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Pep Caprin

Le pâturage, une étape à bien gérer

Le pôle d’expérimentation et de progrès (Pep) caprin a organisé deux journées techniques à destination des éleveurs, une en Ardèche et une dans l’Ain, sur les bonnes pratiques de pâturage. Une problématique essentielle pour la performance les exploitations caprines concernées.
Le pâturage, une étape à bien gérer

La gestion des pâturages est parfois assurée de manière empirique par les éleveurs. Pourtant, en maîtrisant quelques points clefs, l'exploitant peut obtenir des gains importants qui impactent directement le niveau de production laitière. Dans cet objectif, l'estimation de la quantité d'herbe disponible pour éviter de faire pâturer le troupeau dans une herbe trop rase ou trop dense, est la première étape.

Sortir tôt

Pour estimer la quantité d'herbe disponible, deux options sont possibles. L'herbomètre qui s'utilise sur des parcelles en graminées. Il faut prévoir une quarantaine de mesures par hectare, réparties au hasard et uniformément sur la surface concernée, pour avoir une estimation relativement fiable. La seconde est l'appréciation visuelle, « à la botte ». Trois repères sont généralement retenus : le talon (5 cm) soit environ 250 à 500 kg de matière sèche (MS) d'herbe/ha ; la cheville (10 cm) soit 1 à 1,5 tonne de MS d'herbe/ha et le mi-mollet (13 cm), plus de 2,5 tonnes de MS d'herbe/ha. Il faut faire paître le troupeau au moment opportun. « Quand l'herbe se couche au passage des chèvres, cela engendre des pertes, résume Philippe Thorey, animateur du Pep caprin. Il faut alors faucher cette parcelle et non la pâturer .»
Le choix de la date du début de saison de pâture n'est pas anodin. Il est judicieux de sortir tôt pour anticiper la forte pousse d'herbe de printemps, c'est-à-dire dès l'apparition des premiers brins verts sur la prairie à la sortie de l'hiver. Quitte à devoir rentrer le troupeau si les conditions météorologiques se dégradent. La complémentation en fourrage sera alors plus importante les premiers jours puis diminuera peu à peu, ce qui permet une transition en douceur et évite des problèmes sanitaires. D'autre part, en contrôlant les fortes poussées par la pâture, on maintient ainsi une bonne qualité d'herbe.

Maximiser l'ingestion

En période de plein pâturage, l'éleveur doit chercher à tirer le meilleur profit de la quantité d'herbe et pour cela maximiser l'ingestion. L'optimum en termes de taux d'ingestion se situe autour de 3 kg de MS offerte par jour et par chèvre contre l'ingestion de 2 (soit un taux de refus de 33 %). Il faut que la qualité soit au rendez-vous avec une herbe bien feuillue. Pour les graminées, la hauteur idéale se situe entre 6 et 12 cm. Pour les luzernes, la meilleure valorisation est avant floraison avec une tige principale de 20 à 40 cm. La vitesse moyenne d'ingestion au pâturage étant de 300 g/h de MS avec un pâturage effectif de 70 % du temps, il faut compter 10 heures de pâture par jour pour ingérer 2 kg. Il est parfois nécessaire de limiter les apports en chèvrerie pour que les animaux gardent de l'appétit au pré. Dans cette quête du bon équilibre de l'alimentation, l'éleveur doit adapter ses surfaces disponibles, pour pâturer, selon la saison. Au printemps, l'herbe pousse vite, la surface doit être réduite. Et inversement l'été. Enfin, lorsque les conditions ne sont pas réunies (temps de pâture limité, qualité médiocre, quantité insuffisante), l'exploitant doit assurer une complémentation, soit en fourrage pour apporter des fibres, soit en concentré pour enrichir la ration. Le concentré est utile en cas d'herbe de mauvaise qualité pour compenser la faible teneur azotée. La quantité journalière de concentré restera comprise entre 0,3 et 0,8 kg. 

Dossier réalisé en collaboration avec P.Thorey (Pep Caprin), V.Desbos (ACE), B.Deltour (GDS 26), C. Facundo (CA01)
et Y.Lefrileux (Station du Pradel) Plus d'informations : www.pep.chambagri.fr

 

 

Les journées techniques du Pep caprin sont l’occasion d’échanges entre les éleveurs.
 
Les journées techniques se sont aussi déroulées sur le terrain, sur les pâturages de Laurent Montagnon à Saint-Cyr (Ardèche) et d’Emilie Creuze à Domsure (Ain).
A Saint-Cyr, Laurent Montagnon pratique le pâturage depuis vingt ans. Pour autant, malgré son expérience, les possibilités de progression existent. « On peut toujours s’améliorer. Le plus compliqué, c’est la gestion de la quantité d’herbe à prévoir au jour le jour. C’est tellement variable selon la météo, le millésime, la qualité… ». Depuis deux ans, l’éleveur mesure l’herbe deux fois au printemps avec son contrôleur laitier. « L’herbomètre est beaucoup plus précis que le jugement visuel », reconnaît-il. Du côté des parasites, la diminution de la pression est notoire « depuis que je gère avec deux blocs de pâture distincts. Je fais une coproscopie entre les deux et un traitement adapté ». Les résultats sont nets : « dès qu’il y a une erreur, la courbe de production chute et inversement ».Des résultats probantsInstallée depuis 2008, Emilie Creuze a dû rapidement s’interroger sur la gestion de ses pâturages. « Nous sommes en Bresse sur une zone assez humide. L’herbe pousse vite et les parasites se développent. Nous avons instauré des pâturages tournants et l’usage de coproscopies au bon moment. Il faut savoir prendre le temps de la réflexion, cela vaut la peine. On améliore ainsi l’état des chèvres, leur santé et la production laitière. » 

 

Le parasitisme peut avoir des conséquences sanitaires et économiques pénalisantes pour l’éleveur. S’il est vain de vouloir l’éviter, il peut être maîtrisé.
Gérer les strongles gastro-intestinaux

Parmi les parasites qui peuvent infester les chèvres, ceux situés dans l’appareil digestif révèlent un caractère pathogène s’ils sont présents en grand nombre. L’utilisation du pâturage entraîne systématiquement la présence de parasites gastro-intestinaux chez l’animal. Les chèvres développent peu d’immunité face à ces parasites. Il est donc vain de vouloir l’éradiquer, il faut simplement essayer de le maîtriser. Pour cela, plusieurs actions  sont possibles. La gestion des surfaces de pâture est le meilleur outil. Les parasites se retrouvent sous forme d’œufs dans les fèces et évoluent en larves qui peuvent survivre plusieurs mois dans les prairies, installées sur les brins d’herbe. La rotation des parcelles permet de faire baisser la pression parasitaire. Il ne faut pas dépasser trois mois d’utilisation successifs du même groupe de parcelles et provoquer des séances de rupture. La pratique de coprologies à des moments clés permet ensuite d’adapter sa réponse : prise d’un antiparasitaire ou changement de blocs. Enfin, il est souhaitable de réduire le risque d’apparition de résistances, donc de limiter le nombre de traitements à un ou deux par saison en les positionnant au mieux et de vérifier par coproscopie leur efficacité. Il est préférable de ne traiter que la moitié du troupeau pour limiter les risques de résistance aux antiparasitaires. D. B.