dégradations, intrusions dans les bâtiments d'élevage, altercations physiques ou verbales, destruction de biens matériels. L'adhésion au dispositif (24 € TTC pour deux ans avec deux autocollants fournis) permet ainsi de protéger l'exploitation grâce à une signalétique informant que les biens sont sous surveillance. S'ajoute une écoute réactive des services de l'ordre.
Tous les chefs d'exploitation ressortissants de la chambre d'agriculture peuvent adhérer au système, quelles que soient leurs productions. Pour s'inscrire, rendez-vous sur le site www.drome.chambre-agriculture.fr (onglet Vigi Agri 26). Vous serez ensuite destinataire des messages SMS provenant de la gendarmerie nationale ou de la police. Ces alertes SMS vous avertiront rapidement des faits délictuels commis au préjudice d'agriculteurs, afin d'attirer votre vigilance. Les messages pourront être ciblés en fonction de vos productions ou de votre localisation. Le dispositif fonctionne 24 h/24 et 7 jours/7.