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Collectivités rurales

Les pérégrinations d’Axel Khan dans les campagnes françaises

MAIRES RURAUX / L’association des maires ruraux de France avait invité le célèbre généticien, et auteur, Axel Khan, à son assemblée générale du 19 et 20 mars à Lyon. L’occasion de parler d’aménagement du territoire sous une forme plus humaniste et sensible.

Les pérégrinations d’Axel Khan  dans les campagnes françaises

Axel Khan a traversé deux fois la France. À pied. Une première fois en 2013 de Givet, dans les Ardennes, à Saint-Jean-de-Luz ; une seconde fois en 2014 de la Pointe-du-Raz à Menton. Une plongée dans la France « profonde » qui lui a inspiré deux ouvrages et surtout une vision humaine de la ruralité mais sans être ni passéiste, ni nostalgique. « Je me suis rendu compte comment il pouvait être compliqué de vivre dans des petits villages dépourvus de bureau de poste, d'école, de commerces..., remarque-t-il. Mais j'ai noté une grosse différence entre les anciens villages industriels et les zones agricoles. L'agriculture continue de produire des richesses, certes avec moins de bras. Il peut y avoir un mal-être, des tensions liées à l'isolement, mais cela n'a rien à voir avec le désastre créé par le déclin de l'industrie sur un territoire. » Axel Kahn constate également, qu'à quelques exceptions près, la désertification des zones rurales s'est arrêtée dans les années 1980 et que depuis, de nombreux villages ont regagné des habitants. « Même si on ne retrouvera pas le niveau de population du début du XXème siècle. »

Les néoruraux, la chance des campagnes

Le généticien a été le témoin du dynamisme retrouvé de certaines zones avec l'arrivée de néoruraux parfois étrangers : « des Anglais en Bretagne, des Hollandais dans le Morvan » ; parfois des jeunes originaires du village qui reviennent avec des projets économiques (la création d'une micro-brasserie...), profitant d'un prix du foncier bas ou de l'arrivée du numérique. Des néoruraux qui tous portent un regard neuf et positif sur leur territoire d'adoption. Et s'il y a parfois des conflits entre les anciens ruraux et les néo, Axel Kahn insiste : « le salut des campagnes passe par eux. La fierté d'appartenir à un village ne doit pas se traduire par un repli identitaire ». Et de s'interroger plus largement sur l'avenir des petites communes. « Par définition, une commune est ce que l'on a à mettre en commun. Quand il n'y a plus de commerces, plus d'école, plus de curé, c'est difficile de trouver quelque chose. Il faut relever ce défi en conservant des lieux de sociabilité et des occasions de se rencontrer. Il faut donner des perspectives économiques et culturelles, les deux sont pour moi intimement liés ». Et de citer l'exemple de sa communale natale Petit-Pressigny en Indre-et-Loire, revigorée par la création d'une fête artistique et littéraire ou ce village des Hautes-Alpes qui avait lutté, avec succès, pour conserver son école de 11 élèves et qui en compte aujourd'hui 33.
Un renouveau des campagnes françaises qui répond à un autre enjeu selon l'auteur : « Le désenchantement et le sentiment d'abandon favorisent la montée des réactionnaires. Les déshérités du monde rural votent pour les extrêmes. Il faut leur redonner espoir sinon des pans entiers de la population feront sécession. »

Un message pour le Président

Un voyage riche et émouvant qui a inspiré à l'auteur une certaine vision du développement local. « 36 000 communes, oui, c'est beaucoup. Mais cela veut dire aussi 500 000 élus municipaux, autant de bénévoles dévoués au service de la collectivité. Dans un pays qui souffre, il serait sot de se priver de ce tissu. C'est le message que j'ai adressé au président de la République qui a sollicité mon avis sur la question. » Une conclusion qui ira droit au cœur des élus de l'AMRF. 

 

Indemnités /
La fronde  des petites communes

Depuis le 1er janvier dernier, l'indemnité de fonction des maires et adjoints des 26 000 communes de moins de 1 000 habitants est fixée automatiquement au maximum du barème prévu. Les montants de ce taux plafond est de 646,25 euros pour les maires des communes de moins de 500 habitants et 1 178,46 euros pour ceux des communes de 500 à 999 habitants. Ces montants  peuvent sembler raisonnables, mais de nombreux élus veulent continuer à pouvoir choisir et dans de très petites communes ce texte pose de réels problèmes budgétaires. À la mi-mars, l'association des maires de France (AMF) confirme recevoir de nombreuses réclamations d'élus sur la mise en œuvre de cette loi. Dans la Creuse, en Corrèze ou en Haute-Garonne, des maires ont haussé le ton. Certains ont choisi de faire chaque mois un chèque en don à la commune, correspondant à la différence entre le taux plafond et ce qu’ils touchaient jusqu’à présent. Toutefois, la grogne ne se fait pas entendre dans tous les départements. À la préfecture de l'Ardèche, qui compte 247 communes de moins de 1 000 habitants, « aucune difficulté n'a été signalée par des élus », dit-on. Dans la Drôme, certains se sont élevés contre ce texte. À Gigors-et-Lozeron (180 habitants), le conseil municipal a pris une délibération précisant que le montant des indemnités versées au maire et aux deux adjoints resteraient identiques à celles des dix dernières années et donc inférieures à ce que prévoit la loi.
Équité pour tous les élus
Avant l'application de la loi, tout le monde semblait satisfait ; on considérait que la fonction de maire était une charge très lourde impliquant beaucoup de responsabilités et qu'il fallait qu'elle soit indemnisée au mieux. Cependant, le caractère contraignant pour les petites communes ne passe pas dans les campagnes. Pour remédier à cette difficulté, en février, Jean-Baptiste Lemoyne, sénateur-maire de Bourgogne, a déposé une proposition de loi dont l'objectif est que le maire continue de toucher d'office ses indemnités mais qu'il puisse, s'il le souhaite, les moduler à la baisse en conseil municipal. Une disposition prévue par la même loi de mars 2015 pour les communes de plus de 1 000 habitants. Ce distinguo entre communes n'est pas du goût de l'AMF. Et à Paris, on laisse entendre que des saisines ministérielles pourraient être déposées rapidement à ce sujet. 
Louisette Gouverne