Accès au contenu
Prédation

« Les jeunes ne croient pas à un avenir en présence de loups »

Alain Baudouin, président de l'Association des éleveurs et bergers du Vercors Drôme-Isère, estime que le loup grève le devenir des fermes pastorales.
« Les jeunes ne croient pas à un avenir en présence de loups »

En termes de prédation, quel est le bilan de l'année 2018 ?

« Il faut des tirs de prélèvement dès le lendemain de la première attaque selon le principe "action- réaction" », réclame Alain Baudouin, président de l'association des éleveurs et bergers du Vercors Drôme-Isère.

Alain Baudouin : « Du fait des loups, 12 515 animaux domestiques sont encore morts en 2018 sans compter les disparus et ceux non indemnisés chez les non éleveurs. En Drôme, ont été reconnus 166 attaques et 544 animaux tués. Le problème s'aggrave. De ce fait, le renouvellement des générations n'est plus assuré sur les fermes, les jeunes ne croyant pas à un avenir en présence de loups. Tout a été tenté pour protéger nos troupeaux mais malgré ces efforts, les dégâts augmentent. Il faut aussi souligner le risque pris au niveau sanitaire, comme le retour de la rage, avec une population de loups qui explose. »

 

Qu'attendez-vous désormais : une hausse des prélèvement de loups?
A. B. : « Lorsque des souris sont dans une maison, les habitants agissent immédiatement. De la même manière, dès lors que les loups sont proches des troupeaux, on devrait pouvoir agir de suite. Autrement dit, il faut des tirs de prélèvement dès le lendemain de la première attaque selon le principe "action-réaction". De plus, il faut davantage prélever et, dans certains cas, toute la meute lorsque celle-ci est habituée à attaquer des animaux domestiques. Par ailleurs, il faut désacraliser le loup au niveau européen car l'animal n'est pas du tout en voie de disparition. Mais ce dossier se heurte à la règle de l'unanimité lors des votes, ce qui pose problème. Enfin, vue la multiplication des chiens de protection des troupeaux, qui sont obligatoires, il faut dépénaliser les éleveurs en cas de conflit ou problème avec les autres utilisateurs de l'espace, notamment les randonneurs. Il est inadmissible que des éleveurs se retrouvent devant les tribunaux. »

 

Lors de l'assemblée générale de votre association, le 6 avril à Combovin, la fédération des chasseurs a présenté une étude sur la présence des loups en Drôme (voir encadré). Qu'en retenez-vous ?
A. B. : « L'étude des chasseurs de la Drôme démontre clairement que les chiffres de présence des loups sont très sous-estimés et qu'une autre gestion de population des prédateurs est nécessaire. On ne résoudra rien avec un prélèvement à 85 ou 90 loups qui se base sur un chiffre très sous-évalué de la population. Si rien ne change vraiment, le nombre de loups va continuer à augmenter, leur territoire va s'étendre. Et l'élevage pastoral, là où les loups sont présents, finira par disparaître et avec lui une partie de la vie de nos territoires. Tenter de nous faire croire que d'autres moyens de protection sont possibles, que d'autres études sont nécessaires, que nous devons nous adapter relève de l'irresponsabilité et du mépris. »

Propos recueillis par Christophe Ledoux

Etude / Afin de venir en aide aux éleveurs et aux bergers et tenter de comptabiliser les loups, la fédération drômoise des chasseurs a mené une étude.

Le piège photo : un « lanceur d'alerte potentiel »

L'installation de pièges photos sur les zones pastorales de Bouvante-Léoncel et de la Roanne (Volent, Chalancon), à proximité des parcs de nuit et en estives, a permis de repérer des meutes de loups comprenant jusqu'à treize individus. C'est ce qui ressort de l'étude menée par la fédération drômoise des chasseurs (FDC26). Sur plus de 110 000 photos prises, 1 600 comportaient des loups. Les déplacements du prédateur ont été observés autant de jour que de nuit, sur les chemins et en forêt. A noter, aucun chien divagant n'a été photographié. Dans certaines communes - Léoncel en particulier - les photos montrent des va-et-vient incessants, surtout la nuit, avec un retour des loups sur leurs victimes dans 90 % des cas les soirs suivant les attaques.
La FDC26 estime que le piège photos est un outil utile pour la surveillance des troupeaux, en tant que « lanceur d'alerte potentiel ». Une prise de vue de loups dans les secteurs situés à une altitude plus basse que les estives permettrait d'anticiper une attaque sur les troupeaux. Quant au comptage du prédateur, la FDC26 estime entre 70 et 90 loups présents en Drôme, un chiffre très supérieur à celui de l'office national de la chasse et de la faune sauvage, qui en dénombrerait moins d'une quarantaine.