Les marchés de bestiaux en congrès

Affluence particulière ce lundi matin 13 avril à la halle aux veaux. Parmi les animaux, les éleveurs et les négociants, on notait la présence de membres de la fédération des marchés de bétail vif (FMBV), d'élus locaux, du président du Sénat et de nombreux curieux.
Saint-Laurent-de-Chamousset a en effet accueilli le congrès national 2015 de la FMBV, cette association qui regroupe une cinquantaine de marchés aux bestiaux. L'objectif est de doter la filière française d'un réseau de marchés aux bestiaux modernes et d'équipements fonctionnels (voir ci-dessous). Selon Roger Goubier, président de l'association de promotion du marché aux veaux de Saint-Laurent, plus d'une trentaine de marchés de France étaient représentés.
Après s'être familiarisées avec le fonctionnement de la halle aux veaux opérationnelle depuis 2008, les personnalités ont procédé à l'ouverture du congrès en fin de matinée. Pierre Varliette, maire de Saint-Laurent, était le premier à prendre le micro pour exprimer sa fierté d'accueillir les congressistes venus de France et de Navarre et pour saluer la présence de Gérard Larcher, président du Sénat, « qui montre la reconnaissance que vous avez pour notre territoire et notre agriculture ». Il a retracé l'histoire du marché de Saint-Laurent qui a commencé en 1497 et dont les rôles sont aujourd'hui encore de « valoriser, comparer, coter et gagner ». « Notre marché aux veaux fédère 350 éleveurs apporteurs, 21 entreprises. Et 11 000 veaux passent chaque année entre ses murs. Il se classe sixième au plan national, c'est dire sa place de moteur pour l'agriculture locale et l'économie de toute la région. Sans oublier qu'il est aussi un lieu de vie et de société. ». Des propos qui allaient dans le même sens que ceux de Gilles Rousseau, président de la FMBV. « Chaque jour, en France, se tient un marché aux bestiaux. Ces marchés sont là pour garantir la transparence, notamment grâce au système de cotations. Il faut redonner la possibilité à nos éleveurs de vivre de leur métier car ils ne sont ni des fraudeurs, ni des voyous », a-t-il insisté.
Gérard Larcher, défenseur du monde rural
Le mot de la fin est revenu au président du Sénat, pour qui Saint-Laurent-de-Chamousset n'est pas inconnu. En effet, vétérinaire de formation, il a effectué des remplacements dans le département au début de sa carrière. Il a d'abord voulu témoigner son attachement et sa sensibilité au monde rural. « Venir ici, c'est plonger dans notre histoire. C'est voir ce qu'est la vie sur un territoire qui peut apporter beaucoup à la métropole lyonnaise. Cette France-là, qui vit à côté d'une autre, est pourtant celle qui produit car rappelons que les productions agricole et agroalimentaire sont le deuxième poste qui contribue à rééquilibrer la balance commerciale : par exemple le marché de bétail vif représente 15 % des transactions et la part des ventes de broutards sur les marchés des pays tiers dépasse les 30 %. » Et d'adresser un message fort aux ruraux : « Des régions comme les monts du Lyonnais, le Beaujolais... participent au dynamisme économique et ne sont pas seulement des réserves de verdure pour les urbains ! Et pourtant, cette France-là se sent abandonnée. Or le monde rural doit croire en son avenir. Nous sommes à vos côtés et le Sénat représente tous les territoires. » Sur la réglementation, Gérard Larcher a invité à être « attentifs car une partie de la surréglementation est de notre responsabilité. À vous, lors de ce congrès de faire des propositions ».
Emmanuelle Perrussel
Les marchés de gré à gré devront évoluer
La majorité des marchés de bétail vif sont des marchés de gré à gré. Même si le soutien des collectivités locales reste important, chacun des 51 adhérents à la FMBV s’interroge sur ses évolutions. La première table ronde du congrès national de la FMBV, le 13 avril à Saint-Laurent-de-Chamousset, traitait du rôle des collectivités territoriales dans l’évolution des marchés de gré à gré. Le marché aux veaux de Saint-Laurent fonctionne en régie municipale, qui s’appuie sur une association de promotion pour le dynamiser. « C’est un marché qui est totalement adapté à l’offre et à la demande des utilisateurs sur la commune », indiquait Christel Passelègue, secrétaire générale à la mairie et gestionnaire du dossier. Cette organisation « efficace, adaptée et moderne pour les apporteurs et les négociants » tient aussi de la volonté politique de soutenir les activités agricoles. Mme Passelègue ne cache pas les difficultés qui peuvent exister en matière de paiement, face auxquelles « on s’adapte et on trouve des solutions ». Les apporteurs ont aussi la possibilité de s’abonner, leur permettant de réduire leurs droits d’entrée (1,60 € / veau). « Le marché aux veaux est un élément moteur de notre économie, mais nous restons vigilants à ce que tout cela perdure. L’association de promotion a été créée pour qu’il y ait plus d’apporteurs », déclarait Pierre Varliette. Le maire du village craint que les agriculteurs locaux qui soutiennent le marché de Saint-Laurent ne soient pas ceux qui le fassent vivre. Le risque existe que certains profitent de la cotation pour réaliser des ventes à la ferme. Pourtant, « il y a un véritable bénéfice pour les apporteurs qui peuvent doubler le prix de leurs veaux sur le marché », a soutenu la secrétaire générale.Volume et garantie de paiement
« Les marchés ne se seraient pas mis en place s’il n’y avait pas eu les mairies. Aujourd’hui, il existe différents types d’organisations et différentes raisons aussi qui les conduisent à évoluer », a commenté Gilles Rousseau, président de la FMBV. Le volume des transactions est un élément porteur pour un marché. A Château Gontier (Mayenne), le marché aux veaux et aux ovins fonctionnait très bien jusqu’à l’apparition de la fièvre aphteuse, qui a très nettement fait chuter son activité. Pour le relancer, les organisateurs ont décidé d’associer les commerçants à sa gestion, de remettre à plat son mode de fonctionnement et de faire des économies. Ils ont créé une société anonyme d’économie mixte qui regroupe 66 actionnaires. « Nous avons réussi à mobiliser les commerçants qui sont devenus acteurs de leur marché », explique le directeur de la SAEM du parc Saint Fiacre.
Le marché de Bourg-en-Bresse, en SAEM depuis 30 ans, a créé « une caisse de sécurisation pour permettre de maintenir un niveau d’activité et conforter les apports et les achats », indique son président Paul Dresin. La commune réfléchit aussi à faire évoluer sa régie municipale vers une SAEM, car la première n’est pas adaptée à la mise en place d’une garantie de paiement. Gilles Rousseau, président du marché ovins d’Hérolles (Vienne), expliquait que pour endiguer la baisse du nombre d’éleveurs, celui-ci avait dû évoluer vers un marché au cadran et « faire entrer des broutards aux côtés des moutons ». Le nouveau marché au cadran sera géré par une société par actions simplifiée (SAS), qui permet plus de réactivité et a remotivé les éleveurs.
Sébastien Duperay