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Irrigation en grandes cultures

Le goutte-à-goutte enterré, « une technique d'avenir »

Le 1er octobre, la chambre d'agriculture de la Drôme a organisé, en collaboration avec Valsoleil, une rencontre sur l'irrigation avec le goutte-à-goutte enterré en grandes cultures et les économies d'eau possibles.
Le goutte-à-goutte enterré, « une technique d'avenir »

Le 1er octobre, la chambre d'agriculture de la Drôme a organisé avec la coopérative Valsoleil une demi-journée sur l'irrigation avec le goutte-à-goutte enterré en grandes cultures. Car « il est important de s'intéresser à des techniques innovantes, dans un contexte de changement climatique et d'économie d'eau », considère François Dubocs, conseiller spécialisé agronomie-irrigation à la chambre d'agriculture. Cette rencontre technique a eu lieu au Gaec Lacour (Jean-Michel, Claude et Clément Martin) à Saint-Michel-sur-Savasse situé dans le bassin de la Drôme des collines, où est constaté un fort déséquilibre quantitatif sur la ressource en eaux superficielles (voir ci-...).

Plusieurs intérêts

Le matériel est un levier d'économie de l'eau. D'après les données disponibles et les essais de terrain réalisés dans la région, elle est de 15 à 20 % avec le goutte-à-goutte enterré par rapport à un enrouleur, a indiqué Dorothée Dumas, responsable du service irrigation de Valsoleil. Le goutte-à-goutte enterré est plus efficient, il n'y a pas de pertes ni besoin d'une grosse pompe. La quantité d'eau est répartie uniformément sur toute la parcelle. La fertirrigation est possible. Et du temps est gagné : une fois l'installation en place, elle exige une surveillance, un nettoyage du filtre à sable mais pas de déplacements de matériel.
Sur les secteurs classés en déficit quantitatif, dans le cadre du PDRR*, des subventions sont accordées pour investissement individuel dans un système économe en eau (sans augmenter la surface irriguée), signale Dominique Forest, qui pilote les dossiers aides à l'irrigation à la DDT de la Drôme. Par exemple, pour passer de l'aspersion à l'irrigation localisée avec des microjets ou au goutte-à-goutte enterré. Pour plus d'informations à ce sujet, contacter François Dubocs (04 27 24 01 60).

Arroser régulièrement avec peu d'eau

Les participants à la rencontre regardant une vidéo sur l'installation d'un système d'irrigation goutte-à-goutte enterré.

Le Gaec Lacour a installé du goutte-à-goutte enterré l'hiver dernier sur deux parcelles. « Notre enrouleur tournait jour et nuit, a expliqué Clément Martin lors la rencontre organisée par la chambre d'agriculture. Quand nous avons voulu en acheter un autre, Valsoleil nous a fait aussi un devis pour un pivot et pour le goutte-à-goutte enterré. Ce dernier (16 300 euros pour 4,5 hectares) nous revenait moins cher qu'un pivot faisant un trois quarts de tours (20 000 euros). Nous nous sommes alors renseignés auprès de Michel Rozand, qui a du goutte-à-goute enterré depuis 2014 dans les angles de parcelles arrosées avec un pivot, à Romans. Il en est satisfait. » Présent à cette rencontre, Michel Rozand a confirmé. D'ailleurs, cette fin d'année, il va équiper cinq hectares de plus en goutte-à-goutte enterré. Cet été, qui a été sec, « nous n'avons jamais vu souffrir nos maïs irrigués au goutte-à-goutte enterré, a constaté Clément Martin. L'approche est différente d'un enrouleur, il faut arroser régulièrement avec peu d'eau. Le plus dur, au départ, c'est de bien doser. Jérôme Maloron, technicien à Valsoleil, nous a conseillé. » Pour son père, Jean-Michel : « Le goutte-à-goute enterré est une technique d'avenir ».

Autorégulation et mécanisme anti-syphon

Goutte-à-goutte enterré. Goutte-à-goutte enterré.

