« La prédation condamne l’élevage en plein air et menace le paysage rural »

Samedi 6 octobre à Buis-les-Baronnies, les 5e rencontres de la Montagne, ouvertes par le maire, Sébastien Bernard, ont accueilli éleveurs, représentants d'associations pastorales, responsables professionnels agricoles et élus. Parmi ces derniers, étaient présents la sénatrice Marie-Pierre Monier, les conseillers départementaux Pascale Rochas et Pierre Combes et la députée Célia de Lavergne. Les discours d'ouverture ont rappelé le rôle fondamental du pastoralisme dans l'économie de montagne, l'entretien des paysages et l'équilibre de la biodiversité. De plus en plus fréquente, la prédation du loup perturbe cet équilibre et met en péril le pastoralisme.
Des témoignages édifiants
« Le loup progresse, les éleveurs reculent, la détresse est constante », a noté Jean-Pierre Royannez, premier vice-président de la chambre d'agriculture de la Drôme. Philippe Cahn, président de l'Adem (association départementale d'économie montagnarde), a évoqué les 600 prédations dans la Drôme sur 11 000 enregistrées dans l'année sur tout le pays. Et Yves Bonnivard, président de l'USAPR, a déploré : « Les loups attaquent en plein jour et presque aux portes des maisons ! »
Pourquoi « la faillite » du Plan loup ?
Comme il l'avait fait dans son intervention au parlement européen en mai dernier à Bruxelles, Laurent Garde, scientifique au Cerpam (centre d'études et réalisations pastorales Alpes-Méditerranée), a expliqué « la faillite du Plan loup ». Lors de sa réintroduction en France, le loup a rencontré une faune sauvage (cerfs, chamois, chevreuils) naïve qui lui a permis de se multiplier rapidement. Celle-ci a réappris la vigilance, la fuite et elle est devenue plus rare. Le loup s'est alors tourné vers des victimes plus faciles et nombreuses, les brebis et autres animaux d'élevage. La pose de clôtures de protection et la multiplication des chiens de défense n'y font rien. « Les territoires d'élevage sont très vulnérables au loup, a observé le scientifique. Le relief, la végétation, le mauvais temps sont ses alliés car ils facilitent l'approche et handicapent la surveillance. Les loups chassent en meute et obligent à mobiliser cinq à dix chiens de protection. Ayant perdu la crainte de l'homme, il attaque en plein jour car il a compris le libre accès au troupeau. Le loup est en train d'exclure l'élevage de plein air des paysages ruraux, par la prédation, les contraintes de protection des troupeaux et l'hostilité des randonneurs aux chiens de protection. » Laurent Garde a terminé son propos en disant : « Le loup doit réapprendre que l'homme et son troupeau représentent un danger qu'il convient d'éviter et non pas un garde-manger dont il peut disposer à sa guise ! »
Les attentes des éleveurs
Dans la motion du Col du Glandon, les éleveurs exigent un déclassement du loup de la Convention de Berne et de la directive Habitats de façon à sécuriser le cadre juridique facilitant la régulation du prédateur (actuellement 150 000 € d'amende et deux ans d'emprisonnement pour non-respect des règles). Les tirs de prélèvement sont autorisés lorsqu'il y a eu attaque sur un troupeau, les tirs de défense sont possibles lors d'attaque pour tenter de repousser le loup. La nuance est subtile. L'arrêté de juillet 2017 autorisait le prélèvement de quarante loups en 2017-2018 sur les vingt départements concernés par la prédation.
L'appel de Buis-les-Baronnies
Jean-Pierre Royannez et Yves Bonnivard ont souhaité que les travaux de la journée aboutissent à un document commun. Il a été rédigé petit à petit dans le courant de l'après-midi, lu une première fois et corrigé collectivement. La mouture définitive sera communiquée aux principaux acteurs des rencontres pour signature avant d'être présentée aux instances habilitées à recevoir et traiter cette demande. Un pressant appel auprès des parlementaires présents à ces rencontres a été fait pour exposer la situation et soutenir cette cause devant le sénat et l'assemblée nationale.
J.M. P.