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Territoires

La synergie entre le PNR du Vercors et les agriculteurs

Depuis 47 ans, l’association pour la promotion des agriculteurs du parc et le PNR du Vercors travaillent à mettre en valeur les produits agricoles locaux, à protéger le foncier et à pérenniser les exploitations. Une collaboration plus ou moins facile en fonction des hommes et des objectifs poursuivis.

La synergie entre le PNR du Vercors et les agriculteurs

Sur le territoire du parc naturel régional du Vercors, à cheval sur la Drôme et l'Isère, cela fait 47 ans que les gestionnaires du PNR et les agriculteurs œuvrent pour défendre l'agriculture de montagne. « La spécificité du Vercors est l'existence de l'association pour la promotion des agriculteurs du parc (Apap) qui a été constituée six mois avant le parc en 1970 », explique François Rony, éleveur de chèvres et de bovins allaitants dans le Vercors et ancien président de l'Apap. « À l'époque de la création du PNR, on parlait beaucoup de la réserve naturelle des hauts plateaux et les agriculteurs avaient des craintes quant à leur liberté d'action. Pour créer un interlocuteur agricole collectif avec le PNR, ils ont créé l'Apap. L'association a toujours été présente au sein du bureau du parc, ce qui nous a permis d'avoir un dialogue plutôt constructif avec le PNR, même s'il y a eu des moments plus difficiles que d'autres. Dans l'absolu, l'existence de ces deux structures et leur travail commun est une chance pour l'agriculture de notre territoire. »

Soutien des produits locaux

En effet, le PNR du Vercors déploie actuellement une politique définie pour la période 2008-2020 autour de quatre axes : pérenniser les exploitations agricoles ; soutenir des modes de gestion agricole durables ; valoriser les productions locales et accompagner les projets agricoles. « Nous agissons à différents niveaux pour remplir ces objectifs, souligne Jean-Luc Langlois, chargé de mission agriculture au sein du PNR du Vercors. Par exemple, dans les années 1990, nous avons accompagné les agriculteurs dans leur démarche pour monter le dossier de dépôt pour l'obtention de l'AOC bleu du Vercors Sassenage. Aujourd'hui, le parc héberge le syndicat de l'AOC et le soutient financièrement. C'est une petite structure car le bleu de Sassenage représente environ 180 tonnes de fromages. Sans le PNR, il y a de vrais risques que l'AOC ne puisse continuer. » Toujours pour conforter les volumes de lait de la coopérative Vercors Lait qui produit le fromage, le PNR travaille au sein d'un comité local d'installation, avec la chambre d'agriculture de l'Isère, l'Apap, et les élus concernés, en association avec la Safer, au maintien de la production de lait dans la zone par l'installation et la préservation du foncier. Au sein du PNR du Vercors, plus de 200 agriculteurs exercent leur métier autour de l'élevage (bovins et ovins viande, caprins et bovins lait), céréaliers dans le Trièves, producteurs de petits fruits un peu partout, arboriculteurs, maraîchers, viticulteurs dans le Diois. Au total, ce sont sept signes officiels de qualité qui sont produits sur ce territoire. Cinq AOC : clairette de Die, vin de Châtillon, noix de Grenoble, picodon, bleu de Sassenage et deux IGP avec le saint-marcellin et les ravioles de Royan. Près de 25 % des exploitations sont en bio et un nombre conséquent d'agriculteurs pratique la vente directe. « Le PNR est un relais financier indispensable pour l'agriculture de la zone, souligne l'éleveur, François Rony. Tout le travail sur la valorisation des produits agricoles locaux ou sur les circuits courts est un avantage important tout comme le soutien dans la mise aux normes des bâtiments d'élevage. »

Des tensions plus fortes depuis l'arrivée du loup

Cependant, certaines questions, dont l'insoluble présence du loup, brouille parfois les relations entre les agriculteurs et le PNR. « Sur la question du loup, le PNR doit à la fois protéger les éleveurs et l'agriculture du parc, mais aussi protéger la faune sauvage et la biodiversité, détaille François Rony. C'est contradictoire et ingérable. Tout comme la politique de l'État sur la gestion du loup n'est pas honorable pour les éleveurs. Nous avons l'impression d'être considéré comme quantité négligeable, qu'il suffit de nous indemniser... »
De son côté, le PNR se défend d'être pro-loup. « Nous appliquons simplement la loi, qui protège actuellement le loup en France, indique Jean-Luc Langlois. Mais sur cette question, nous sommes également le relais des préoccupations des agriculteurs auprès des élus et du monde du tourisme. » Un rôle d'animateur salué par François Rony sur un autre dossier : la Pac et les zones de montagne. « Aujourd'hui, le PNR a entamé des travaux intéressants avec l'Europe sur l'avenir de la Pac d'après 2020, en organisant dernièrement le Global Food Forum à Lans-en-Vercors. » 

