Les méteils sont source d’autonomie

On appelle « méteil » l'association d'une ou plusieurs céréales à paille avec une ou plusieurs espèces de protéagineux. En Rhône-Alpes, les méteils les plus courants sont constitués d'une base triticale et pois fourrager, le triticale étant un solide tuteur pour le pois fourrager. Pour favoriser la diversité végétale en culture ainsi que la diversité des types d'amidon donnés aux animaux d'élevage, il est souhaitable de diversifier au maximum le mélange en y ajoutant d'autres céréales (avoine, orge, seigle...) et d'autres protéagineux (pois protéagineux, vesce, féverole, lupin).
Une culture facile à conduire en zéro phyto
Les méteils, qu'ils soient en bio ou non, ne nécessitent quasiment aucune intervention entre le semis et la récolte. Leur pouvoir couvrant les rend extrêmement concurrentiels vis-à-vis des adventices et la diversité des espèces présentes constitue un très bon rempart contre l'apparition et la propagation des maladies. Le principal atout des méteils réside dans la régularité de rendement, mais la proportion des différentes espèces à la récolte peut être très variable selon les conditions météo de l'année.
Sur les quatre dernières années, deux ont été favorables aux protéagineux (2010 et 2013) avec des hivers peu rigoureux et des printemps frais et humides. L'année 2013, avec ses conditions climatiques extrêmes, a d'ailleurs bien mis en avant l'intérêt des associations de plantes ayant des physiologies et des exigences différentes. En 2011, la sécheresse printanière a fortement pénalisé les protéagineux et en 2012 les grands froids de février ont généralement fait disparaître les pois s'ils n'étaient pas protégés par la neige. En termes de valeur protéique, nous retrouvons bien sûr une relation directe entre la part de protéagineux à la récolte et la teneur en protéine des mélanges, celle-ci se situant en moyenne autour de 15-16 % mais pouvant varier entre 11 % et plus de 20 % selon les années.
Expérimentation lupin-avoine en cours
Quels protéagineux choisir en complément du pois fourrager et de la vesce ?
La féverole est une plante intéressante de par sa valeur protéique et sa contribution à la diversité des légumineuses dans les assolements. Elle peut également servir de tuteur au pois pour des méteils faiblement fournis en céréales. Elle présente cependant deux limites dans notre région : il faut la semer à 6-10 cm de profondeur pour la protéger des fortes gelées hivernales (donc semis en 2 passages si on l'associe à des céréales / pois) et privilégier absolument des terrains profonds à bonne réserve utile car elle est très sensible aux coups de chaleur et de sécheresse au moment de la floraison. En Suisse, les pois protéagineux sont privilégiés par rapport aux pois fourragers car ils provoquent moins de verse. Ils sont en général associés à l'orge, en mélange d'hiver ou de printemps. Ils sont néanmoins plus sensibles au froid que les pois fourragers. Le lupin est quant à lui peu utilisé du fait de sa récolte plus tardive et de sa sensibilité au salissement. Des essais d'association avec de l'avoine et de la caméline en mélange de printemps sont en cours et semblent apporter des résultats encourageants.
David Stephany - Adabio et Claire Baguet – chambre d'agriculture de l'Ain pour le pôle régional de conversion bio.
Philippe Barral est associé au Gaec de Charro, éleveur de vaches laitières bio à Champagne-en-Valromey dans l’Ain. Il cultive des méteils depuis quinze ans.
Enrichir le concentré en protéines«Nous étions encore en conventionnel lorsque nous avons commencé » à cultiver des méteils. Le but était l’autonomie et l’impasse sur les désherbants ne nous gênait pas (aucun produit sélectif d’une graminée et d’un protéagineux). Nous récoltons tous nos méteils en grains secs, dans le but d’apporter de la protéine avec notre céréale. Nous avons fait plusieurs essais de mélanges : triticale et pois fourrager au départ, puis ajout d’orge. Mais l’orge, mûrit trop tôt et dégraine avant la récolte. Avec de l’orge d’hiver pure et du pois, il faut attendre la maturité du pois et l’orge se brise et tombe au sol. Un méteil avoine-triticale-pois offre des sources d’amidon différentes mais, lors de printemps humides, l’avoine envahit le triticale. Le trieur ne les séparant pas et, comme nous ressemons nos graines, au bout de quelques années il y a trop d’avoine dans le mélange. Nous semons également de l’orge de printemps avec du pois fourrager, la maturité est assez semblable cette année. Nous avons ajouté du triticale à ce mélange mais, là, verdict au mois d’août… Globalement, nous sommes satisfaits des méteils, qui représentent maintenant les trois quarts des céréales semées sur la ferme. Xavier Fromont est éleveur de vaches allaitantes en bio à Confrançon dans l’Ain. Il a semé son premier triticale-pois en 2005.
Des méteils à visées multiples
Jusqu’à présent j’utilisais des mélanges très simples : triticale ou blé ou seigle + pois. Les variétés étaient choisies en fonction de la possibilité de re-semis, ou des disponibilités à la coop… J’ai eu quelques déconvenues avec des pois résistant mal à l’humidité ou au gel. L’idéal serait d’en semer plusieurs variétés, ou d’ajouter un autre protéagineux. Complexifier les associations paraît intéressant… Pour la structure du sol et, parce que ses gros grains sont faciles à trier dans du blé, la féverole a donné de bons résultats l’an passé associée à du blé. Aujourd’hui, je m’oriente sur deux logiques. Tout d’abord des mélanges simples blés (2 ou 3 variétés) - pois ou blés - féveroles récoltés en grains, puis triés pour une valorisation du blé à la vente et des protéagineux par les animaux. Cette année, la différence de vigueur des cultures blé-pois ou blé-féverole est frappante à l’œil avec le blé pur... A confirmer à la récolte ! Je vais semer aussi des mélanges plus complexes pour une récolte en fourrage ou en grains mélangés pour les vaches. En cas de récolte en fourrage, mon objectif est de faucher au stade floraison du pois et d’implanter un maïs ou une culture type sorgho ou millet + trèfle d’alexandrie derrière.