La biodiversité, un axe de travail transversal

Sur la plateforme des techniques alternatives et biologiques (Tab), à Etoile-sur-Rhône, la biodiversité est un axe de travail transversal. Laurie Castel, chef de projet expérimentations de cette plateforme à la chambre d'agriculture, l 'a rappelé lors d'une visite, le 7 juin. Ainsi, en faveur de la biodiversité, plusieurs aménagements ont été mis en œuvre.
Oiseaux, chauves-souris
Des nichoirs pour plusieurs espèces d'oiseaux ont été installés. Des mésanges bleues ainsi que charbonnières en ont occupés dès les premières années. Des fientes sont prélevées pour savoir si elles mangent des insectes ravageurs des cultures. Il y a aussi des nichoirs à faucons crécerelles, rapaces nocturnes (chouettes effraie, hulottes et chevèches). Et, en octobre 2016, il en ont été posés pour les chauves-souris, dont 16 espèces ont été recensées sur le site. Pour le moment, elles y viennent chasser mais aucune ne gîte sur place. « Cela peut prendre du temps », a prévenu Arthur Vernet, de la LPO, qui intervient sur la plateforme. Les nichoirs sont munis d'une gouttière où sont récupérées les crottes de chauves-souris pour vérifier (par analyses génétiques) ce qu'elles consomment. L'identification des espèces de chauves-souris se fait aussi à l'aide d'enregistreurs d'ultra-sons.
Papillons, carabes, araignées
Les oiseaux et papillons ont fait l'objet de suivis sur l'ensemble de la plateforme chaque année entre 2011 et 2016 (de mars à juin). Dorénavant, le rythme sera bisannuel car la situation évolue peu d'une année sur l'autre. Depuis 2011, en cumulé, 69 espèces d'oiseaux ont été répertoriées sur la plateforme dont une trentaine qui y nichent de façon durable et six typiques des milieux agricoles. « C'est déjà bien et ça devrait s'améliorer », a estimé Arthur Vernet. « De 24 espèces vues en 2011, on est passé à 34 (en cumulé), soit 40 % de plus, ce qui est très satisfaisant », a ajouté Laurie Castel. L'alouette des champs est la plus fréquente. Des études montrent qu'elle peut limiter les adventices et ravageurs. Les carabes et araignées du sol ont aussi fait l'objet de suivis au printemps et à l'automne entre 2013 et 2015 - avec des pots pièges Barber et notamment dans le système agroforesterie - en vue de dresser un état des lieux.
A l'échelle de la plateforme Tab, 82 espèces ont été repérées avec les suivis. « Globalement, la réponse est plutôt positive, le nombre d'espèces présentes évolue, constate Arthur Vernet. D'autres oiseaux devraient arriver mais la réaction est plus lente qu'avec les insectes car ils sont en haut de la chaîne alimentaire. »
Haies, autres suivis
Toujours en faveur de la biodiversité, des arbres morts sont laissés dans les haies (refuges pour les oiseaux). En outre, des haies ont été doublées avec des arbres de diverses espèces. Et, dans les cultures du système agroforesterie, une haie a été plantée en 2014 afin d'ajouter une strate végétale. Elles est composée d'une douzaine d'espèces arbustives ou à haut jet.
Par ailleurs, depuis deux ans dans les pêchers, la prédation des tordeuses orientales par les mésanges est étudiée avec des leurres en pâte à modeler imitant ces chenilles. « On trouve des traces de morsures sur les leurres jusqu'au cœur des arbres, a indiqué Arthur Vernet. Les résultats montrent qu'il y a une régulation des chenilles. Mais on ne peut toutefois quantifier le nombre total de chenilles mangées. » En outre, grâce à des appareils photos placés devant les fausses chenilles, des mésanges venant « prédater » ces leurres ont été « flashées ». Quant aux pollinisateurs, ils sont eux aussi suivis depuis deux ans sur la plateforme Tab.
Annie Laurie
Suivi innovant / Pour évaluer le rôle des insectes auxiliaires dans la régulation des ravageurs en grandes cultures, des cartes « prédation » sont testées sur la plateforme Tab (et ailleurs).L'évaluation des services de régulation
« La recherche commence à mettre au point des méthodes, dont les cartes "prédation" pour évaluer le rôle des insectes auxiliaires dans la régulation des bioagresseurs », a signalé Véronique Tosser, ingénieur biodiversité à Arvalis-Institut du végétal, lors de la visite du 7 juin. Ceci dans le cadre d'un projet nommé Arena(*), piloté par Arvalis-Institut du végétal en partenariat avec des organismes d'enseignement, de recherche et de développement.
Des cartes de ce type ont été testées en 2016 et cette année sur la plateforme Tab, entre autres. Il s'agit de carrés de papier de verre sur lesquels sont collés des bioagresseurs. A Etoile, l'essai a été réalisé avec des graines d'adventices (il peut l'être aussi avec des proies : œufs de carpocapses, pucerons...). Pour limiter la prédation des graines par les oiseaux, les cartes sont mises dans des cages. Au bout de quatre jours, le nombre de graines restant est compté. « On suppose que ce qui a été mangé est en partie l'œuvre des auxiliaires de culture et notamment des carabes, qui sont bien connus pour consommer des graines d'adventices, a noté Véronique Tosser. L'inconvénient, c'est que l'on ne sait pas ce qui se passe pendant les quatre jours. Dans le cadre du projet Arena, on réfléchit à un protocole pour évaluer ce service. On partirait sur l'idée de coupler la carte "prédation" avec une caméra au-dessus de la cage et des pots Barber placés à proximité. »
La plateforme Tab, Véronique Tosser la considère comme un « super-dispositif pour étudier la biodiversité, évaluer les services écosystémiques... ».A. L.(*) Arena (Anticiper les Regulations Naturelles) : lauréat de l'appel à projets Casdar « innovation et partenariat » 2016.