La ferme du Champ des Grâmes cherche son repreneur
À Bathernay, Françoise Ducros et Patrick Graillat souhaitent transmettre l’activité d’engraissement et transformation de porcs plein air qu’ils ont construite de toute pièce. Mais trouver un repreneur est un parcours du combattant.

Françoise Ducros cessera son activité dans cinq ans au plus tard. Patrick Graillat, son conjoint, a lui fait valoir ses droits à la retraite en 2019. Ensemble, ils ont construit la ferme du Champ des Grâmes à Bathernay et se sont spécialisés dans la transformation de porcs élevés en plein air. Aujourd’hui, ils souhaiteraient transmettre leurs savoir-faire et leur clientèle car ils sont persuadés que leur activité peut permettre à un repreneur de vivre correctement.
Dès 2018, le couple, associé en SCEA1, a pris contact avec la chambre d’agriculture de la Drôme pour une inscription au répertoire départ-installation. Leur objectif à l’époque : trouver un associé qui reprenne les parts de Patrick dans la société. Mais les candidats ne se sont pas bousculés. Françoise Ducros a pu, dans un premier temps, trouver une salariée pour maintenir l’activité. Celle-ci a bien franchi le pas de l’installation mais dans la Vienne. Toujours faute de candidat pour s’associer, l’exploitante s’est donc tournée vers un apprenti qui terminera son contrat en juillet prochain. « Dans la situation actuelle, nous transformons 60 à 70 porcs par an. En pleine activité nous étions à cinq porcs par semaine », précise-t-elle. Si elle souhaite aujourd’hui témoigner, c’est parce qu’elle ne peut se résoudre à voir disparaître tout ce qu’elle a construit avec son conjoint. « Nous sommes partis de rien et nous avons créé une activité qui fonctionne. Si personne ne reprend, après nous, il n’y aura plus d’agriculteur sur la commune », se désole Françoise Ducros.
« S’imprégner de l’ambiance »
Elle a cependant conscience que la transmission dans le cas de la ferme du Champ des Grâmes n’est pas simple. « Ce que nous voulons, c’est transmettre non pas l’exploitation - c’est notre lieu d’habitation et nous souhaitons y rester - mais l’activité. Nous proposons de former la personne, de lui transmettre la clientèle et de louer les terres, soit 2,5 ha pour les cochons en plein air et leurs cabanes et 7,5 ha pour les céréales destinées à leur alimentation », décrit l’agricultrice. Quant à l’atelier de transformation, construit en 1989 et contigu à la maison, il restera opérationnel jusqu’au départ à la retraite de Françoise. « Différentes pistes sont envisageables comme celle de reprendre un outil existant non utilisé à proximité ou de créer un outil collectif, indique-t-elle. Durant deux ans, nous pouvons imaginer travailler ensemble avec le repreneur, sous un statut de salarié ou de stagiaire, afin qu’il puisse s’imprégner de l’ambiance, voir comment nous travaillons, comment nous vendons, les possibilités de revenus... Mon idée est vraiment d’accompagner quelqu’un dans une installation progressive pour lui éviter de trop s’endetter. » En plus des terres, certains matériels de l’exploitation pourront être repris comme la remorque pour transporter les carcasses depuis l’abattoir de Romans, des équipements pour la vente ou la transformation ou encore quelques matériels de culture.
Débouchés assurés
Côté commercialisation, la ferme du Champ des Grâmes dispose d’un débouché solide avec le magasin « Le panier fermier », situé au Creux de la Tine sur la commune d’Albon à une trentaine de kilomètres de l’exploitation. Patrick Graillat a fait partie des huit producteurs qui se sont associés à la fin des années 1980 pour autoconstruire ce magasin, en terre de pisé. C’est là que depuis 1990, avec Françoise, ils commercialisent l’essentiel de leurs produits. Leur gamme a atteint jusqu’à 25 références (rôtis, filets mignons, salaisons, jambons, pâtés, produits sous-vide, fumés…). Le reste est vendu à la ferme, sur le marché de producteurs de Saint-Donat, à une Amap2, une épicerie... « Avec cette activité, nous avons pu gagner notre vie. Nos produits sont reconnus », insiste Françoise Ducros. Elle est prête à accueillir un porteur de projet qui souhaiterait profiter de son expérience. Un logement sur place (gîte pour une famille ou studio) est envisageable le temps de cette transmission d’activité.
Sophie Sabot
1 SCEA : société civile d’exploitation agricole.
2 Amap : association pour le maintien d’une agriculture paysanne.
Parcours
Lorsqu’il s’est installé en 1985, Patrick Graillat s’est d’abord lancé dans la culture du tabac. Mais le succès n’est pas au rendez-vous, faute de terrains adaptés. À la fin des années 1980, avec Françoise, conjointe collaboratrice, il produit aussi quelques légumes pour un petit magasin de producteurs qui deviendra plus tard « Le panier fermier ». Là, des collègues les incitent à se lancer dans la production de porcs pour répondre à la demande des clients. C’est le début de l’aventure avec la construction du laboratoire de transformation près de leur habitation en 1989. En 1996, Françoise Ducros reprend une petite ferme en céréales bio à Saint-Avit, avant de s’associer en 2001 en SCEA avec son conjoint.