« Nous avons installé le goutte-à-goutte nous-mêmes, épaulés par Christophe Soulier, technicien irrigation à Valsoleil, qui a orchestré la mise en place », a précisé Clément. Les lignes (quatre à la fois et espacées de 1,20 mètre) ont été enfouies avec une sous-soleuse prêtée par Netafim (fabricant de ce matériel d'irrigation), nécessitant un tracteur puissant (210 chevaux dans le cas de cette exploitation). Un GPS a été utilisé « pour tirer droit ».
Sur les lignes, un goutteur est positionné tous les 50 centimètres délivrant 0,6 litre d'eau à l'heure quelle que soit la pression. Ces goutteurs sont autorégulants : ils apportent la même quantité d'eau quelles que soient la pente et la longueur du champ. Et un mécanisme anti-syphon (une languette en silicone se ferme après irrigation) empêche racines, terre et autres débris d'entrer dans les tuyaux. Pour son goutte-à-goutte enterré, Netafim donne une durée de vie d'environ vingt ans aux Etats-Unis.
Au Gaec Lacour, les lignes sont enterrées à 40 centimètres de profondeur. Le sol peut toujours être labouré, à environ 30 centimètres de profondeur. A la station de pompage, déjà existante, a dû être ajouté un filtre. Provenant de la nappe phréatique de la Molasse miocène du Bas-Dauphiné, l'eau utilisée est relativement propre. Par contre, avec celle de l'Isère, le goutte-à-goutte enterré n'est pas envisageable. Même avec plusieurs filtres à mailles plus fines, ils se colmateraient.

Annie Laurie

* PDRR : programme de développement rural régional.

 

Bassins Galaure et Drôme des collines /
Contexte et projets du Département
François Dubocs, conseiller spécialisé agronomie-irrigation à la chambre d'agriculture de la Drôme, lors de cette rencontre technique.
Dans les bassins de la Galaure et de la Drôme des collines, est constaté un fort déséquilibre quantitatif sur la ressource en eau provenant des rivières (eaux superficielles), rappelle François Dubocs, conseiller agronomie-irrigation à la chambre d'agriculture de la Drôme.
A la suite d'une étude des volumes prélevables (de 2009 à 2012), a été préconisée une réduction de 40 %, tous usages confondus afin de retrouver un bon état (quantitatif et qualitatif) des cours d'eau. Sur ces bassins, les prélèvements se font essentiellement dans la nappe phréatique de la Molasse miocène du Bas-Dauphiné, la part issue des cours d'eau ne représente que 6 %. Néanmoins, comme des interactions existent entre la nappe et les rivières, l'irrigation est aujourd'hui impactée par la réduction des prélèvements.
Une modélisation de la nappe
Le Sage (schéma d'aménagement et de gestion de l'eau) - porté par le Département et à cheval sur la Drôme et l'Isère - a entériné que cette baisse était inatteignable et incompatible avec le maintien de l'activité agricole déjà fragile. C'est pourquoi le conseil départemental a décidé de lancer deux projets. L'un, dont le démarrage est prévu en 2020, est une modélisation (étude d'une durée de trois ans) de cette nappe afin d'améliorer la connaissance scientifique de celle-ci et ses relations avec les cours d'eau. Cela dans le but de pouvoir arbitrer les possibilités d'utilisation de la nappe sans compromettre son bon fonctionnement et de déterminer les volumes prélevables pour l'ensemble des usages. Ce sera un outil de gestion. Ce modèle de nappe, qui appartiendra au Département, permettra d'ajuster les prélèvements. Pendant la durée de l'étude (en attendant ses résultats), un moratoire interdit tous les nouveaux prélèvements, exceptée la substitution.
Un schéma d'irrigation
L'autre projet du Département est l'élaboration d'un schéma d'irrigation visant à formuler des propositions concrètes. Dans ce cadre, cette année, deux stagiaires ont dressé un état des lieux de l'irrigation dans les bassins de la Galaure et de la Drôme des collines. En 2020, la tâche consistera à définir des sites potentiels de retenues collinaires collectives (stockage en périodes de hautes eaux) et à en appréhender les coûts.
A. L.

 

Le Gaec Lacour

Claude, Jean-Michel et Clément Martin (de gauche à droite).
Tois associés : Clément Martin (installé depuis cinq ans), son père, Jean-Michel, et son oncle, Claude.
150 porcs abattus annuellement.
Vaches charolaises : environ 100 vélages par an.
Quelque 300 hectares de prairies et d'alpages à disposition.
Autour de 20 hectares de maïs ensilage, dont 15 détruits par la grêle et resemés fin juin.
10 hectares de noyers.
Irrigation : 2 pivots (arrosant un peu plus de 6 hectares chacun), un enrouleur et une instalation goutte-à-goutte enterré dans trois parcelles (5,8 hectares).
Un atelier de découpe et transformation (créé en 1998 avec d'autres agriculteurs), implanté sur les terres du Gaec.
Commercialisation à la ferme, en magasins de producteurs et en dépôt-vente de viande de bœuf, veau et de charcuteries.