La rivière Drôme hier, aujourd'hui et demain

Dans les années 1980, sur le bassin versant de la rivière Drôme, la situation était délicate du fait de pollutions, tensions agricoles liées à l'irrigation et dégâts de crue. Les élus ont réagi en créant, en 1993, la première CLE (commission locale de l'eau) de France. Il s'agit d'une assemblée délibérante regroupant élus, services de l'État et usagers à l'échelle de la vallée. « C'est le parlement de l'eau », a rappelé son président, Gérard Crozier, le 25 novembre à Allex, lors d'une conférence de presse organisée par le SMRD (syndicat mixte de la rivière Drôme et ses affluents). Présidé également par Gérard Crozier, le SMRD porte le Sage et la politique fixée par la CLE. « La CLE et le SMRD sont des "facilitateurs" pour la mise en œuvre des obligations réglementaires », a noté leur président.
Le premier Sage de France
La CLE a élaboré un Sage (schéma d'aménagement et de gestion des eaux), lui aussi le premier de France. Approuvé en 1997, celui-ci donne des objectifs de gestion pour la rivière Drôme et ses affluents (mise en valeur, protection quantitative et qualitative des ressources en eaux superficielles et souterraines). La portée juridique du Sage a été renforcée en 2006 par la loi sur l'eau et les milieux aquatiques. En 2007, tous les EPCI (établissements publics de coopération intercommunale) du bassin versant ont transféré leurs compétences « rivière » au SMRD. En 2013, le Sage a été révisé.
Après deux contrats de rivière (programmes d'actions mis en place pour atteindre les objectifs fixés dans le Sage), la qualité de l'eau a été restaurée (assainissement, entretien de la rivière). Et des solutions ont été trouvées pour l'irrigation : création de la réserve de substitution de Juanon à Montmeyran pour réduire les prélèvements dans la rivière Drôme (1 à 1,5 million de m³ d'eau par an) et gel des surfaces irriguées.
Travailler intelligemment
« Si l'aspect qualité de l'eau a été réglé, il reste encore à faire en termes de gestion quantitative (usages agricoles et autres). Pour ce qui est des agriculteurs, les accompagner et travailler de façon intelligente avec eux font partie de nos objectifs, assure Gérard Crozier. Il y a eu des avancées. Il ne faut pas opposer agriculture et qualité environnementale. Les deux doivent aller de paire. »
A un moment cet été, en raison de la canicule et de la sécheresse, l'irrigation a été difficile mais a pu être maintenue. Face à ce problème, la CLE a été réactive. « Elle s'est de suite réunie, a indiqué son président. La discussion n'a pas été facile mais les débats ont permis de bien positionner le curseur entre les contraintes environnementales de la rivière et les contraintes économiques et sociales des habitants de la vallée. Finalement, un peu plus de largesse a pu être donnée à l'irrigation. » Par ailleurs, le SMRD soutient le projet de substitution de prélèvements dans la rivière Drôme par de l'eau venant du Rhône pour l'irrigation sur le secteur Allex-Montoison (objectif de 1,5 à 2 millions de m³ par an). « Reste le secteur de Crest-Sud qui demeure encore un peu appauvri, constate Gérard Crozier . Nous montons les marches une à une. »
Un challenge
La nouvelle compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention contre les inondations » (Gemapi) entrera en application en 2018. Sur le bassin de la rivière Drôme, une réflexion a été engagée afin de savoir s'il y a intérêt à confier la Gemapi au SMRD, la seule collectivité à avoir une vision globale de la vallée. Un groupe de travail a été constitué cet été entre le syndicat et ses trois communautés de communes adhérentes (du Val de Drôme, du Crestois et du Pays de Saillans, du Diois).
Aujourd'hui, le SMRD manque de visibilité sur ses financements et affiche la prudence. « En 2016 et 2017, nous devrions y arriver en fonctionnant petitement, en conduisant peu d'actions, confie Bernard Buis, vice-président du syndicat. Mais se pose la question de savoir si le SMRD doit prendre la compétence de la Gemapi », qui est encore entourée de flou. Qu'en sera-t-il de la responsabilité juridique (si une digue cède lors d'une crue...), du niveau de préservation à garantir, des coûts, des aides techniques et financières ?
« La Gemapi, nous devons la prendre comme un challenge à relever, a confié le président du SMRD. Je serai toujours dans la recherche du consensus. Nous devons être des "facilitateurs" de la loi. » Et Claude Aurias, qui siège à la CLE au titre de vice-président de la communauté de communes du Val de Drôme, a ajouté : « Aujourd'hui, nous travaillons en concertation. Nous sommes dans un schéma de gestion pragmatique de notre rivière Drôme ».
Annie Laurie