Les caves coop attendent de la Pac du soutien à l’investissement

«Contrairement à d'autres secteurs, le choix a été fait en matière de politique vitivinicole d'appuyer une politique d'investissement (à travers les aides aux projets de l'OCM viticole, NDLR). Nous sommes très favorables à cette approche et nous souhaitons la confirmer », a déclaré Boris Calmette, président de la Confédération des coopératives vinicoles de France (CCVF) lors de leur congrès qui s'est tenu, en pleine réflexion sur la réforme de la Pac, le 28 juin à Vogüé (Ardèche). D'ailleurs, la Commission européenne ouvre des pistes aux autres filières pour développer de tels programmes, a-t-il relevé. La viticulture française a toujours rejeté le système des aides forfaitaires à l'hectare et préfère les aides « structurantes », allouées aux projets.
« Mais nous devons aussi être clairs, a ajouté le président de la CCVF. Nous faisons des efforts, mais ces efforts ont un coût. Le gouvernement doit entendre que les règles qui nous sont imposées doivent être les mêmes que celles qui s'appliquent à nos concurrents. » La profession ne saurait accepter « une batterie de contraintes nouvelles qui ne s'appliqueraient pas de la même manière aux vins importés ou qui nous défavoriseraient sur les marchés d'export ».
La RSE (responsabilité sociale et environnementale des entreprises) va s'imposer de plus en plus à la viticulture, augmentant les coûts. Mais plutôt que subir, les caves coopératives veulent investir dans la recherche et l'innovation, notamment pour réduire les phytos, ont-elles souligné.
Enclins à faciliter les conversions bio
Le congrès de la CCVF a développé les calendriers de renforcement des obligations environnementales qui attendent la viticulture. Jean-Pierre Van Ruysk, directeur général de l'Institut français de la vigne et du vin, a rappelé les échéances qui découlent du plan de la filière viticole élaboré dans le cadre des Etats généraux de l'alimentation (EGA) : réduire de 50 % l'usage des produits phytos d'ici 2025 ; mettre en œuvre immédiatement le principe d'évitement des produits les plus dangereux et de limitation du nombre de traitements par an ; passer très rapidement (trois ans) à l'obligation de suppression du désherbage chimique sur au moins 50 % de la surface (hors vignoble de pente et à faible écartement) ; développer les pulvérisations adaptées et confinées (objectif : les deux tiers du parc non conforme renouvelé d'ici cinq ans).
« Nous devons également encourager les vignerons à poursuivre leurs efforts pour produire "propre" notamment en facilitant les conversions bio, la démarche HVE (de haute valeur environnementale), le respect de la biodiversité et plus largement les pratiques respectueuses de l'environnement, toujours dans le respect des hommes », a renchéri Boris Calmette. La CCVF tient une position pro-active, prête à faire mieux que la réglementation.
Réticence à certaines obligations
Mais le congrès a montré la réticence de la profession à se voir imposer des obligations de façon réglementaire. Invité à une table ronde, Jérôme Despey, vigneron coopérateur et président du conseil viticole de FranceAgriMer, a exprimé son désaccord sur l'introduction d'obligations environnementales dans les cahiers des charges des signes de qualité comme les AOC, les IGP, etc. « Qu'on accélère les solutions alternatives, d'accord. Mais l'obligation n'est pas, à mon avis, ce qui fera qu'on entrera dans une démarche de progrès. Il faut susciter l'adhésion. La réglementation française fait trop de surtransposition », a-t-il indiqué, citant, a contrario, les innovations qui pourraient être mises en œuvre avec les drones de précision pour le traitement des vignes.
Invité à se prononcer sur cette question, Jean-Louis Piton, président de l'Inao (Institut national de l'origine et de la qualité), a tenu une position similaire : « Sans opposer un "non" catégorique à ce projet, nous préférons les démarches volontaires. Il faudra en tout cas une application souple du dispositif. Sinon, bonjour la complexité du système ! »
Réduction de l’usage des pesticides : des exemples d’actions
Plusieurs exemples de réalisations allant dans le sens de la réduction de l’usage des pesticides ont été cités à ce congrès. Philippe Dry, directeur de l’Uvica, l’Union des vignerons ardéchois, a montré les actions de la marque de vin « Ardèche par nature » : réduction des doses, vigilance sur le bruit, couvert végétal entre les vignes l’hiver.Guillaume Barou, vice-président de la cave coopérative de Monbazillac (Dordogne), a exposé les opérations menées pour réduire sans insecticide la population de vers à grappes. Les diffuseurs de phéromones ont été mis en place en 2014 sur 120 ha, et maintenant sur 1 200 ha. La cave coopérative a noué un partenariat avec un collège. Les élèves de cinquième fabriquent les nichoirs, les posent, et par la même occasion suivent des cours de nature, ce qui permet en même temps de tisser des liens entre les vignerons et les riverains.