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Viticulture

Le préfet au contact des vignerons drômois

La chambre d'agriculture de la Drôme et les trois fédérations départementales viticoles (IGP, vignerons indépendants, vignerons coopérateurs) ont convié le préfet, Eric Spitz, à découvrir la viticulture drômoise. Lors d'un parcours en trois étapes (La Laupie, Vercheny et Tain-l'Hermitage), ont été abordés les enjeux, perspectives et problématiques de cette filière.
Le préfet au contact des vignerons drômois

«Sur le plan économique, avec 1 480 exploitations et 16 000 hectares, dont 87 % sont en appellation, la filière viticole est en tête des productions végétales du département. C'est un secteur très dynamique mais avec des préoccupations », a indiqué Pierre Combat, vice-président de la chambre d'agriculture en charge de la viticulture, en accueillant le préfet chez Adelin Marchaud, le 19 juillet à La Laupie. Ont entre autres été évoquées les difficultés à transmettre et installer dans un environnement de plus en plus spéculatif. « L'enjeu est de pouvoir conserver des exploitations familiales », a souligné Pierre Combat lors des différentes visites. L'encadrement des traitements phytosanitaires, la baisse des rendements liée au changement climatique ou encore la concurrence internationale ont aussi été cités.

Un marché IGP sous pression

Pour conserver son dynamisme, la filière a des attentes. L'une d'elles est le maintien des soutiens à la recherche et l'expérimentation. Une autre est le développement de l'œnotourisme. Au fil des visites, en présence de responsables viticoles, d'élus locaux et de représentants de la DDT1, d'autres enjeux ont été évoqués.
Chez Adelin Marchaud, qui préside la fédération drômoise des IGP2 viticoles et gère une exploitation d'une cinquantaine d'hectares (15 de vignes et 35 de céréales), un point a été fait sur cette catégorie de vins. Elle regroupe trois dénominations : IGP Drôme, IGP collines rhodaniennes et IGP coteaux des Baronnies. L'ensemble représente plus de 1 000 apporteurs de raisins et 161 opérateurs (coopératives, caves particulières et négoces). « L'intérêt de l'IGP est de donner aux consommateurs la garantie de l'origine tout en laissant une certaine liberté aux producteurs car les contraintes sont moindres qu'en AOP3 », a expliqué Adelin Marchaud. Sur la Drôme, une centaine de cépages est autorisée et l'irrigation de ces vignobles est possible. »
Sur le marché des IGP, est observée une baisse de la consommation au premier semestre et un léger tassement des prix, alors que l'offre augmente après les belles récoltes de 2014 et 2015. L'importation massive de vins espagnols sans IG avive la concurrence. Cette situation inquiète, tout comme l'extension de la flavescence dorée dont un foyer vient d'être découvert en zone montilienne. La lutte obligatoire contre le vecteur de cette maladie (cicadelle) impose des traitements, lesquels sont désormais encadrés par un arrêté préfectoral (lire page 3). « Nous devons pouvoir intervenir la nuit, encore faut-il ne pas être empêché de le faire à la suite de plaintes du voisinage pour cause de bruit », a fait remarquer Adelin Marchaud. « Tout réglementer n'est pas la solution, a ajouté Anne-Claire Vial, présidente de la chambre d'agriculture. Il faut pouvoir expliquer que le but est de préserver le vignoble ». Le préfet s'est montré rassurant, indiquant que son arrêté donne aux maires la possibilité de « faire du sur-mesure ». Pour Pierre Combat, mieux vaut anticiper en rencontrant les maires via leur association départementale afin qu'ils comprennent les contraintes des viticulteurs.

Œnotourisme

A La Laupie, Adelin Marchaud a également annoncé le lancement avec la chambre d'agriculture d'une expérimentation sur les cépages résistants au mildiou et à l'oïdium. « Et l'œnotourisme est un sujet à relancer en Drôme avec les collectivités territoriales, notamment la Région », a souhaité Anne-Claire Vial. « L'enjeu est d'accroître les structures d'accueil », a ajouté Sylvie Chevrol, présidente des Vignerons indépendants de la Drôme. Selon Jean-François Julian, président des Vignerons de Valléon4, « un travail de fond est à mener entre les caves et les autres acteurs du tourisme. » Et pour Mathieu Rozel, président de l'AOP Grignan-les-Adhémar, « il faut une évolution législative » pour lever les flous juridiques liés à ce type d'activité, notamment pour les petites structures.

Avec 1 480 exploitations et 16 000 hectares, dont 87 % sont en appellation, la filière viticole est en tête des productions végétales du département.

Sangliers, grêle...

D'autres sujets ont été évoqués comme les dégâts de sangliers. « Il faut soit davantage de battues, soit une revalorisation du barème des indemnités, aujourd'hui dérisoire », a considéré Mathieu Rozel. Concernant les dégâts de la grêle, de plus en plus fréquents, la situation est jugée préoccupante. « Des aides structurantes et des solutions d'assurance accessibles et efficientes sont nécessaires », a déclaré Pierre Combat. Et pour pouvoir garder sa clientèle suite à un aléa, « les vignerons doivent pouvoir acheter du raisin dès lors qu'un arrêté préfectoral est signé suite à un sinistre, sans pour autant perdre le statut de récoltant », a considéré Sylvie Chevrol. Tous ont par ailleurs dénoncé les retards de règlement des aides Pac et le verrou que constitue la règle des minimis. En matière foncière, Pierre Bonnefoi, président du comité des vignerons de Vinsobres, a soulevé les incohérences des relevés cadastraux lors de certains contrôles sur des parcelles entières.
Reconnaissant le côté ardu de la réglementation, le préfet s'est dit attentif à préserver les intérêts agricoles. De leur côté, les producteurs ont mis en avant la complémentarité entre AOP, IGP et cru, laquelle permet une segmentation commerciale offrant des vins drômois pour tous les goûts et toutes les bourses.

Christophe Ledoux

(1) DDT : direction départementale des territoires.
(2) IGP : indication géographique protégée.
(3) AOP : appellation d'origine protégée.
(4) Vignerons de Valléon : coopérative issue de la fusion des caves de Saint Pantaléon-les-Vignes et de la Valdaine.