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Elevage caprin

La filière caprine affiche une conjoncture très favorable

Entre la démographie naturelle des éleveurs et
les conséquences de la crise du prix en 2011-2012, la filière caprine laitière peine à redresser la barre. Les signes positifs sont pourtant là, le nombre de producteurs s’est quasiment stabilisé en Rhône-Alpes entre 2016 et 2017 et le prix du lait à 703 euros/1 000 l rémunère correctement les producteurs.
La filière caprine affiche une conjoncture très favorable

Il y a peu de filières agricoles qui peuvent se targuer d’afficher un prix à la production en hausse depuis 5 ans. C’est pourtant le cas de la production laitière caprine puisque le prix moyen du lait payé aux producteurs en France est passé de 603 €/1 000 l en 2012 à 714 €/1 000 l en 2017. Voir le graphique de l'évolution.

En moyenne sur Rhône-Alpes, un éleveur caprin sur six a plus de 55 ans en  2017 et 47 % des éleveurs ont plus de 46 ans.
« De 2013 à aujourd’hui, c’était une phase de redémarrage de la filière avec des installations qui se développent à partir de 2015, explique Laurent Forray, le nouveau président de l’interprofession régionale, le Criel caprin, pour le collège industriel, et chargé des relations avec les producteurs au sein du groupe Tribala. Le prix du lait de chèvre atteint des prix jamais vu auparavant. » Depuis 2015, le prix est repassé au-dessus de l’indice des coûts de production Ipampa permettant aux éleveurs de retrouver des marges de manœuvre sur leur exploitation. La consommation de fromage de chèvres s’inscrit à la hausse depuis la fin 2014 et les prix à la consommation restent stables. « Comme dans toutes les filières, l’enjeu pour nous est de répondre aux attentes des consommateurs, souligne Laurent Forray. Dans le contexte post-EGA, les plans de filières nationaux fixent un certain nombre d’étapes. Mais notre filière doit aussi affirmer qu’elle répond déjà à beaucoup des attentes et mieux communiquer dessus. En tant que président de l’interprofession caprine, j’aimerais être porteur d’un message positif auprès des acteurs de la filière. Il nous reste des chantiers à faire avancer mais la filière est déjà à un bon niveau aujourd’hui. »

Un nombre d’exploitations quasi stable depuis 2016

Cette conjoncture économique favorable est marquée par un rebond des livraisons de lait de chèvre en 2017 de 3,5 % après six années de baisse. « L’image de la filière est positive dans un environnement agricole dégradé, souligne Laurent Forray. C’est “LA” filière agricole qui fonctionne bien. On assiste à des agrandissements d’exploitation, des ouvertures d’atelier de diversification en lait de chèvre et des installations hors cadre familial. Au-delà de la conjoncture, la filière bénéficie également de plus faibles investissements nécessaires pour s’installer. »
En 2017, la collecte de lait de chèvre s’est établie à 26,8 millions de litres contre 31,8 millions de litres en 2011, soit 18 % des volumes perdus en six ans. Ce mouvement s’explique par la forte baisse du nombre de producteurs de lait de chèvre observée entre 2011 et 2016. Sur la zone Rhône-Alpes, on compte 25 % de producteurs laitiers en moins, soit une centaine d’exploitations. « On a à la fois un souci lié au nombre de producteurs et une difficulté de maillage territorial, souligne Laurent Forray. Certains outils industriels ne sont plus remplis de la même manière qu’avant la crise de 2011-2012. » Le recul des producteurs a fortement ralenti entre 2016 et 2017, et le nombre d’éleveurs n’a reculé que de 1,4 %. Depuis 2016, les quatre départements de Rhône-Alpes comportant le plus de producteurs en caprin lait : l’Ardèche, la Drôme, la Loire et le Rhône, ont vu les effectifs se stabiliser.

Laurent Forray, président du Criel caprin Alpes Massif central, représentant du collège des industriels.

