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Sanitaire

Lapins : la lutte contre la VHD pâtit du manque de moyens

La filière cunicole demande au gouvernement de l’aider à mettre en place une vaccination « massive » contre la VHD. Les éleveurs font face à une recrudescence de cette maladie pouvant provoquer d’importantes mortalités.
Lapins : la lutte contre la VHD pâtit du manque de moyens

Confrontée à une recrudescence de la VHD (maladie hémorragique virale du lapin), la filière cunicole a rencontré le cabinet du ministre de l'Agriculture dernièrement pour lui demander de l'aider à mettre en place une « vaccination massive ». 132 cas de VHD ont été enregistrés entre le 1er janvier et le 25 novembre 2019 (dont 56 en activité). 193 cas avaient été notifiés en 2018. « Si rien n'est fait, beaucoup d'éleveurs vont mettre la clé sous la porte », a prévenu Serge Lefèvre, président de la Fenalap (groupements de producteurs), lors de l'assemblée générale de cette organisation, le 28 novembre. Avec quinze groupements, la Fenalap représente environ 90 % de la production nationale.

Demande d'autorisation d'autovaccins

La première demande des professionnels porte sur l'autorisation des autovaccins. Contrairement aux vaccins classiques, cette catégorie de produits n'est pas soumise à autorisation de mise sur le marché (AMM) à chaque fabrication de lot. Une procédure simplifiée qui en fait des vaccins plus rapides à produire (trois semaines au lieu de six mois, de source professionnelle) et moitié moins chers. L'autorisation d'autovaccins est basée sur une liste positive de couples « agent pathogène/espèce de destination », pour lesquels il n'existe pas de vaccins avec AMM, explique l'Anses dans un rapport paru en 2013. Des dérogations peuvent être envisagées « notamment lors de suspicion d'un défaut d'efficacité, d'impossibilités techniques d'administration et de rupture de stock des vaccins avec AMM ». En France, plus de 50 millions de doses étaient produites chaque année, selon ce rapport de l'Anses. Les demandes concernent principalement les filières avicole (69 % des doses produites en 2011) et piscicole (29,7 %) puis porcine (1,2 %).

« Inquiétude » à tous les étages de la filière

Les éleveurs de lapins disposent déjà d'un vaccin contre la VHD, utilisé systématiquement pour les cheptels reproducteurs et en cas de contamination pour les lapins engraissés. Mais son prix empêche une vaccination massive, estiment les acteurs de la filière : l'opération coûte aux éleveurs environ un euro par animal (main-d'œuvre comprise). « Actuellement, la vaccination coûte 5 millions d'euros, une vaccination massive coûterait 25 millions d'euros, note Christophe Rousseau, directeur des achats vifs chez Loeul & Piriot. Il serait très compliqué d'imposer ce montant au marché. » D'autant que la viande de lapin est en déclin depuis plusieurs années. Sur les dix premiers mois de 2019, la consommation a encore régressé de 7 %, en grandes surfaces comme en restauration.
Lors de l'assemblée générale de la Fenalap, c'est l'ensemble de la filière qui a témoigné de son « inquiétude », des sélectionneurs aux fabricants d'aliments en passant par les abatteurs. Les professionnels espèrent une réponse « rapide » du ministère sur les autovaccins, sans s'avancer sur sa teneur. En matière de biosécurité, « nous avons mis en œuvre presque toutes les actions demandées par le ministère », rappelle Serge Lefèvre pour appuyer sa demande. Aux yeux des professionnels, qui attendent la validation de fiches sur la biosécurité par le ministère depuis plus d'un an, la balle est dans le camp de la Rue de Varenne.

Une maladie encore mal connue

Par ailleurs, la section avicole du FMSE (fonds de mutualisation) a récemment décidé de prendre en charge le coût de vaccination pour 2019, à hauteur de 85 %. Une décision qui doit encore être validée par le conseil d'administration du FMSE et le ministère de l'Agriculture. Mais ces indemnisations ne couvrent pas les pertes dues à la maladie et surviennent avec un certain décalage.
Lors de la réunion du 28 novembre au ministère, les cuniculteurs ont aussi demandé au gouvernement de financer des études sur la VHD. Présente en France depuis 2016, cette maladie reste encore mal connue et resurgit parfois dans les élevages touchés, malgré les opérations de désinfection.
D'après l'Anses, elle peut provoquer « des taux de mortalité élevés (jusqu'à 90 %) ». L'enveloppe est en cours de chiffrage mais elle pourrait atteindre plusieurs centaines de milliers d'euros. Dans la filière comme au niveau des pouvoirs publics, c'est bien le manque de moyens financiers qui handicape la lutte contre la VHD. 

Y. G.