C. P.

 

PNR du massif des Bauges / Enclavé et longtemps considéré comme territoire à l'écart, le massif des Bauges bénéficie aujourd'hui d'une réelle attractivité. C'est en partie lié à la dynamique agricole mise en œuvre au sein du parc naturel régional.

Des handicaps naturels transformés en force

Le point fort entre le parc naturel régional du massif des Bauges et le soutien à l’agriculture sur ce territoire a été la création de l’association des agriculteurs du parc, concomitante à la naissance du PNR en 1995. Une convention a été signée entre le parc et les deux départements des Savoie et comportant la définition de deux objectifs majeurs, le soutien aux filières agricoles et tout le volet de la biodiversité, « selon une entrée économique de ces aspects », souligne Cédric Laboret, actuel vice-président de la chambre d’agriculture Savoie Mont-Blanc (CASMB) et président de l’association des agriculteurs du parc de 2007 à 2013.Agriculteur lui-même à La Motte-en-Bauges, il témoigne de cette dynamique globale mise en œuvre selon des « actions liées à la réalité » de l’agriculture au sein du territoire, c’est-à-dire ses potentialités vues selon les critères incontournables de la pertinence et de la viabilité économiques. Une véritable concertation qui a permis la validation par le PNR d’actions marquantes, qui ont d’ailleurs inspiré d’autres parcs et restent aujourd’hui des références.
Au cœur du vaste PNR du massif des Bauges qui compte 64 communes de Savoie et Haute-Savoie et six villes portes, est né le dispositif 
des prairies fleuries.
Approbation des agriculteurs
Cédric Laboret cite quatre actions majeures : celles directement liées aux filières, et particulièrement les aides apportées pour conforter l’AOP Tome des Bauges ainsi que le développement d’autres productions telles celles de plantes médicinales et aromatiques, la création de pistes d’accès aux alpages à travers le plan alpages et Natura 2000 et le concours des prairies fleuries. Cette initiative est née dans les Bauges grâce au PNR et est reconnue comme une démarche agro-environnementale scientifiquement établie, reconnue efficiente et objet désormais d’une appropriation réussie par les agriculteurs au niveau national.« La plus grande réussite, souligne Cédric Laboret, est vraiment cette dynamique adoptée par les agriculteurs, pour atteindre des objectifs économiques et environnementaux ». Selon un regard sociologique d’ensemble, l’analyse du cas du PNR du massif des Bauges est particulièrement intéressante. Sur ce territoire enclavé, rude, avec des contraintes géographiques majeures, l’agriculture présente s’est développée selon un système particulier, autarcique, les facteurs de développement possibles étant distincts d’autres régions savoyardes de plaine ou de piémont. La particularité de l’adaptation contemporaine est qu’avec la création du PNR du massif des Bauges, les actions de territoire menées l’ont été avec l’adhésion des agriculteurs, « avec des concepts qu’ils revendiquaient et partageaient », insiste Cédric Laboret. Et de résumer : « Les handicaps naturels ont été transformés en force ».Un PNR souvent précurseurSur l’initiative des prairies fleuries, l’image de précurseur du PNR du massif des Bauges est tout à fait juste. « Ce sont 2 000 hectares de prairies sur les Bauges qui ont été engagés dans la démarche », précise Jean-Luc Desbois, directeur du PNR du massif des Bauges. La mesure avait même été intégrée dans les politiques agro-environnementales de la Pac. « Et de l’échelle de la parcelle, l’ambition était d’aller encore plus loin, à l’échelle de l’exploitation ». Les objectifs européens de la dernière Pac ne l’ont pas retenu mais la stratégie de gestion – des prairies – avec obligation de résultat - reste à l’œuvre. La biodiversité amène de la résilience dans les parcelles. C’est une appropriation directe de la recherche. D’autres actions du PNR du massif des Bauges ont été par ailleurs menées en viticulture car les contreforts savoyards du massif ont de la vigne. Les actions liées au développement œnotouristique ont impliqué le PNR. 
Armelle Lacôte