L’utilisation des antibiotiques est en forte baisse

L'antibiorésistance est un enjeu majeur de santé publique, concernant aussi bien la médecine vétérinaire que la médecine humaine (12 500 décès par an sont liés à l'antibiorésistance en France et 700 000 dans le monde). Afin de lutter contre ce problème et préserver l'efficacité des antibiotiques, en particulier pour la santé humaine, de nombreuses initiatives ont été mises en place pour promouvoir un usage responsable des antibiotiques chez les animaux (le but étant de diminuer la contribution de la médecine vétérinaire dans l'apparition de bactéries résistantes). C'est le cas du premier plan national EcoAntibio, qui s'est déroulé de 2012 à 2016, avec pour objectif une réduction de l'usage des antibiotiques. Les ventes de médicaments vétérinaires contenant des antibiotiques sont suivies annuellement par l'Agence nationale du médicament vétérinaire, qui a publié les chiffres de l'année 2016 récemment, révélant le bilan d'EcoAntibio.
Le plan EcoAntibio est un succès
En 2016, 530 tonnes d'antibiotiques ont été utilisées en France, soit une diminution de 41,8 % par rapport à l'année 2011. L'exposition des animaux suivie grâce à l'ALEA (Animal level of exposure to antimicrobials), un indicateur qui met en relation la quantité d'antibiotiques vendue avec les nombres et poids des animaux traités a également diminué, au-delà des objectifs initialement fixés :
- 37 % d'exposition des animaux aux antibiotiques en cinq ans, pour un objectif initial de – 25 % (toutes familles d'antibiotiques et toutes espèces animales). Dans le détail, on a observé une baisse de 24,3 % chez les bovins, 41,5 % chez les porcs, 42,8 % chez les volailles, 37,6 % chez les lapins et 19,4 % chez les chats et chiens. La baisse est encore plus marquée pour les antibiotiques critiques, dont les conditions de prescription sont encadrées par des textes réglementaires depuis 2016 : - 75 % d'exposition aux fluoroquinolones et – 81 % d'exposition aux céphalosporines de dernières générations en 2016 par rapport à 2013, pour un objectif initial de – 25 % en trois ans. Les objectifs de réduction de l'usage des antibiotiques du plan EcoAntibio1 sont non seulement atteints mais largement surpassés, et les ministères des Solidarités et de la Santé et de l'Agriculture et de l'Alimentation saluent « un premier bilan remarquable ». Ces excellents résultats confirment l'impact positif des différentes actions menées et témoignent de la mobilisation et de l'engagement des éleveurs et vétérinaires de concert (changements dans les pratiques, formations...).
Rester mobilisé
Il convient à présent de rester mobilisé et poursuivre les efforts pour conforter cette dynamique positive et responsable. Lors du deuxième plan EcoAntibio (2017-2021), le suivi de la consommation d'antibiotiques continu. La colistine, qui fait l'objet d'une surveillance particulière depuis la découverte d'un mécanisme de résistance à cet antibiotique en 2016, est inscrite dans ce plan. L'objectif est une réduction de 50 % en cinq ans de l'exposition à la colistine à partir de 2014. Entre 2014 et 2016, elle a d'ores et déjà diminué pour les bovins (- 43,4 %), les porcs (- 51,6 %), et les volailles
(- 26,7 %). Les données du réseau d'épidémiosurveillance de l'antibiorésistance des bactéries pathogènes animales (Résapath), animé par les laboratoires de Lyon et de Ploufragan-Plouzané de l'Anses, permettront d'évaluer si la diminution de l'utilisation des antibiotiques en médecine vétérinaire s'accompagne d'une diminution des phénomènes d'antibiorésistance. EcoAntibio2 insiste également sur les mesures de prévention des maladies infectieuses et s'attache à développer le recours aux traitements alternatifs.
Prévention et biosécurité
Dans toutes les productions, afin de limiter le recours aux antibiotiques et ne plus uniquement intervenir de manière curative quand un problème se présente, les pratiques préventives sont la clé. Avoir une approche plus globale de la santé des animaux et identifier les facteurs de risque des pathologies de l'élevage permettent de mettre en place une conduite de troupeau davantage axée sur la prévention. La santé générale des animaux passe par un bon équilibre alimentaire, des conditions de logement adaptées et une gestion correcte du parasitisme. Elle est la garantie d'une bonne immunité pour faire face aux pathogènes, mais également la base des performances zootechniques. L'observation régulière des animaux, notamment pendant les périodes de transitions qui sont souvent les plus critiques (mise bas, sevrage, allotement...), permet de détecter tôt les premiers signes de la maladie pour mieux les soigner. L'application de mesures de biosécurité, en particulier les bonnes pratiques d'hygiène au sein de l'élevage complètent les points clés de la prévention. Par la réussite de ce plan EcoAntibio, la France fait figure d'exemple, mais la réflexion et l'action doivent s'envisager au niveau européen et mondial. En ce sens, les ministres rappellent que « la France demande aux instances européennes que les mesures prises pour un usage prudent des antibiotiques en santé animale soient également, par réciprocité, imposées aux denrées importées sur le territoire européen ». Une volonté à souligner mais qui laisse perplexe sur la mise en place effective au vu des situations très hétérogènes entre les pays, et dont l'évolution sera à surveiller dans les années à venir. n
Perrine Matrat, vétérinaire au GDS du Rhône
Sources : www.agriculture.gouv.fr, communiqué de presse de l'Anses et des ministères de l'Agriculture et de la Santé.