La Senura, au chevet des nuciculteurs
L’assemblée générale de la Senura, organisée à Chatte le 17 juin, a permis d’évoquer la récolte passée, quelques travaux techniques en cours et les changements à la tête de la structure.
C’est avec beaucoup d’émotion que Christian Mathieu, co-président de la Senura* a pris la parole le 17 juin à Chatte (38), lors de l’assemblée générale de la structure. Et pour cause, après neuf années passées à cette fonction et une vingtaine au sein du conseil d’administration, il passe la main à Sébastien Renevier, nuciculteur à Tullins. Aurélien Clavel succède aussi à Jean-Claude Darlet sur l’autre co-présidence, puisque statutairement, le président de la chambre d’agriculture de l’Isère est toujours co-président de la Senura.
Si la rencontre fut l’occasion d’évoquer ces passages de témoin, elle a aussi permis d’aborder les nombreux travaux en cours ainsi que l’actualité de la structure.
Adaptation permanente
Faisant un petit point de récolte, Christian Mathieu fait état d’une année 2024 marquée par des conditions météorologiques difficiles qui ont impacté la production et rendu la collecte difficile. « La récolte AOP, comme les variétés Laura et Fernor, furent modestes, pénalisées par des écarts de tri importants. En plus de ces taux de déchets notables, nous avons eu des noix de qualité moyenne et un volume de production commercialisé décevant », indique-t-il. Ces mêmes conditions météos ont été favorables aux maladies. Les protections ont été compliquées à mettre en place, mais ont limité les contaminations secondaires. Il est apparu que les vergers non protégés ont eu beaucoup de chutes de feuilles, d’où l’importance de protéger. Pour le nuciculteur, « cette campagne démontre qu’il faut utiliser au maximum les méthodes de lutte qui ont fait leurs preuves : broyage des feuilles, aération du verger et du sol, positionnement des traitements quand c’est possible, adaptation de la lutte à la variété et une alimentation hydro-minérale adaptée ». Évoquant les orientations que doit suivre la recherche, il explique que le changement climatique auquel s’ajoutent les crises économiques récurrentes, obligent les agriculteurs à s’adapter en permanence. Pour lui, la recherche appliquée et l’innovation font partie des solutions. Il estime également qu’il est du devoir de la Senura de répondre à l’ensemble des problématiques en proposant une diversité de méthodes et de solutions.
Isabelle Brenguier
* Senura : Station expérimentale nucicole Rhône-Alpes
Un dépérissement multiple et préoccupant
Le dépérissement des noyers a été évoqué avec beaucoup d’inquiétude par les responsables de la Senura et les producteurs de noix lors de l’assemblée générale de la structure. Le phénomène est en hausse pour de nombreuses essences dont le noyer, et peut conduire à la mort prématurée des arbres touchés. C’est pour cela que la station a débuté en 2025 une expérimentation sur cette thématique, avec l’embauche d’une doctorante pour trois ans. Pour l’instant, l’équipe technique en est à la collecte de données. Constatant que « ce dépérissement se manifeste par des symptômes variables », qu’il s’agit de « phénomènes complexes induits par de multiples facteurs biotiques et abiotiques », elle estime qu’il est impératif de bien documenter la situation.
Conseiller en production noix à la chambre d’agriculture de l’Isère, Ghislain Bouvet corrobore l’existence de ce « problème majeur dans les vergers, avec des situations différentes d’un arbre à un autre, d’une parcelle à une autre alors qu’elles sont juxtaposées et devraient être similaires. C’est incompréhensible. C’est pour cela qu’il faut qu’on travaille d’abord sur un état des lieux, de façon à identifier les causes. Certes, il y a le changement climatique que l’on subit. Mais il y a d’autres choses. Il faut qu’on se questionne sur le matériel végétal, sur les porte-greffes, indique-t-il. Les nuciculteurs doivent savoir que les techniciens se sont saisis du problème. La recherche est en cours. La difficulté est qu’il faut lui laisser le temps de trouver ».
Le directeur de la Senura, Stéphane Dupré, souligne l’opportunité que représente ce projet Candide, « qui vise à concevoir un outil de diagnostic de terrain permettant d’anticiper, de limiter ces risques de dépérissement et d’identifier des solutions de gestion ».
Isabelle Brenguier