Les lieutenants de louveterie, un rôle accru pour enrayer la prédation

Au 1er janvier 2020, le département de la Drôme compte 28 lieutenants de louveterie, bénévoles de l'administration. « Le lieutenant est nommé pour une durée de cinq ans renouvelables dans sa circonscription. Le dernier renouvellement général a eu lieu fin 2019, explique Patrice Béringer, en charge du dossier loup à la direction départementale des territoires de la Drôme (DDT). Les lieutenants de louveterie concourent sous l'autorité du préfet et sont amenés à intervenir pour la destruction des animaux susceptibles d'occasionner des dommages et à la régulation des animaux à l'origine de divers dégâts », poursuit-il.
Conseils et médiation
Pour être lieutenant de louveterie, il faut respecter un certain nombre de conditions : être âgé de moins de 70 ans (limite d'âge à 75 ans), justifier d'aptitudes physiques compatibles avec la conduite d'actions de chasse en toute autonomie et être réactif. Pour exercer ses missions, le lieutenant de louveterie doit également être titulaire du permis de chasser, justifier de compétences cynégétiques et prouver qu'il n'a fait l'objet d'aucune condamnation. Il peut alors être assermenté et, de ce fait, constater les infractions à la police de la chasse, ce qui est loin d'être l'essentiel de ses missions.
« Notre rôle est aussi d'arrondir les angles sur le terrain entre agriculteurs, élus, chasseurs, protecteurs de la nature... La médiation est la base de notre fonction, affirme Michel Metton, président du groupement de louveterie régional et départemental. Nous avons un rôle de "conseil" auprès de l'administration en matière de gestion de la faune sauvage, au-delà des seules espèces classées nuisibles », souligne-t-il, en prenant moult précautions quant au modus operandi. Aussi, les chasses et battues administratives sont organisées sous leur contrôle et sous leur responsabilité technique.
120 autorisations de tirs de défense depuis 2016
Pour le loup, les lieutenants de louveterie sont priés d'intervenir par arrêté préfectoral lors d'opérations ponctuelles. « Le loup relève d'une importance toute particulière dans le département de la Drôme depuis une dizaine d'années, ce qui a amené l'administration à confier des interventions pour la défense de troupeaux, sous forme d'appui et de réalisation de tirs de défense. Ce sont les éleveurs eux-mêmes, avec l'obligation de justifier de mesures de protection, qui en font la demande », note Patrice Béringer. Il faut savoir que l'éleveur, titulaire d'un permis de chasser, peut intervenir uniquement s'il obtient l'accord de la DDT par délégation. « Pour autant, les lieutenants sont les seuls à disposer de certains matériels, comme des armes et des lunettes à imagerie thermique, par exemple », rappelle-t-il.
Si la prédation s'installe dans un secteur avec plusieurs attaques et un grand nombre de victimes, la louveterie peut toutefois appuyer la défense d'un troupeau. « Depuis 2016, 120 autorisations de tirs de défense ont été délivrées dans la Drôme », assure Patrice Béringer, alors que « les tirs de défense renforcés sont autorisés sous dérogation, le loup étant une espèce protégée ». Dans les faits, en 2019, la majorité des loups prélevés l'ont été par des lieutenants. « Ils ont un rôle accru pour enrayer la prédation ». Les lieutenants de louveterie de la Drôme ont ainsi abattu cinq loups, sur les 98 prélevés sur le territoire national.
Protéger les intérêts agricoles
L'année 2019 à peine terminée (180 attaques relevées pour 477 animaux indemnisés) que 2020 a déjà apporté son premier lot d'attaques de loup. « On réalise des bilans par année civile. Nous avons relevé des attaques jusqu'au 31 décembre et la première de 2020 est arrivée deux jours après. Il n'y a pas de trêve », regrette Patrice Béringer. Du 1er au 22 janvier, la DDT a réalisé cinq constats qui relèvent du loup : « C'est un chiffre déjà très élevé pour la période dans laquelle nous sommes. Cela s'explique par les températures relativement clémentes de cet hiver ». Pour autant, les lieutenants de louveterie n'ont ici pas été mobilisés. « La préfecture a été prévenue trop tard. La chance de réussite dépend du fait d'aller rapidement sur les lieux de l'attaque, en surveillance, car il est courant de voir le loup revenir sur des cadavres frais... », précise-t-il.
Si le loup constitue l'un des dossiers majeurs, les lieutenants de louveterie interviennent également sur la régulation des sangliers ou des renards. « Ce sont d'autres espèces qui créent des dommages ou des risques pour la sécurité publique », indique Michel Metton, qui vient d'être reconduit à la présidence de l'Union régionale de louveterie Auvergne-Rhône-Alpes, laquelle compte environ 270 louvetiers. Ainsi, et dès lors que cela est nécessaire, le préfet peut ordonner des chasses particulières afin de régler des difficultés ponctuelles pour lesquelles les battues ne sont pas appropriées, dans un milieu urbain notamment.
Amandine Priolet