Les chasseurs de la Drôme orphelins de leur président

Alain Hurtevent, président de la fédération des chasseurs de la Drôme (FDC 26), s'est éteint samedi dernier à l'hôpital de Valence. Agé de 69 ans, il a succombé des suites d'un cancer du poumon, déclaré depuis quelques mois. Originaire du Pas-de-Calais, cet ancien colonel de gendarmerie avait été le patron des gendarmes de la Drôme, de 1998 à 2000. Décoré de la légion d'honneur, il avait terminé sa carrière au service de Matignon. « Il avait un fort caractère, une forte personnalité, confie Jean-Louis Briand, secrétaire général de la FDC 26 et lui-même ancien gendarme. Il a travaillé de toutes ses forces pour le monde de la chasse. » Alain Hurtevent était également administrateur de l'office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), trésorier adjoint de la fédération nationale des chasseurs et jusqu'à l'année dernière président de l'observatoire des galliformes de montagne. « Chaque fois qu'il se rendait à Paris, il revenait avec plein d'idées, ajoute Jean-Louis Briand. Chasseur depuis toujours et passionné, c'était un visionnaire. »
Des réalisations nombreuses
Soucieux de rester actif à sa retraite, Alain Hurtevent avait été élu président de la fédération des chasseurs de la Drôme en 2010, lors de l'assemblée générale tenue à Buis-les-Baronnies. Une structure forte de 15 000 adhérents et plus de 350 associations communales de chasse agréées (ACCA). « Dès qu'il a eu la main, il a modifié beaucoup de choses au sein de la fédération », indique Jean-Louis Briand. Ainsi, afin d'optimiser la gestion de toutes les espèces de faune sauvage, il a notamment œuvré à la création de 35 groupements de gestion cynégétique (GGC), avec une gouvernance élargie à diverses administrations et organismes y compris aux associations de protection de la nature, lesquelles n'ont jamais désigné de représentants, regrettait Alain Hurtevent. Sous sa présidence, a aussi été bâti un plan triennal de chasse pour les ongulés sauvages (cerf, chevreuil, mouflon, chamois) ainsi que la mise en œuvre d'indicateurs de changements écologiques (ICE) pour ces espèces. « Nous sommes la seule fédération en France à avoir mis en place de tels outils, souligne Jean-Louis Briand. Tout cela a demandé beaucoup de travail, de convictions et d'échanges parfois difficiles. » La FDC 26 finira par être association agréée au titre de l'environnement, un agrément renouvelé en 2017 pour cinq ans. « Peu de fédérations de chasseurs ont ce titre », fait remarquer Jean-Louis Briand.
Une volonté d'ouverture
Cette volonté d'ouverture du monde de la chasse et la reconnaissance des effets bénéfiques de celle-ci est l'un des marqueurs principaux de la présidence d'Alain Hurtevent. Ainsi, la fédération des chasseurs de la Drôme travaille désormais avec 80 organismes différents, notamment agricoles. « C'était un grand responsable, considère Anne-Claire Vial, présidente de la chambre d'agriculture de la Drôme. Il a conduit un travail remarquable et fait avancer la fédération de la chasse avec, entre autres, une vision exigeante de l'organisation, une prise en compte des problématiques agricoles, une volonté de promouvoir la chasse auprès des jeunes. » Dans les partenariats conduits avec le monde agricole, figurent notamment une action sur les Cipan*, une convention « Agrifaune » (qui sera signée ce vendredi) et un soutien complet aux éleveurs concernés par la prédation du loup. A ce sujet, « en moyenne montagne, le loup est un problème économique, social et environnemental majeur, disait Alain Hurtevent en s'adressant à des étudiants en master de l'environnement venus à Crest en octobre 2015. Il n'y a aucun extrémisme à vouloir réguler une population animale. Un berger qui s'en va d'une montagne, c'est un biotope qui se ferme et une biodiversité qui recule. »
Didier Beynet, responsable du dossier chasse à la chambre d'agriculture de la Drôme, évoque lui aussi un président à l'écoute de la profession agricole, soucieux d'avoir de bonnes relations avec les agriculteurs « même si parfois nous n'étions pas d'accord. Un travail assez important a été mené sur le dossier des dégâts de gibiers. Et sur la prédation, ajoute-t-il, il a été proche des éleveurs, ce qui est très appréciable. » De leurs côtés, la FDSEA et JA de la Drôme ont loué la « vision et l'écoute » d'Alain Hurtevent qui « ont permis d'avancer de façon positive sur des sujets communs entre agriculture et chasse et de tracer des lignes d'avenir. Nous n'oublierons également jamais son engagement au côté des éleveurs pour lutter contre la prédation », ajoutent les deux syndicats.
A ses obsèques, le 30 août à Aouste-sur-Sye, était attendu beaucoup de monde, parmi lesquels de nombreux responsables agricoles venus présenter leurs condoléances aux proches du défunt.
Christophe Ledoux
* Cipan : culture intermédiaire piège à nitrates.