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COVID-19

Les leviers techniques pour réduire la production des vaches laitières

Confrontés à la crise sanitaire liée à l’épidémie de coronavirus, les producteurs de lait sont appelés à modérer la production de leurs cheptels laitiers. Dans une note diffusée le 31 mars, le Cniel recense les leviers techniques permettant un lissage des volumes.
Les leviers techniques pour réduire la production des vaches laitières

Réduire de quelques points la production laitière est techniquement réalisable (anticiper les réformes et les dates de tarissement, réduire les concentrés de production et azotés). Mais tout changement de ce type peut engendrer une réorganisation dans les exploitations », indique le Cniel dans une note le 31 mars, dans laquelle l'interprofession expose les leviers techniques pour réduire la production des vaches laitières. En préambule, et afin de respecter le bien-être et la biologie des vaches, il ne faut en aucun cas limiter l'apport d'eau et de fourrages. En conséquence, pour les troupeaux avec une ration 100 % pâturage, les leviers d'écrêtement du pic de production se trouvent restreints au tarissement anticipé, à la réforme et à la monotraite, prévient le Cniel, qui recommande aux éleveurs de prendre contact avec un conseiller.
Le tarissement
Le tarissement ne s'applique que sur une petite partie du troupeau et se raisonne vache par vache. Le Cniel rappelle qu'il faut tarir uniquement les vaches qui ont 6 mois ou plus de gestation et dont le niveau de production est inférieur à 20 kg de lait par jour. « Il est préférable de privilégier le tarissement des primipares plutôt que les vieilles vaches », commente Jean-Philippe Goron, d'ADI Conseil élevage (Ardèche-Drôme-Isère). Afin d'éviter les infections mammaires, prendre conseil auprès de son vétérinaire pour le protocole de soin ; en effet l'augmentation de la durée de tarissement peut entraîner un risque accru d'infections. Pendant une à deux semaines après le tarissement, privilégier une alimentation fibreuse.
Recommandations : nécessité de bien maîtriser le tarissement sinon risque d'infections mammaires lors de la prochaine lactation. Gestion particulière des taries. éviter un engraissement des vaches taries par un rationnement strict.
La réforme
Deuxième levier possible, celui de la réforme. Pour sa mise en œuvre, le Cniel conseille d'anticiper les réformes qui avaient été prévues, mais de réformer uniquement les vaches non gestantes et dont la production est inférieure à 20 kg de lait par jour. « Il ne s'agit pas de se démunir du troupeau laitier, mais plutôt de bien cibler les vaches à réformer, en cherchant les vaches laitières les moins rentables ou celles qui ont le plus de problèmes, de boiteries, de mammites ou qui sont vides. Le tri doit juste être plus sévère et plus précoce que d'habitude, mais pas plus important », précise le conseiller laitier.
Risque : il faut analyser les besoins du marché de la viande. Le transport des vaches qui sont dans leur dernier mois de gestation est également interdit (ce qui nécessite de garder les vaches). Une vache doit être tarie avant d'être transportée à l'abattoir.
La réduction des concentrés
1. Diminuer le concentré de production sur une ration équilibrée
Ce procédé peut être utilisé pour l'ensemble du troupeau de vaches laitières ou un lot. équilibrer au préalable la ration de base et assurer une alimentation à volonté (voir tableau 1).
Résultats : réduction du coût alimentaire, effet immédiat et réversible et modification des taux de matière utile du lait.
2. Adapter la quantité de correcteur azoté
Ce levier peut être utilisé pour l'ensemble du troupeau de vaches laitières ou pour un lot. Le Cniel préconise d'assurer une alimentation à volonté. Pour réduire le rapport PDI/UFL de 10 points, il faut supprimer 1 kg de tourteau de soja ou 1,5 kg de tourteau de colza (voir tableau 2).
Faisabilité et réversibilité : nécessite des fourrages de bonne qualité. L'effet est immédiat et réversible et engendre une baisse marquée du taux protéique du lait.
« Pendant cette période, l'idéal est de pouvoir profiter à plein du pâturage pour limiter au maximum les concentrés. Ça peut aussi valoir le coup de fermer un silo plus tôt, pour garder les bons stocks et servir une demande cet été, au moment où il faudra redémarrer la production », explique Jean-Philippe Goron. L'effort demandé à chaque troupeau serait de réduire de 5 % la production : « 1 litre de lait en moins, c'est 1 kg de concentré ». Un effort qui pourrait aussi être cohérent avec la gestion des fourrages, dans nos régions « à cours d'alimentation ».
La distribution de lait aux veaux
Distribuer le lait entier aux veaux est un autre levier possible. Il faut privilégier l'alimentation du veau avec du lait entier dès la naissance ; sinon remplacer la buvée à base de poudre de lait par le lait entier (dans ce cas, veiller à respecter une transition de trois jours).
Recommandations : chauffer le lait à 40°C et le distribuer immédiatement et moduler les volumes en fonction du TB. Attention à l'hygiène et à la qualité sanitaire du lait lors de la distribution, prévient le Cniel.
La monotraite
Réaliser une seule traite par jour est une autre mesure technique possible. Elle peut être pratiquée sur tout ou partie de la lactation. Pour la mettre en œuvre, le Cniel préconise l'apport d'une alimentation azotée et la réduction de l'apport de concentrés. En robot, possibilité de réduire la fréquence de traite, par exemple en passant à deux traites par jour (voir tableau 3).
Condition d'efficacité : avoir un troupeau sain au niveau des concentrations cellulaires (lire plus haut). Les vaches vont connaître un stress important les premiers jours de la monotraite. La rémanence varie selon les situations. Le potentiel de production des filles peut être réduit si cette monotraite est maintenue sur une longue période (épigénétique). 

Source : Leviers techniques pour réduire la production laitière - Cniel, experts de l'Institut de l'Élevage (J. Jurquet, P. Roussel) – 31 mars 2020.