Renouveler les générations

La filière cherche maintenant à inverser la tendance et à attirer de nouveaux producteurs pour compenser les départs en retraite qui vont s’accélérer au cours des dix prochaines années. En moyenne sur Rhône-Alpes, un éleveur caprin sur six a plus de 55 ans en 2017 et 47 % des éleveurs ont plus de 46 ans. Dans la Drôme, la situation est plus préoccupante puisqu’un éleveur sur quatre a plus de 55 ans. « Il y a un enjeu réel autour de l’installation et du renouvellement des générations pour maintenir les volumes de lait sur les sites, poursuit Laurent Forray. Il faut a minima maintenir la production régionale, mais certains acteurs transformateurs ont besoin d’augmenter la collecte de lait de chèvre pour répondre à des nouveaux débouchés. »
En Rhône-Alpes, on constate aussi une tendance des exploitations caprines laitières à augmenter la taille de leur cheptel. Près de 75 % des producteurs de lait de chèvre ont plus de 101 chèvres. C’est d’autant plus vrai dans le Rhône, où les troupeaux sont en moyenne plus grands que dans les autres départements : 66 % des exploitations ont plus de 151 chèvres.  

 


Vincent Vallet, le président de la fédération régionale caprine et membre du collège producteur du Criel Alpes Massif central, revient sur les premiers résultats de la charte d'installation en caprin laitier qui a soufflé sa première bougie en avril dernier.
Vincent Vallet est éleveur en caprin lait et  président de la fédération régionale caprine et membre du collège producteur du Criel Alpes Massif central.

" La charte a relancé une dynamique pour la filière "

Il y a un peu plus d'un an, la charte d'installation caprine était lancée. Quels sont ses objectifs ?
Vincent Vallet : « L'objectif est d'avoir un discours commun au sein du Criel pour porter le même message. La charte est aussi un moyen pour mettre un coup de projecteur sur la filière caprine car il y a des transformateurs qui cherchent de nouveaux volumes et de nouveaux éleveurs de chèvres. Tout le monde, à son niveau, peut s'impliquer pour que les installations se passent bien, ce qui est un enjeu fort pour pérenniser la filière. C'est aussi une gestion des installations pour rompre avec le cycle de surproduction récurrent que nous avons vécu. Cette charte permet, en bonne intelligence, de mieux prévoir les volumes pour ne pas subir les à-coups de prix. De plus, il y a beaucoup d'éleveurs qui approchent de la retraite, il faut anticiper ce mouvement, sensibiliser les éleveurs entre 55 et 65 ans à la question de l'avenir de leur atelier caprin. Ont-ils un repreneur, ont-ils réfléchi à cette question ? La charte est un moyen de sensibiliser les signataires [NDLR : organisations professionnelles agricoles, interprofessions, coopératives, industries, appellations, banques, assurances...] afin qu'ils orientent ces éleveurs pour faire un diagnostic sur l'exploitation en vue de la transmission. »
Quel bilan dressez-vous après cette première année ?
V. V. : « Le premier objectif qui était d'avoir un discours commun est atteint. C'est une grande satisfaction et une grande réussite car tous les acteurs de l'interprofession parlent aujourd'hui d'une même voix. La charte a relancé une dynamique pour la filière. On a réussi à mettre un coup de projecteur sur la filière caprine tous ensemble au Sommet de l'élevage ou lors d'une journée installation en Ardèche par exemple. Aujourd'hui, on commence à voir des signaux positifs, il y a beaucoup plus de contacts avec des jeunes intéressés par la filière et les points d'accueil installation des chambres d'agriculture pour étudier la faisabilité de leur projet. Cela permet de rassurer tous les acteurs, les collecteurs, les entreprises, les banques, etc. »
Suite à une réunion avec les signataires de la charte d'installation en caprin laitier à la mi-juin, quelles pistes allez-vous suivre pour amplifier ou réajuster le dispositif ?
V. V. : « Il reste encore beaucoup à faire. On s'est rendu compte qu'il y avait un problème de communication entre les différents signataires de la charte. On s'est donc engagé à ce que tous les signataires soient informés des événements organisés par les autres. On a aussi décidé d'aller présenter la charte d'installation en caprin lait dans différents établissements scolaires agricoles avec la présence d'un éleveur pour répondre aux questions précises en octobre novembre. Notre objectif est vraiment d'en parler et de la vulgariser. » 
Propos recueillis par Camille Peyrache